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Le vrai du faux. Non, une petite fille de trois ans n'a pas été enlevée à Dunkerque

Antoine Krempf passe au crible un fait repéré dans les médias et sur les réseaux sociaux. Ce mardi, la fausse Alerte enlèvement venue des Etats-Unis.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Capture d'écran facebook d'un compte qui relaie le message.  (CAPTURE D'ECRAN FACEBOOK)

"Une petite fille de trois ans a été enlevée à Dunkerque par un homme conduisant un camion gris (plaque 72 B 381). Fais tourner ce message, ça pourrait sauver des vies et celle de cette petite (source TF1). Si on le fait pas, ça veut dire que l'on ne vaut pas beaucoup mieux que lui."

Voilà donc le message qu'on peut lire des centaines, voire des milliers de fois, depuis quelques jours sur Facebook. 

On va faire simple et court : c'est faux

Aucune Alerte enlèvement n'a été déclenchée à Dunkerque, ni ailleurs. 
Aucune fille de trois ans n'a été enlevée par un homme conduisant un camion gris. Mais ce qui est intéressant, c'est ce que ce message concentre en quelques lignes tous les ressorts qui font que ce genre d'histoire sera toujours massivement partagé :

D'abord parce qu'un enfant est en danger et qui pourrait ne pas être ému et s'en soucier. Ensuite, en donnant le lieu, en l'occurrence Dunkerque, on renforce l'idée du "c'est arrivé près de chez vous" et donc "ça pourrait nous arriver aussi". Il y a également une certaine précision en donnant l'indication du "camion gris" avec un numéro de plaque, on se sent investi d'une mission : retrouver cette petite fille. On est acteur de l'histoire. Le message affiche aussi une source, réputée fiable, en l'occurrence TF1. Enfin, il y a le chantage affectif : si on ne partage pas, c'est qu'on est un peu complice de cet enlèvement. Et le tout enrobé d'un argument d'auto-justification du genre : "je sais pas si c'est vrai, mais en tout cas ça ne peut pas faire de mal".

Voilà donc comment depuis maintenant une dizaine d'années, la même petite fille de trois ans s'est retrouvée dans un camion gris du côté de Saint-Etienne, de Saint-Malo, de Laval, de Saint-Aubin, de Saintes, de Dreux ou encore de Chartres.

D'où vient cette histoire ? 

Il y a un indice pour nous mettre sur la piste. C'est le numéro de la plaque du camion gris : 72 B 381. Visiblement, rien à voir avec une plaque française.

De fait, l'histoire vient des États-Unis nous apprend le site américain Snopes. En mai 2006, une petite Américaine de trois ans, Jewel Strong, est une sur plage en Floride. Elle part se baigner avec sa tante sur un radeau gonflable. Mais l'embarcation chavire. La tante est sauvée in extremis, mais la fillette disparaît. 
Évidemment inconsolable, la famille refuse l'idée d'une noyade et diffuse la photo de sa fille, au cas où quelqu'un la verrait. En 2009, cette photo est reprise et diffusée avec l'histoire inventée du camion gris et d'un numéro de plaque 72 B 381.

Voilà comment, douze ans et demi plus tard, des centaines de personnes, à des milliers de kilomètres, relaient ce message parce qu'ils sont persuadés qu'une petite fille a été enlevée à Dunkerque... et que "ça ne peut pas faire de mal".

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