Dépakine : les petits-enfants touchés eux aussi ?
"Au bout du 149e cas, je me suis dit qu’il y avait trop de malchance pour que ce soit un hasard", relate Marine Martin, présidente de l’association des victimes de la Dépakine (Apesac). Depuis 2014, la lanceuse d’alerte a constaté certains troubles majeurs chez de nombreux enfants de victimes de la Dépakine. "Notamment de l’hyperactivité, des troubles de la vision, des troubles ORL, des troubles d’acquisition de la coordination, des spina bifida, des scolioses, de l’hyperlaxité…" énumère Marine Martin. Aucun lien de cause à effet n’a été établi pour l'instant, mais aucune étude n’est en cours sur le sujet. "Je rencontre de jeunes couples qui se demandent s’ils peuvent faire des enfants, et il est urgent que l’on puisse leur répondre !" alerte Marine Martin.
"Puisqu’il y a suspicion, il faut faire une étude"
Selon l’épidémiologiste Catherine Hill, qui avait fourni la première estimation des victimes de la Dépakine, un "effet transgénérationnel" du médicament est néanmoins "assez improbable". Ce ne serait donc plus l’effet direct de la Dépakine qui serait en cause, mais des modifications du patrimoine génétique qu’elle impliquerait. Pour Catherine Hill cependant, la question se pose : "Puisqu’il y a suspicion, il faut faire une étude." Comme l’explique Marine Martin en effet, en l’absence d’informations sur le sujet, deux problèmes majeurs se posent. Si les enfants de deuxième génération sont reconnus comme victimes, cela doit être pris en compte dans la reconnaissance du préjudice d'anxiété de leurs parents. Ces enfants doivent également bénéficier d'une indemnisation.
Marine Martin a rencontré la ministre de la Santé Agnès Buzyn le 27 novembre 2017. "J’ai demandé au ministère qu’un chercheur se penche là-dessus. Je voulais savoir dans quelle proportion la deuxième génération était susceptible de développer le même genre de pathologies que la première", indique-t-elle. Mais depuis un an, elle constate que rien n’a été fait. Et, pour l’heure, on ne sait pas combien d’enfants ni de grossesses sont concernés.
Des risques démontrés lors d'une exposition in utero
Une étude publiée le 22 juin dernier par l'Agence du médicament et l'Assurance maladie a montré que les enfants exposés au valproate (le principe actif de la Dépakine) in utero avaient quatre à cinq fois plus de risques que les autres d'être atteints de troubles neuro-développementaux précoces. Ce risque serait par ailleurs 8 à 10 fois plus élevé chez les enfants exposés aux doses les plus fortes. Selon la même étude, le nombre d'enfants touchés est compris entre 16.600 et 30.400. Le valproate est commercialisé depuis 1967 sous la marque Dépakine (et sous des marques génériques) pour traiter l'épilepsie. Depuis 1977, il est aussi utilisé sous le nom de Dépamide (et sous le nom de Dépakote depuis 2000) pour soigner les troubles bipolaires.
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