Nouvelle-Calédonie : face aux violences, des habitants de Nouméa mettent en place des "milices armées" dans certains quartiers

De nouvelles violences ont éclaté dans la nuit de mardi à mercredi à Nouméa, où les indépendantistes s'opposent au projet de réforme constitutionnelle. Une habitante, membre des "voisins vigilants", témoigne de cette tension croissante.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Des violences urbaines ont débuté dans la nuit du lundi 13 au mardi 14 mai en Nouvelle-Calédonie. (DELPHINE MAYEUR / AFP)

Nouvelle nuit de violence en Nouvelle-Calédonie. Au moins deux personnes sont mortes mercredi 15 mai dans les violences qui secouent le "Caillou" depuis l'examen et le vote par l'Assemblée nationale d'un projet de révision constitutionnelle visant à élargir le corps électoral de l'archipel. Emmanuel Macron a annulé une partie de son déplacement prévu dans la journée en Normandie pour présider un conseil de défense consacré à la situation dans l'archipel, a annoncé l'Elysée.

Sur place, le couvre-feu a reconduit jusqu'à jeudi 16 mai. Malgré son instauration, l'île a de nouveau été le théâtre de pillages de magasins, d'incendies et de violences. Le Haut-Commissaire de Nouvelle-Calédonie appelle les habitants à rester chez eux, ou de limiter au maximum leurs déplacements. "On est dans une situation que je qualifierais d'insurrectionnelle", s'est inquiété Louis Le Franc, lors d'une conférence de presse, mercredi. "L'heure doit être à l'apaisement (...) l'appel au calme est impératif", a-t-il réclamé, avant de faire état d'"échanges de tirs de chevrotine entre les émeutiers et les groupes de défense civile à Nouméa et Paita" et dit avoir fait intervenir les policiers d'élite du Raid pour empêcher un groupe d'émeutiers qui se dirigeait vers un dépôt de gaz.

"Je vous laisse imaginer ce qui va se passer si des milices se mettaient à tirer sur des gens armés", a insisté le Haut-Commissaire : "On est dans une spirale mortelle, il faut que ces jeunes que je qualifie d'émeutiers arrêtent".

"Montée en puissance" de la violence

Certains habitants, terrorisés, mettent en place leur propre protection par le biais de groupes, intitulés "voisins vigilants" : "On s'est organisé avec des groupes internet sur les réseaux sociaux pour se donner des informations toutes les nuits en temps réel, sur ce qui se passe dans la rue à telle heure", explique ainsi Nadine. Elle vit dans le quartier la Vallée-des-Colons à Nouméa avec son fils et son mari où des barricades ont été érigées avant l'entrée en vigueur du couvre-feu. Elle n'est sortie de sa maison que contrainte et forcée pour éteindre les incendies déclenchés dans sa rue. Elle l'assure : si elle a bien vu passer quelques pompiers et policiers, les violences reprennent aussi leur départ. 

Preuve de la situation d'insécurité croissante, des vidéos amateur postées sur les réseaux sociaux. Sur des images postées sur Facebook, on découvre des hommes marchant dans une zone de Nouméa. Ils sont casqués et armées de barres de fer et de bâtons : ils veillent, assure ainsi Nadine.

"Des quartiers de Nouméa ont mis en place des milices, avec des rondes et des gens qui sont malheureusement armés parce qu'ils ont peur. Nous avons peur".

Nadine

à franceinfo

Sur une vidéo publiée sur X, la chaîne Nouvelle-Calédonie La 1ère montre ainsi des habitants postés notamment devant un supermarché de Nouméa, scrutant les voitures qui passent. Sur une autre vidéo de La 1ère, on peut ainsi apercevoir des forces de l'ordre donner des consignes de prudence et de calme à ces habitants.

"À certains autres endroits, il n'y a pas de milices parce qu'il n'y a pas de capacité d'organisation en ce sens, poursuit Nadine. Cela dépend de la géographie des quartiers, des populations qui y habitent, de la mixité qui y règne. Il y a une montée en puissance qui s'est faite, semble-t-il, dans la nuit." Elle craint désormais que la violence ne s'intensifie encore.

De son côté, le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer Gérald Darmanin a évoqué des "centaines" de blessés en Nouvelle-Calédonie depuis lundi, dont une "centaine" de policiers et gendarmes. Les forces de l'ordre ont mené un total de 140 interpellations dans la seule agglomération de Nouméa, selon un nouveau bilan dressé par Louis Le Franc.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.