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Nadine Labaki : "Je n'ai pas de prochain projet, je n’arrive pas à tourner la page !"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo et se confie. Aujourd'hui, la réalisatrice libanaise Nadine Labaki.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Nadine Labaki lors du Festival international du film de Marrakech, le 7 décembre 2018 (FADEL SENNA / AFP)

C’est l’histoire d’un enfant de dix ans qui porte plainte contre ses parents pour l’avoir mis au monde alors qu’il n’avaient pas l’argent pour l’élever dignement, ni pour lui apporter l’essentiel c’est-à-dire l’amour. Cette histoire, c’est le dernier film de Nadine Labaki, Capharnaüm.

Tout est vrai dans ce film notamment la justesse des comédiens, qui n’avaient jamais tourné auparavant. Un film récompensé par le Prix du Jury au Festival de Cannes, époustouflant d’humanité, qui force le respect de par la dignité qu’il dégage et génère.

A travers ce film, Nadine Labaki se dévoile, elle et ce qui la constitue : "Il m'a changé la vie, il m’a changée physiquement et moralement, de tous les points de vue."

Pour trouver ses jeunes acteurs, Nadine Labaki est allée à la recherche d’enfants au parcours proche de ses personnages en arpentant les rues de Beyrouth. Toutes et tous ont été recrutés dans la rue, dans des camps de réfugiés, de migrants aussi. Comme le petit Zain. Nadine Labaki est tombée littéralement sous le charme de ce garçon syrien âgé de 12 ans, réfugié au Liban, qui joue le rôle principal. Grâce au succès de Capharnaüm, Zain Al Rafaeea est aujourd’hui un enfant libre et heureux. "C’était un vrai coup de projecteur, une caisse de résonance pour la voix de ses enfants qui devient de plus en plus énorme et c’était ça le plus important pour moi, c’était cette victoire-là que je voulais . A Cannes, à chaque fois qu’ils braquaient la caméra sur Zain, les gens applaudissaient, il était enfin cet enfant reconnu. Maintenant Zain c’est retrouvé en Norvège avec toute sa famille, il a été pour la première fois de sa vie à l ‘école il y a un mois, cet enfant retrouve son enfance en quelque sorte. Zain m’a dit 'Regarde, voilà j’ai un lit'. Zain jusqu'à maintenant a dormi par terre, c’était presque un conte de fée. C’est incroyable !"

Quand on connaît le parcours de Nadine Labaki ainsi que sa vie, son vécu, on décèle rapidement qu’il y a beaucoup d’elle dans ce film. Interrogée sur son enfance, elle ne se dérobe pas "J’ai vécu une enfance gâtée par mes parents, aimée, mais j’ai aussi vécu la guerre civile enfant, j’ai passé beaucoup de temps dans les abris, beaucoup de temps derrière les sacs de sable, j’ai connu aussi beaucoup d’amour, beaucoup de protection, c’était très contradictoire, cette espèce de jeu tout le temps avec la mort "

J’ai vécu un autre genre de combat quotidien avec la guerre, le sentiment de ne pas savoir ce qui va se passer

Nadine Labaki

à franceinfo

Nadine Labaki, c’est la même réalisatrice qui en 2004, nous avait offert le film Caramel, qui aujourd'hui est le plus grand succès international du cinéma libanais. Avec ce dernier long métrage elle avoue ne pas être sortie indemne. "Ce n’était pas un film, c’était une plongée dans la vie de ces gens, de ces communautés, des gens complètement marginalisés qui souffrent beaucoup, qui sont dans un cercle vicieux dont ils n’arrivent pas à sortir parce que ce sont des invisibles finalement dans la société."

Pendant le tournage le bruit de fond, c’était les cris et les pleurs des enfants. On me dit aujourd’hui 'Alors quel est votre prochain projet ? je n’ai pas de prochain projet, J’arrive à peine à sortir de celui-là, je n’arrive pas à tourner la page

Nadine Labaki

France Info

Une première pour une réalisatrice arabe, Capharnaüm est dans la liste des films pré-sélectionnés pour l’Oscar du meilleur film étranger. Le film est également nommé aux Golden Globes du meilleur film étranger.

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