Cinquième vague "fulgurante" du Covid-19 : Arnaud Fontanet appelle les plus de 80 ans non vaccinés à arrêter de "prendre des risques"
Leur risque de mourir "est supérieur à 10% s'ils sont infectés", souligne l'épidémiologiste. "On peut choisir de s'exposer moins, ajoute l'épidémiologiste. Ce n'est pas le moment de faire des rassemblements de famille".
"C'est totalement absurde de prendre des risques pareils alors qu'on a des vaccins sûrs et efficaces", déplore l'épidémiologiste à l'Institut Pasteur et membre du Conseil scientifique Arnaud Fontanet lundi 22 novembre sur franceinfo, alors que 13 % des personnes âgées de plus de 80 ans ne sont toujours pas du tout vaccinées contre le Covid-19 et que la cinquième vague est "fulgurante", selon le mot du porte-parole du gouvernement.
franceinfo : Pourquoi les chiffres de l'épidémie remontent si vite ?
Arnaud Fontanet : Il y a deux raisons à cette reprise. La première, c'est ce qu'on appelle l'effet climatique. Il fait plus froid récemment, les gens se retrouvent plus en intérieur. S'ils n'aèrent pas, s'ils ne portent pas de masque, ils s'exposent. Le variant Delta est plus transmissible que les précédents et on se rend compte qu'en milieu intérieur, il se transmet vite. Cette reprise a été plus rapide que ce qui a été anticipé. Ça se voit dans toute l'Europe. Ça commence avec l'Europe de l'Est et puis maintenant nos voisins et en France. La deuxième raison de cette reprise est une baisse d'efficacité du vaccin, toujours dans le contexte d'un variant Delta qui a une charge virale plus élevée que ses prédécesseurs et cette baisse de l'efficacité du vaccin se manifeste. Six mois après la deuxième dose, vous avez une protection qui est de l'ordre de 50 % alors qu'elle était à 90 % juste après l'injection. En revanche - et c'est la bonne nouvelle - le risque contre les formes sévères lui reste très diminué. Vous diminuez de 90 % votre risque d'être hospitalisé si vous êtes vaccinés, c'est pour ça qu'il est essentiel de se vacciner. Mais ça ne protège pas complètement contre l'affection et vous allez tous voir, dans votre entourage, des gens vaccinés qui s'infectent, ce qui contribue à la transmission et à la circulation du virus.
Comment faire alors pour empêcher la flambée de l'épidémie ?
Ce qui est très important, c'est que les deux raisons de cette crise donnent aussi un peu les clés. Il faut porter des masques, il faut ouvrir les fenêtres et il faut limiter les moments où on se retrouve dans une situation à risque – sans masque dans un milieu clos avec les fenêtres fermées. Et puis, pour ce qui concerne la baisse de l'efficacité vaccinale, il y a un rappel qui est très efficace puisqu'on sait qu'un mois après avoir reçu votre dose de rappel, la concentration d'anticorps neutralisants est cinq à dix fois supérieure à ce qu'elle était un mois après la deuxième dose. C'est vraiment un saut quantitatif. Le rappel booste vraiment votre immunité. Ca divise par 10 votre risque d'infection, par 20 votre risque d'hospitalisation par rapport à des gens qui ont eu une deuxième dose mais pas de rappel. Donc ce rappel est très important notamment pour les personnes qui sont à risque de formes graves. On a encore 10 % de personnes qui n'ont pas reçu d'injection, qui ne sont pas vaccinées du tout. Ces personnes sont très à risque de s'infecter et de faire des formes graves. Je pense surtout aux plus de 80 ans dont 13% ne sont pas vaccinés. Leur risque de mourir est supérieur à 10% s'ils sont infectés. On a un virus extrêmement transmissibles donc c'est totalement absurde de prendre des risques pareils alors qu'on a des vaccins sûrs et efficaces.
Le Conseil scientifique envisage-t-il de reconfiner comme en Autriche ?
On a beaucoup d'incertitudes sur la suite parce que ces reprises ont été très brutales, ce qui veut dire que l'effet climatique et la transmission en milieu fermé sont plus forts que ce que nous pensions qu'ils seraient.
"L'évolution de cette épidémie est très volatile et il est trop tôt pour pouvoir dire jusqu'où les mesures devront aller pour bloquer cette vague."
Arnaud Fontanet, épidémiologisteà franceinfo
Ce qui est sûr, c'est qu'il faut agir tôt. Le plus tôt vous agissez, le moins longues seront les mesures et le moins dures elles seront. Si l'évolution se faisait sans pouvoir être contrôlée, qu'on voyait les chiffres absolument s'envoler, y compris les chiffres d'hospitalisations, il y a un moment où un autre où vous vous dites qu'il faut reconfiner. Mais pour l'instant, la France est dans une meilleure situation aujourd'hui parce qu'au moment où cette nouvelle vague a démarré, d'une part le démarrage a été plus lent, le mois d'octobre a été plus clément comparé à des pays d'Europe du Nord, d'autre part, notre situation vaccinale dans l'ensemble est plutôt bonne. On a une couverture vaccinale qui est élevée. Et puis on a déjà des mesures en place qu'on a gardées, ce qui a fait que ce redémarrage a été plus tardif et plus lent. Il est très difficile aujourd'hui de vous dire qu'elle va être la cinétique que va prendre cette épidémie. On ne peut rien écarter mais pour l'instant il y a des outils à mettre en route rapidement. Et puis il y a aussi des comportements individuels à prendre. On parle toujours de ce que le gouvernement pourrait faire mais nous individuellement on peut choisir de s'exposer moins. Ce n'est pas le moment de faire des rassemblements de familles, de se mettre dans ces situations où on est à risque. On porte plus le masque, on aère, il y a beaucoup de choses qu'on peut faire.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.