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Olivier Guez : "Le football est un miroir exceptionnel de nos sociétés"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd'hui, l’écrivain et essayiste Olivier Guez.

Article rédigé par franceinfo - Elodie Suigo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Olivier Guez, journaliste, essayiste et écrivain français.  (AITOR PEREIRA / EFE)

Écrivain, auteur de romans et d'essais, Olivier Guez a reçu le prix Renaudot pour son livre La Disparition de Josef Mengele (2017). Aujourd'hui, il publie Une Passion absurde et dévorante. Ecrits sur le football, aux éditions de l'Observatoire.

franceinfo : Ces écrits sont diamétralement opposés à vos travaux précédents. Peut-on parler d'une parenthèse, d'une pensée philosophique aussi ? Car finalement, on se rend compte à quel point le football a des répercussions sur notre histoire, ou plutôt que notre histoire a des répercussions sur le football.

Olivier Guez : Un peu tout ça. C'est très agréable pendant deux heures, de ne penser qu'au match auquel vous assistez ou que vous regardez à la télévision. Il y a un grand repos, un enthousiasme, de l'intérêt, mais surtout, l'idée finalement de tout lâcher pendant la durée d'une partie. Et ça fait un bien fou.

Le football s'est très vite retrouvé dans votre vie.

Je pense que le football m'a permis de 'rêver plus grand' pour reprendre un slogan footballistique. Voilà, on est un petit gamin, on appartient à sa famille, dans une petite communauté, une ville de taille moyenne, en l'occurrence Strasbourg en ce qui me concerne et puis, tout d'un coup, vous vous sentez en connexion avec le reste de l'humanité. Vous sentez qu'en fait, c'est un évènement qui est partagé par des milliards d'individus dans tous les coins du monde.

Votre père était gynécologue, votre maman pédiatre. Rien à voir avec le football ! C'est votre papa qui vous accompagne pour la première fois en 1982 voir un match au stade d'à côté : Strasbourg - Auxerre.

C'est ça, absolument. Là aussi, je pense que l'amateur de football se souvient de son père, de l'homme ou de la femme qui l'accompagne, enfant, au stade. C'est une première expérience presque mystique, en tout cas pour l'amateur de football.

Ce qui est intéressant à travers cet ouvrage, vraiment passionnant, c'est que vous nous prenez par la main et vous nous racontez l'histoire du football et plus exactement, d'où il vient. Est-il toujours autant accessible ?

Le football est un jeu simplissime, donc n'importe qui peut jouer avec n'importe quelle sphère, sur n'importe quel terrain du monde

Olivier Guez

à franceinfo

Le football a énormément évolué. Si on s'intéresse à la mondialisation, à comment elle fonctionne, il faut s'intéresser au football. Ça raconte tout. Les écarts de salaires, les gros, les petits, les gros, de plus en plus gros, les petits de plus en plus petits, les migrations, les modes capillaires, tout, tout, tout. Le football est un miroir exceptionnel de nos sociétés.

Dans cet ouvrage, vous racontez l'histoire et l'arrivée de toutes les classes sociales dans le football. Ce n'était pas évident au début, notamment du côté du Brésil, de l'Uruguay, de l'Argentine. Certains joueurs très doués étaient obligés de se mettre de la poudre de riz sur le visage ou de se lisser les cheveux pour cacher leurs origines.

Tout à fait. Alors ça, c'est au tout début au Brésil. L'esclavage est aboli très tard au Brésil, à la fin du 19ème siècle, plus ou moins à la même époque que l'introduction du football par les Anglais. Et donc, les Blancs ne veulent pas être associés aux joueurs de couleur qui, effectivement, sont obligés de se travestir quelque part. Et puis après, le Brésil va changer d'identité, va commencer à accepter cette espèce d'identité arc-en-ciel et les Noirs ou les mulâtres vont devenir parmi les emblèmes du foot brésilien, en adaptant sur un terrain de football des gestes de la capoeira, qui était un sport d'esclaves au départ venu d'Angola.

Ce livre est aussi un regard sur la liberté, sur cette valeur qui vous est très importante et vous suit depuis votre enfance.

Pour moi, elle est sacrée. Je la cherche par une indépendance la plus grande possible dans ce que je fais, les voyages bien évidemment, mes écrits et surtout de ne pas être enfermé dans une case.

Votre premier ouvrage était en collaboration avec Frédéric Encel La grande alliance et pour votre roman biographique La disparition de Josef Mengele, vous vous êtes documenté pendant trois ans.

J'ai voulu comprendre comment des individus, une société, un pays, un continent avaient pu se remettre de la déflagration de ce suicide en Europe entre 1914 et 1945. Pour moi, c'était indispensable de le faire. Je considère vraiment être un enfant de l'Europe.

Olivier Guez

à franceinfo

C'est plus que trois ans. En gros, c'est un cycle. Il y a un premier livre qui s'appelle L'impossible retour sur l'histoire des juifs en Allemagne depuis 1945. Il y a un film qui s'appelle Fritz Bauer, un héros allemand, l'histoire d'une victime qui cherche à rétablir la justice, à confronter les Allemands à leur passé. Et puis, il y a ce livre qui complète le triptyque La disparition de Josef Mengele.

J'ai été élevé dans plusieurs cultures française, allemande, alsacienne, méditerranéenne, juive, d'Afrique du Nord aussi. Donc, pour moi, tout ça est un ensemble et j'ai vraiment voulu l'explorer, et en commençant vraiment par cette idée de l'Après-guerre en Europe.

Que représente ce prix Renaudot ?

Le prix Renaudot est un super passeport, c'était une reconnaissance

Olivier Guez

à franceinfo

J'en ai été très heureux et ça m'a permis de présenter le livre au Japon, en Chine, toute l'Amérique du Sud, un peu partout en Europe. Ça a été des années exceptionnelles.

Pour terminer, vous allez suivre l'équipe de France et cet Euro.

Je suis toutes les équipes de l'Euro et en particulier l'équipe de France. Moi, je me réjouis énormément, justement, de retrouver cette grande fête du football international.

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