Onze grammes d'alcool par litre de sang, c'est "plus de huit bouteilles de vin"
Un homme a été retrouvé à Avignon avec un taux d'alcoolémie record et, normalement, mortel. L'addictologue Philippe Batel juge ce cas exceptionnel.
Un homme de 40 ans, victime d'une violente agression dans la nuit du jeudi 11 au vendredi 12 avril à Avignon (Vaucluse), a été laissé pour mort. Deux hommes l'auraient repéré dans un bar avant de le passer à tabac. Les coups ont failli lui être fatals mais, une fois pris en charge à l'hôpital de la Timone, à Marseille, c'est son taux d'alcoolémie qui a choqué : 11 grammes par litre de sang. Un taux normalement mortel.
Philippe Batel, psychiatre et chef de l'unité Traitement ambulatoire des maladies addictives de l’hôpital Beaujon, à Clichy (Hauts-de-Seine), répond aux questions de francetv info.
Francetv info : Comment peut-on survivre à une telle alcoolémie ?
Philippe Batel : C'est exceptionnel. L'homme qui a été retrouvé doit avoir une consommation très régulière d'alcool pour avoir ce degré de tolérance. L'alcool agit comme un ralentisseur des fonctions cérébrales : à un moment, on s'endort ou on tombe dans le coma, ce qui arrive entre 4 et 5 grammes chez un homme, normalement. Le risque ensuite est que l'alcool touche l'activité respiratoire, ce qui peut provoquer la mort. Mais visiblement, il était loin d'en être là puisqu'il est sorti du bar sur ses deux pieds. Lorsqu'on est alcoolique, le cerveau développe une forme de résistance à l'alcool, de sorte qu'il faut intensifier sa consommation pour en ressentir les effets.
A quoi correspondent onze grammes par litre de sang, en termes de consommation ?
Un homme de 80 kilos doit boire 700 grammes d'alcool pour avoir un taux d'alcoolémie de 10 grammes. Cela correspond à plus de huit bouteilles de vin ou à trois bouteilles de whisky.
Quelles évolutions remarquez-vous dans les modes de consommation d'alcool ?
La consommation d'alcool stagne depuis quelques années, alors qu'elle n'avait jusque-là cessé de baisser. C'est assez inquiétant. De plus en plus de nos patients ont une consommation d'alcool irrégulière, concentrée en fin de semaine. Et les risques de l'alcoolisation immédiate sont largement sous-estimés. Parmi les 49 000 morts liées à l'alcool chaque année, on pense toujours aux accidents de la route, aux maladies, aux suicides, mais il y aussi les gens qui, ivres, représentaient des proies faciles et ont été agressés. Au final, la majorité des arrestations effectuées par la police en France a pour origine une affaire liée à l'alcool.
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