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Que dit la proposition de loi sur les mutuelles ?

Un texte permettant aux mutuelles de faire fonctionner leurs réseaux de soins est examiné à l'Assemblée nationale aujourd'hui. 

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Les réseaux de soins sont surtout mise en place pour l'optique, le dentaire ou les audioprothèses. (DIDIER PALLAGES / AFP)

SANTE - Le "parcours de soins" est-il semé d'embûches ? Une proposition de loi permettant aux mutuelles de faire fonctionner des réseaux de soins est examinée à l'Assemblée nationale, mercredi 28 novembre. Mais ce texte fait réagir les médecins. Pour mieux comprendre, francetv info résume le sujet en quatre questions.

1 Qu'est-ce qu'un réseau de soins ?

Jusqu'à 2010, "les mutuelles avaient (...) la possibilité d'augmenter leur taux de remboursement lorsque l'usager passait par des professionnels qui ont souscrit un conventionnement avec elles", se souvient Etienne Caniard, président de la fédération des Mutualités françaises, qui regroupe la quasi-totalité des mutuelles santé (à but non lucratif), interrogé par Libération. Ainsi se constituent des réseaux de praticiens, lesquels acceptent, à l'issue de négociations avec la mutuelle, de faire baisser le prix à charge des patients. Par exemple, les adhérents de Santéclair bénéficient de 40% de réduction sur les verres de lunettes chez les opticiens appartenant à son réseau, note Le Parisien (article payant)Le premier réseau de soins a été créé par la Mutuelle générale de l'Education nationale (MGEN) en 1992 après un accord avec les orthodontistes. 

Ce genre de pratiques est assez courant, notamment dans les domaines où les mutuelles sont les principaux financeurs, c'est-à-dire quand les remboursements de la Sécurité sociale sont faibles, comme l'optique, les soins dentaires ou les audioprothèses. Mais les médecins sont aussi concernés. Ainsi, 470 praticiens libéraux travaillant dans des cliniques ont passé des conventions individuelles avec des mutuelles, s'engageant à modérer leurs dépassements d'honoraires moyennant des avantages.

2Pourquoi sont-ils mis en cause ?

La Cour de cassation a interdit ces réseaux de soins en mars 2010, en se fondant sur le Code de la mutualité, qui empêche toute discrimination entre les adhérents à même niveau de cotisation. Depuis, seuls les assureurs, les institutions de prévoyance et les complémentaires santé à but lucratif sont libres de signer des accords avec les médecins. Les mutuelles vont quant à elles faire valoir le fait que les usagers ont tout à fait le droit de consulter un professionnel de santé extérieur au réseau : "Ils bénéficient du taux de remboursement auquel ils ont souscrit, la seule différence étant qu'ils ne bénéficient pas du petit bonus en plus négocié par la mutuelle et le professionnel", assure-t-on à la Mutualité française.

Mais certains médecins libéraux et internes voient dans l'autorisation des réseaux de soins une atteinte à la liberté de choix du médecin. Ce sont surtout les plus jeunes qui s'inquiètent, et une nouvelle manifestation d'internes a eu lieu mardi 27 novembre devant le ministère de la Santé. "Dire que demain vous serez mieux remboursé si vous allez chez tel médecin plutôt qu’un autre, c’est supprimer de fait la liberté de choix pour une grande partie de la population. Seuls les patients qui auront les moyens pourront se faire soigner là où ils le souhaitent", estime ainsi Julien Cabaton, de l’Intersyndicat national des chefs de clinique assistants, dans Libération"Et qui nous dit que demain, les mutuelles ne nous imposeront pas certaines pratiques médicales guidées par des impératifs purement économiques ?" prévient-il.

La Mutualité française réclame une égalité de droits avec les complémentaires santé et les assureurs en ayant l'autorisation de mettre en place, elle aussi, des réseaux de soins. "Un système gagnant-gagnant dans lequel les parties en présence – professionnels de santé, organismes complémentaires et assurés – trouvent leur compte", note l'UFC-Que choisir. Cette régulation est par ailleurs encouragée par différentes institutions, dont la Cour des comptes. La proposition de loi vise aussi à respecter la promesse de François Hollande de réduire le montant des soins à charge des patients.

3Que prévoit cette nouvelle loi ?

"Cette proposition de loi vise donc à acter la possibilité pour les mutuelles d’instaurer des différences dans le niveau des prestations lorsque l’assuré choisit de recourir à un professionnel de santé, un établissement de santé ou un service de santé membre d’un réseau de soins ou avec lequel les mutuelles ont conclu un contrat comportant des obligations en matière d’offre de soins", souligne le texte dans son introduction.

La loi permettrait donc de rétablir le système tel qu'il existait avant l'arrêt de la Cour de cassation en 2010.

Les législateurs ont néanmoins chercher à rassurer les médecins. Un amendement soutenu par la ministre de la Santé, Marisol Touraine, prévoit que les conventions des mutuelles ne pourront contenir "aucune stipulation portant atteinte au droit fondamental de chaque patient au libre choix du professionnel, de l'établissement ou du service de santé". Il s'agit d'"apaiser le débat", a déclaré la députée PS Catherine Lemorton au cours de la réunion à huis clos de la commission des Affaires sociales.

De plus, les conventions ne pourront "porter sur le niveau des tarifs pratiqués par les médecins pour les actes et prestations qui sont remboursés" par l'Assurance maladie. Ainsi, par exemple, les mutuelles pourraient passer un accord avec un spécialiste de la chirurgie de la myopie, non remboursée par la Sécu, mais pas avec un chirurgien des varices, dont les actes sont pris en charge.

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