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Violences urbaines : le maire de La Courneuve plaide pour "une grande convention pour travailler sur les besoins de ces quartiers populaires"

Après une nouvelle nuit de violences urbaines, le maire de La Courneuve Gilles Poux appelle à repenser les politiques publiques menées dans les quartiers prioritaires.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Gilles Poux, maire PCF de La Courneuve. (HAJERA MOHAMMAD / FRANCE-BLEU PARIS)

"Il faut arrêter les appels au calme" et travailler "sur les besoins des quartiers populaires", a plaidé vendredi 30 juin sur franceinfo Gilles Poux, maire PCF de La Courneuve (Seine-Saint-Denis), après les violences urbaines qui ont touché plusieurs communes de France ces derniers jours depuis la mort de Nahel, 17 ans, tué par un policier à Nanterre, mardi, lors d'un contrôle routier.

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Selon Gilles Poux, cosignataire d’une tribune publiée dans Le Monde il y a quelques semaines qui réclamait un plan d’urgence pour les banlieues, "les politiques publiques ne sont pas pleinement à l'œuvre sur les territoires comme le nôtre". Il constate que "le mépris se traduit par des mouvements" tels que ceux qui se déroulent en ce moment. "Quand la colère s'empare d'une jeunesse particulièrement déshéritée, ça met notre République en fragilité."

franceinfo : Le mois dernier, vous étiez parmi les signataires d'une tribune publiée dans le journal Le Monde qui réclamait un plan d'urgence pour les banlieues. Est-ce que vous avez l'impression d'avoir crié dans le vide ?

Gilles Poux : Malheureusement oui. Depuis plus de 30 ans, on parle des quartiers dits prioritaires. On a beaucoup investi dans le dur, mais sur les questions sociales, on est toujours dans une situation de jachère. C'est ce qui m'a conduit personnellement, en 2009, à porter plainte auprès de la Halde pour discrimination sociale et territoriale, à faire en 2019 un atlas des inégalités qui montre que les politiques publiques ne sont pas pleinement à l'œuvre sur les territoires comme le nôtre. Tout cela, au bout d'un moment, cela conduit à ces effets dévastateurs quand il y a un drame qui survient comme celui de Nanterre, où des gens ont le sentiment d'être méprisés. Et c'est la colère, la révolte tous azimuts, dans le mauvais sens quand ça s'en prend à des équipements publics. Mais c'est une colère qui est entendable.

Cette tribune réunissait un collectif des maires de tous bords politiques. Est-ce que vous aviez eu une réponse ?

On n'a pas eu de vraie réponse, si ce n'est qu'on allait lancer Quartiers 2030, mais sans aucun moyen réellement supplémentaire. Et dans les premières discussions que nous avons eues avec les préfectures sur les nouveaux contours de ces quartiers prioritaires, on nous dit d'ores et déjà qu'il n'y aura pas d'abondements financiers. Tant qu'on restera dans une situation où l'on ne prend pas la mesure des enjeux des politiques publiques sur ces territoires, des moyens qu'il faut mettre pour rétablir de l'égalité et redonner de l'espoir, on va s'enfermer dans une situation où ces publics-là ont le sentiment d'être méprisés. À un moment donné, le mépris se traduit par des mouvements comme on peut en connaître en ce moment, quand il y a un incident grave qui se produit.

"Parallèlement à cela, ces mêmes gens ont fait l'expérience que quand il y avait des manifestations pacifiques avec le mouvement des retraites, excessivement puissant ils ne sont pas entendus non plus."

Gilles Poux

à franceinfo

En 2020, vous disiez qu'il y a un tel sentiment d'injustice et d'inégalités qu'on n'est pas à l'abri d'une explosion. Est-ce qu'on y est ?

Oui. À force d'entretenir un terreau et de demander, avec des petites distributions, avec le travail des associations, avec le travail des collectivités, d'être ces pompiers du quotidien, ça ne marche pas, ça ne peut pas tenir. Et quand ça s'accumule, ça explose et c'est le cas aujourd'hui. C'est terrible parce qu'on casse des biens communs. Personnellement, j'ai appelé à ce que chacune et chacun ne se trompe pas d'adversaire dans cette colère légitime. Mais quand la colère prend et s'empare d'une jeunesse particulièrement déshéritée, ça part malheureusement dans tous les sens, et ça met notre République en fragilité.

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Comment répondre aujourd'hui à cette crise ?

Je pense qu'il faut arrêter les appels au calme parce que ça n'a aucune chance d'être entendu. Il faut regarder la réalité en face. On aurait besoin d'avoir une parole forte qui dise, 'il y a un drame qui s'est produit, qui est arrivé, qui est inadmissible. Mais il y a autre chose derrière, on l'a entendu. Ces frustrations, on les a entendues. Et on est prêt à lancer une grande convention pour travailler sur les enjeux et sur les besoins de cette jeunesse de ce pays et de ces quartiers populaires. Et on est prêt à y mettre des moyens supplémentaires'. Je pense que si un message comme ça s'exprimait fortement, cela serait de nature à redonner de l'espoir.

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