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Les Pourquoi. Pourquoi la ligne 4 du métro fait-elle un détour en traversant la Seine ?

Philippe Vandel nous parle aujourd'hui d'une véritable prouesse technique et humaine au début du XXe siècle à Paris sous le fleuve La Seine...

Article rédigé par franceinfo, Philippe Vandel
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
La ligne 4 du métro parisien a nécessité des travaux pharaoniques (VISUALSPACE / E+)

C'est l'une des lignes de métro les plus célèbres de Paris

La "4" est la deuxième ligne la plus fréquentée (après la "1", avec plus de 170 millions de voyageurs par an, presque un demi-million par jour !). Car c'est la première qui traverse Paris du nord au sud, et du sud au nord. Elle relie désormais la Porte de Clignancourt à la Mairie de Montrouge. Du sud au nord ? En quoi est-ce important ? Eh bien, c’est qu’elle croise La Seine. Et non pas grâce à un pont : elle passe par en dessous !

Le gigantesque chantier de la "4" a duré cinq ans, de 1905 à 1910

Le plus dur a été de réaliser la jonction entre les portions rive droite et rive gauche. Un casse-tête : comment éviter les infiltrations d’eau alors qu’on creusait sous le fleuve ? Les ingénieurs ont eu l’idée de congeler le sol. Pour le durcir. Au lieu de remuer de la boue, ils perçaient dans la glace ! Un chantier gigantesque : ils ont transformé des surfaces larges comme des terrains de foot en frigo géant.

 Reste un mystère : si vous prenez un plan de métro, vous constatez que la "4" descend d’un trait de la station Gare de l’Est à la station Les Halles, mais ensuite, elle ne rejoint pas tout droit Saint-Germain-des-Prés : elle fait un coude sur la droite, ou plutôt sur l’est, pour s'arrêter à Chatelet, puis Cité, puis Saint-Michel, puis Odéon, puis elle refait un virage à gauche, s’arrête à Saint-Germain, puis elle repart en ligne droite vers Montparnasse.

Pourquoi ce couteux détour ? 

 Il y avait de la roche à cet endroit-là ?  Le sol était trop dur, ou au contraire trop meuble ? Ni l’un, ni l’autre. Il n’est pas question de géologie, mais de politique. C’est que le trajet idéal de la ligne passe par L’Institut de France, construit en 1688, sur ordre de Mazarin. C’est là que s’installera l’Académie française, créée en 1635 par un autre cardinal : Richelieu, où elle siège toujours.

Or, trois siècles plus tard, au moment de la construction du métro, les Académiciens ont refusé de subir les désagréments des travaux. Ils ne voulaient aucun bruit sous la Coupole. Leur poids politique était tel sous la IIIe République que la ligne fera un couteux détour. Résultat : c’est le confort d’une quarantaine de vieux messieurs pendant trois ans il y a un siècle, qui affecte encore des millions de voyageurs aujourd’hui. 

Les Shadocks n’ont rien inventé : pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? 

Jusqu’à preuve du contraire. 

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