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Le sens des mots. Influenceur, un anglicisme au service du marketing

Tout l'été sur franceinfo, Marina Cabiten et la sémiologue Mariette Darrigrand s’arrêtent sur les termes qui ont marqué l’actualité de l’année écoulée. Aujourd'hui, le mot influenceur.

Article rédigé par franceinfo, Marina Cabiten
Radio France
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Temps de lecture : 2 min
Les logos d'Instagram et Facebook mis en avant, le 12 mars 2020, lors d'un salon à Ankara (Turquie). (NEVZAT YILDIRIM / ANADOLU AGENCY)

Les réseaux sociaux ont pris beaucoup d’importance dans la sphère médiatique ces dernières années, et avec eux, ce terme assez pompeux de "influenceur".

franceinfo : Mariette Darrigrand, vous êtes sémiologue spécialisée dans l'analyse du discours médiatique et dirigeante du cabinet Des faits et des signes. Un influenceur, c'est une personne dont les comptes sur les réseaux sociaux rassemblent une foule d’abonnés et qui est donc très lue, vue, écoutée quand elle donne son avis. Certains en ont fait leur métier et sont payés pour dire du bien des marques qui les rémunèrent. On appelle ça le marketing d’influence. Le concept vient des Etats-Unis, et le mot "influenceur" aussi.

Mariette Darrigrand : C'est un terme anglosaxon, “influenceur” est la transposition directe de l’américain "influencer", qui a essaimé dans le monde entier. Au point de finalement entrer dans les colonnes du Petit Larousse cette année même en mai dernier. Et l’influenceur ne va pas sans ses influencés, on parle de “followers”. Là aussi on a importé le mot américain et celui-ci n’est pas dans notre dictionnaire.

Rihanna en a plus que Donald Trump, des followers… Car il faut bien le dire, le plus souvent, les influenceurs parlent peu de politique, et beaucoup d’esthétique.

L’actualité la plus contemporaine rejoint là la plus ancestrale, car l’influence concerne le corps. Dans la médecine des humeurs, c’est-à-dire la médecine traditionnelle depuis Hippocrate jusqu'au 17e siècle, où le corps est vu comme une circulation de flux, on pouvait dire par exemple que le foie influençait le cerveau, cela voulait dire que le flot du sang pesait sur les organes. En latin, influere veut dire couler, laisser passer la force de l’eau,  le cours d’une rivière.

On retrouve cette racine dans affluent, confluent, tout ce qui évoque le flot… Et c’est intéressant parce qu’internet, où agissent les influenceurs, est un gigantesque flot d’information et d’image. Ceci dit, on retrouve un peu des influenceurs dans la philosophie des Lumières, au 18e siècle. 

Les philosophes des Lumières voulaient influer sur le cours des choses, c’est-à-dire imposer la démocratie, les droits de l’Homme. Avec ce pouvoir de faire peser sur les autres, comme une vague, la force de leur parole. Les influenceurs, sur des sujets plus frivoles, font la même chose. 

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