Dépakine : Sanofi refuse de contribuer à l'indemnisation des victimes
Coup dur pour les victimes de la Dépakine : le laboratoire Sanofi, qui commercialise le traitement, a refusé de prendre part au fonds d’indemnisation des victimes. D’après la firme, l’Etat seul est responsable de ce scandale sanitaire. Sanofi "ne peut donner suite" aux premiers avis d'indemnisation envoyés par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam), selon une déclaration du géant pharmaceutique français rendue publique le 16 janvier.
Le laboratoire aurait informé les autorités
Le laboratoire se défend en affirmant, notamment, qu’il a "informé les autorités en toute transparence" sur les risques de la Dépakine pour les femmes enceintes, au fur et à mesure de l'avancée des connaissances scientifiques. Depuis la fin des années 1980, les autorités de santé auraient même plusieurs fois "rejeté les demandes de Sanofi qui visaient, en fonction de l'évolution des connaissances scientifiques, à mentionner dans la notice patient les risques pour le fœtus pouvant être liés à la prescription de ce médicament dans le cadre d'une grossesse". Une mention que Sanofi ne pouvait apposer sans les autorités, dont l'approbation est indispensable pour modifier les informations relatives à un médicament.
La Dépakine et ses dérivés ont provoqué depuis 1967 des malformations congénitales graves chez 2.150 à 4.100 enfants, selon une évaluation de 2017 de l'agence du médicament et de l'Assurance maladie. En prenant en compte les enfants souffrant de retard de développement (troubles autistiques, psychomoteurs, etc.), il pourrait y avoir 14.000 victimes, selon l'épidémiologiste Catherine Hill. L’an dernier, la ministre de la Santé Agnès Buzyn a déclaré à plusieurs reprises que l'Etat allait solliciter Sanofi pour contribuer à indemniser les victimes.
"L'Oniam a retenu la responsabilité de Sanofi à hauteur de 70%"
"Cette position du laboratoire était prévisible mais néanmoins scandaleuse. Contrairement à ce qu'affirme Sanofi, les procédures judiciaires et l'Oniam convergent pour retenir la responsabilité du laboratoire", a réagi Me Charles Joseph-Oudin, avocat de l'Apesac, l’association des victimes de la Dépakine. Dans ses premiers avis d'indemnisation, "l'Oniam a retenu la responsabilité de l'Etat à hauteur de 30% et celle de Sanofi à hauteur de 70%", a-t-il ajouté.
Mais le refus de Sanofi de payer ne va pas bloquer la prise en charge des victimes par l'Oniam. Celui-ci pourra en effet saisir la justice pour forcer la main au laboratoire. Parallèlement aux sollicitations de l'Oniam, Sanofi fait face à plusieurs demandes d'indemnisation au civil de la part de familles de victimes. Dans l'une de ces procédures devant la cour d'appel d'Orléans fin 2017, le groupe a été condamné à verser près de 3 millions d'euros aux parties civiles. Sanofi s'est pourvu en cassation.
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