Longtemps, la France s'est méfiéede ses villes . Paris, en particulier, a toujours fait peur à l'Etat. N'est-cepas de là que sont parties la plupart des révolutions, que ce soit en 1789, en1848, ou même sous la Fronde? Pas question, dans ces conditions, de donner tropde pouvoirs à cette capitale si difficile à contrôler et, de manière générale,à toutes les grandes villes. Et c'est ainsi que les gouvernements, quelle quesoit leur orientation politique, ont toujours préféré s'appuyer sur lescampagnes et maintenir une myriade de petites communes. Diviser pour mieux régner : la recette n'est pas nouvelle, ellen'en est pas moins efficace.C'est dire si la volonté affichéede François Hollande de créer en France de puissantes métropoles, comme il enest question avec la réforme de la décentralisation -dont le texte va bientôtêtre examiné par le Conseil d'Etat-, créerait une rupture dans notre histoire.Cette nouvelle orientation s'expliqueau moins par deux raisons . La première, c'est qu'à l'échelle européenne, lesvilles françaises ne font pas le poids. Bien sûr, avec Paris, la France disposede l'une des deux agglomérations dominantes du Vieux Continent, l'autre étantLondres. Mais derrière, c'est le désert, ou presque. L'hyper-centralisation denotre pays a relégué loin, très loin, Lyon, Marseille, Lille, Toulouse, Nice,Bordeaux et les autres. Des villes qui ne manquent pas d'atouts, certes, maisqui restent largement distancées par Munich, Milan ou Barcelone.La seconde raison, la plus importante sans doute, estqu'à l'époque moderne, le développement économique repose de plus en plus surla connaissance . Or, c'est dans les grandes villes que se concentrent larecherche, l'enseignement supérieur, l'innovation et les grandes entreprises.60% du PIB français provient d'une douzaine d'agglomérations seulement . C'estce que l'on appelle la " métropolisation ". Cela ne veut pas dire qu'il faut sedésintéresser du reste du pays, mais c'est bien dans les grandes villes que setrouve notre principal réservoir de croissance pour les années qui viennent.C'est pourquoi le gouvernement prévoit de confier auxgrandes villes de nouvelles compétences . Mais cela n'ira pas de soi, il faut lesavoir, car leur montée en puissance inquiète et les élus des départements etsurtout les maires, qui craignent d'être dépossédés de leur pouvoir au profitde structures qui, c'est vrai, peuvent paraître lointaines et technocratiques.La réussite desmétropoles n'est donc pas seulement un enjeu pour leurs habitants. C'est unepartie de l'avenir du pays tout entier qui se joue.