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Les médias en ont-ils trop fait avec le FN ?

C’est la polémique qui monte, à deux jours du vote en France aux européennes.
Article rédigé par Jean-François Achilli
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
  (© RF)

L'accusation pourrait éclater dès dimanche soir sur les plateaux radio et télé, quand les leaders politiques viendront commenter l’hypothétique première place du FN, si les prédictions des instituts de sondages se confirment. Ce n’est pas fait ! Regardez ce qui se passe aux Pays-Bas…

Jean-Christophe Cambadélis, le premier secrétaire du PS, s’interroge : les médias ont joué le FN gagnant pendant deux mois. Sommes-nous dans une prophétie autoréalisatrice ?

Alain Lamassoure est plus catégorique : « on souffre beaucoup avec ce Front National superstar invité partout », avoue la tête de liste UMP en Île-de-France pour qui le matraquage à la une des journaux d’une victoire avant l’heure des Eurosceptiques de tous bords a fait des dégâts dans l’opinion. Comme si nous avions désigné le vainqueur avant. 

Jean-Luc Mélenchon sur son blog met déjà en garde les « médiacrates » coupables à ses yeux d’avoir « dédiabolisé sans réserve Marine Le Pen et son parti »,  et d’être restés sans réaction quand Jean-Marie le Pen, en meeting avec sa fille à Marseille mardi, a affirmé que le virus Ebola pourrait « régler en trois mois l’explosion démographique dans le monde ». Il fut un temps où cela aurait fait des vagues.

Le FN a-t-il été plus souvent invité que les autres ?

Pas à France Info ! Mais chacun va devoir balayer devant sa porte. La critique remonte aux municipales, quand le CSA a rappelé à l’ordre certaines chaînes qui auraient fait la part trop belle au Front National. Le paradoxe est que Jean-Marie le Pen a toujours accusé les médias de ne jamais lui donner la parole. Sa fille Marine se gardera bien de nous faire le même reproche : pas une semaine sans que la présidente du FN, Florian Philippot ou Louis Alliot ne fassent la tournée des plateaux radio-télé pour dire tout le mal qu’ils pensent d’une Europe qu’ils combattent tout en briguant de bien confortables places d’eurodéputés. Le FN doit-il être traité comme eurosceptique ou europhobe ? Il y a sans doute une confusion des genres qu’il faudra régler un jour.

Marine le Pen aura été sur un boulevard ?

Pas vraiment : la présidente du Front National a dû affronter ses adversaires politiques dans des duels à la régulière, avec des hauts et des bas. Et puis en cas de victoire dimanche, ces Européennes ne feront pas du FN le premier parti de France, même si le tripartisme s’installe. Tout change si vite en politique. Les 16% de Dany Cohn-Bendit au européennes de 2009 ne sont plus qu’un souvenir pour EELV. Et la contreperformance du PS cette année-là n’a pas empêché un socialiste de remporter la présidentielle. Il va en couler de l’eau sous les ponts d’ici à 2017.

Au final, nous en avons trop fait ?

Non : la poussée du FN est bien réelle au sein de l’opinion. Et les médias, qui pointent toujours ce qui est hors norme, ont bon dos : les politiques sont leurs propres fossoyeurs et doivent s’interroger sur les échecs qui les ont éloignés de l’opinion. Cette rupture avec le réel qui va produire une abstention record et priver les partis traditionnels d’une grande partie de ses électeurs.

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