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Au Soudan du sud, le président accuse ses ministres...de vol

Le plus jeune Etat du monde est gangréné par la corruption. Son président, Salva Kiir, s'y attaque
Article rédigé par Jean Leymarie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Franceinfo (Franceinfo)

Imaginez un président français, François Hollande ou Nicolas Sarkozy, qui écrit à ses ministres pour les accuser de vol et pour leur demander de rendre l'argent.

C'est ce que vient de faire Salva Kiir, le dirigeant de ce jeune Etat, le Soudan du sud, qui est indépendant depuis l'été dernier. Il adresse une lettre ouverte à 75 responsables, des ministres ou d'anciens ministres. Il leur demande de rembourser quatre milliards de dollars, c'est-à-dire 3 milliards 200 millions d'euros.

La somme s'est évaporée en quelques mois seulement. Le président sait où est passé l'argent. Il le dit, dans sa lettre ouverte : "La plupart de ces fonds publics ont été sortis du pays et déposés sur des comptes étrangers. Je vous écris pour vous encourager à rendre ces fonds volés, entièrement ou au moins partiellement".

Le chef de l'Etat est en colère, car il n'a pas oublié l'histoire de son pays. L'indépendance était un immense espoir. Après des années de conflit avec le nord, la population voulait vivre une nouvelle ère : "nous nous sommes battus pour la justice, la liberté et l'égalité".

Le résultat est maigre. Le conflit a laissé des traces. Les deux capitales, Khartoum, au nord et Juba, au sud , se disputent plusieurs territoires. Des groupes rebelles circulent des deux côtés. Et puis surtout, donc, la corruption est généralisée. L'inflation galope. Le pays est un des plus pauvres du monde.

Pourtant, le Soudan du sud possède de grandes réserves pétrolières. Mais il ne peut pas les exploiter, parce que si les réserves sont au sud, les infrastructures, elles, sont au nord. Les deux frères ennemis sont donc condamnés à s'entendre. Ils n'y arrivent pas. D'ailleurs, le sud a stoppé sa production de pétrole quand le nord a menacé d'en prélever une partie.

Voilà pourquoi le président Kiir n'a plus le choix. Il attaque son propre gouvernement. Il doit faire le ménage chez lui. La commission anti-corruption a déjà récupéré 60 millions de dollars, sur les quatre milliards qui ont été volés. Pour retrouver le reste de l'argent, le Soudan du sud a ouvert un compte au Kenya. Si les ministres corrompus, ou leurs associés, ont des remords, ils pourront verser sur ce compte les centaines de millions qu'ils ont dérobés.

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