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Infographies Fin de vie : où et comment meurt-on en France ?

Article rédigé par Yann Thompson
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 5 min
Une soignante échange avec une patiente dans une unité de soins palliatifs au CHU de Poitiers (Vienne), le 5 octobre 2022. (MATHIEU HERDUIN / MAXPPP)
Lieu de décès, cause de mortalité, accès aux soins palliatifs... Un organisme dépendant du ministère de la Santé a publié, en mars, un panorama consacré à la prise en charge des patients avant leur mort.

Des chiffres pour éclairer le débat. Avant la conclusion de la convention citoyenne sur la fin de vie, qui achève ses travaux dimanche 2 avril à Paris, le ministère de la Santé a publié, mi-mars, la troisième édition de l'Atlas des soins palliatifs et de la fin de vie (PDF). Cet ouvrage de 130 pages recense les principales données sur la mortalité et le parcours des malades en France. Il jette une lumière crue sur les inégalités territoriales d'accès aux soins en fin de vie et sur l'insuffisance des réponses actuelles au "souhait de la population de finir ses jours à domicile".

Conçu par le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie (CNSPFV), cet atlas souligne l'enjeu "primordial" de mieux prendre en charge les personnes avant leur mort. Depuis 30 ans, la part des habitants de plus de 75 ans a doublé en France et leur nombre est passé de 3,7 à 6,7 millions, soit 10% de la population française, selon l'Insee. Face à des fins de vie de plus en plus "longues" et "complexes", les besoins d'accompagnement des mourants "ne devraient pas cesser d'augmenter dans les années à venir", préviennent les auteurs. En lien avec le CNSPFV, franceinfo dresse cinq cartes et graphiques pour mieux comprendre ce qui est en jeu dans le débat sur la fin de vie.

Les cancers sont la première cause de mortalité

Deux types de pathologies sont à l'origine de la moitié des décès en France, selon l'Inserm : les cancers, qui représentent 28% des cas, et les maladies de l'appareil circulatoire, comme les infarctus ou les insuffisances cardiaques, à 24%. Suivent, loin derrière, les maladies de l'appareil respiratoire (bronchites, pneumonies, etc.), celles du système nerveux (Parkinson, Alzheimer, etc.) et les accidents, suicides et autres morts violentes.

Mais les profils des patients en fin de vie se "complexifient", selon le CNSPFV : "47% des hommes et 36% des femmes de 75 ans ou plus cumulent au moins deux pathologies", d'après des données des services statistiques du ministère de la Santé (Drees, document PDF). Face à la "forte augmentation" de ce public, la prise en charge des personnes atteintes de maladies chroniques et de polypathologies constitue "sans doute l'enjeu majeur des systèmes de santé", soulignait déjà la Drees en septembre.

Les départements ruraux sont marqués par une surmortalité

En 2019, 613 000 personnes sont mortes en France, soit un taux brut national de 9,1 décès pour 1 000 habitants, selon l'Insee. C'est dans la Creuse que le nombre de morts rapporté à la population locale était le plus élevé (16,8 pour 1 000), devant la Nièvre (14,6), le Cantal (14,2) et l'Indre (14,1). Ces territoires ruraux figurent parmi les départements comptant la plus grande proportion de personnes âgées. A l'inverse, les départements de la région parisienne, devancés par Mayotte, la Guyane et La Réunion, dont la population est particulièrement jeune, ont enregistré moins de 7 décès pour 1 000 habitants.

Un Français sur deux meurt à l'hôpital

En 2019, en France, 53% des décès ont eu lieu en établissement hospitalier ou dans une clinique privée, contre 24% à domicile et 12% en maison de retraite. Une exception est à noter dans les départements et région d'outre-mer, où mourir chez soi ou en Ehpad est plus fréquent qu'à l'hôpital.

Cette forte mortalité en milieu hospitalier date de la fin des années 1970, marquée par une explosion des décès en établissement de santé et un plongeon des morts à domicile, selon l'Insee. On parle depuis de médicalisation, voire de surmédicalisation, de la mort. Une marche arrière est toutefois en train de s'opérer en ce début de siècle, avec un recul de cinq points en dix ans des décès à l'hôpital. Cela s'explique par le "virage ambulatoire" opéré par la France, qui vise à transférer une partie de l'activité hospitalière vers le domicile et les Ehpad.

21 départements sont privés d'unité de soins palliatifs

La qualité de la fin de vie des Français dépend en partie de leur capacité à bénéficier de soins palliatifs, qui visent à prévenir et à soulager les souffrances physiques et psychiques. Si la loi reconnaît aux patients le droit d'accéder aux soins palliatifs, la réalité est plus compliquée. Un département sur cinq restait dépourvu d'unité de soins palliatifs (USP) fin 2021, ce qui prive les patients de ces territoires d'un accès proche à l'un de ces services de pointe de prise en charge palliative. On retrouve parmi ces départements la Corrèze, la Creuse, l'Indre et le Lot, qui figurent pourtant parmi ceux dont la mortalité pour 1 000 habitants est la plus forte.

La situation s'améliore toutefois d'année en année, avec un quasi-doublement du nombre d'USP depuis 2006. Surtout, l'absence d'USP ne signifie pas l'absence de soins palliatifs dans un département. Il existe de nombreux lits identifiés de soins palliatifs (Lisp), dans des services comme l'oncologie ou la gériatrie, où le patient doit pouvoir bénéficier d'une attention particulière. Ces Lisp sont souvent sur-représentés dans les territoires sous-dotés en USP. En parallèle, des équipes mobiles de soins palliatifs, présentes dans chaque département, ont pour mission de se déployer dans les hôpitaux ou en dehors, pour épauler les professionnels de santé confrontés à des besoins spécifiques.

La prise en charge palliative à domicile se développe

Dans le cadre du virage ambulatoire opéré en France depuis plus de 20 ans, un nombre croissant de patients bénéficie d'une hospitalisation à domicile (HAD). Grâce aux compétences palliatives des équipes de HAD et au soutien des équipes mobiles, les soins palliatifs se font une petite place dans les Ehpad et chez les Français. Le nombre de bénéficiaires de soins palliatifs à domicile a ainsi progressé de 60% entre 2013 et 2019 (et même de 112% en incluant les années 2020 et 2021 marquées par le Covid-19), selon des données de l'Agence technique de l'information sur l'hospitalisation.

Cette évolution ne doit pas faire oublier la large majorité de personnes qui meurent à domicile ou en maison de retraite sans prise en charge palliative. Seul un quart des Ehpad compte au moins un membre du personnel formé aux soins palliatifs. Un tiers des structures n'a pas non plus de convention avec une équipe mobile, selon le CNSPFV et un cinquième n'a pas inclus de volet soins palliatifs dans son projet d'établissement.

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