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Les ambitions nucléaires de l'Egypte financées par la Russie

A l’occasion d’une visite éclair du président Vladimir Poutine au Caire, l’Egypte et la Russie ont signé, le 11 décembre 2017, un accord pour la construction de la première centrale nucléaire égyptienne à el-Dabaa, dans le nord-est du pays. Coût du projet: 30 milliards de dollars (25 milliards d’euros), financés à 85% par un prêt russe. Un projet symbole du retour de Moscou au Proche-Orient.
Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 5min
Le centre de recherche nucléaire d'Inshas, à 60 km au nord du Caire. (MOHAMAD AL SEHETY/AP/SIPA)

Dans les années 60, en pleine Guerre froide, l’URSS avait édifié le second barrage d’Assouan (mis en service en 1971), alors que l’Egypte de Nasser cherchait à affirmer son indépendance en s’émancipant de l’influence occidentale. Un ouvrage qui «fait encore la fierté du pays et continue à fournir eau et électricité à la population», rappelle le site Orient XXI. C’est donc la Russie, et plus particulièrement le groupe public Rosatom, qui va construire la première centrale nucléaire égyptienne. Rosatom va aussi «livrer le combustible nucléaire et former les employés» et assurer «la maintenance et la réparation des unités de production»

Deux réacteurs nucléaires
L’Egypte dispose déjà de deux réacteurs nucléaires qui sont uniquement destinés à la recherche et à la formation. Elle possède également deux installations fabriquant du combustible, selon un rapport sénatorial français. Son «centre de recherche d’Inshas aurait procédé à de nombreuses expériences non déclarées pouvant être utiles à la réalisation d’un programme nucléaire», précise le document.

Vladimir Poutine et Abdel Fattah al-Sissi au Caire le 11 décembre 2017. (Alexander Zemlianichenko/AP/SIPA)

Le contrat, signé en présence des président russe, Vladimir Poutine, et égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, vient entériner un accord signé en novembre 2015 pour la fourniture de quatre réacteurs de 1200 mégawatts chacun. La construction devrait être terminée en 2022 et le premier réacteur nucléaire entrer en production vers 2024. «L’entrée en fonction de cette centrale devrait aussi obligatoirement renforcer les capacités électriques du pays, (…) constamment mises sous pression à la fois par une demande en progression mais aussi par des défaillances des installations et de l’approvisionnement en gaz naturel, qui assure 70% de la production», observe Jeune Afrique.

Selon Reuters, la Russie devrait financer 85% des travaux, l’Egypte les 15% restants.

Les ambitions anciennes de l’Egypte
«En réalisant ce projet, l'Egypte n'obtiendra pas seulement une centrale nucléaire, mais aussi l'accès aux technologies les plus modernes et les plus sûres», a affirmé Vladimir Poutine au cours de la déclaration à la presse.

Les ambitions nucléaires de l’Egypte sont anciennes. Au début des années 80, sous le régime du président Hosni Moubarak, Le Caire avait déjà envisagé la construction d'une centrale nucléaire à el-Dabaa. Mais le projet avait été suspendu après la catastrophe de Tchernobyl en 1986.

Le dossier énergétique est évidemment très politique, comme l’a montré l’histoire du barrage d’Assouan. D’autant que les deux chefs d'Etat ont aussi évoqué un autre important projet commun: la création en Egypte d'une «zone industrielle russe». «Cela sera le plus grand centre de production et d'exportation de biens russes sur les marchés du Moyen-Orient et d'Afrique. Nous prévoyons un volume total d'investissement de sept milliards de dollars environ (six milliards d'euros)», a dit Vladimir Poutine.

Le président russe, dont la précédente visite au Caire remontait à février 2015, a aussi évoqué la question d'un possible retour des touristes russes en Egypte. Les relations entre les deux pays alliés ont été perturbées en octobre 2015 par le crash d'un Airbus d'une compagnie russe (224 morts) après son décollage d'Egypte.

A la suite de cet attentat revendiqué par le groupe djihadiste Etat islamique, la Russie avait suspendu les vols vers l'Egypte. Une mesure toujours en vigueur aujourd'hui, qui a pénalisé le tourisme égyptien. Vladimir Poutine a assuré que son pays était prêt à «reprendre les vols directs entre Moscou et Le Caire». Avant d'ajouter qu'il espérait que cette mesure soit prise «dans l'avenir le plus proche». La preuve que, décidément, il entend se montrer agréable à la partie égyptienne.

La construction d’une centrale à el-Dabaa est un signe supplémentaire du retour de Moscou au Proche-Orient. Mais elle peut aussi s’interpréter comme un message destiné à l’Afrique du Sud. Un pays qui héberge la seule centrale nucléaire du continent. Et «souhaite acquérir six à huit nouveaux réacteurs nucléaires d’une capacité totale de 9600 mégawatts», selon Jeune Afrique. En clair, les propos de Vladimir Poutine sur les technologies nucléaires «les plus modernes et les plus sûres» visaient probablement aussi Pretoria.

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