Des États africains bientôt partenaires de TV5Monde

Le journaliste et producteur Yves Bigot est le PDG de la chaine TV5 Monde depuis 2012. Le 2 janvier, la chaîne de la francophonie fêtera ses 40 ans. Fondée en 1984, TV5 Monde avait pour objectif de promouvoir les programmes francophones dans le monde. À l’époque son déploiement est très modeste avec trois pays : la France, la Confédération suisse et la Communauté française de Belgique. Rejointe par le Canada, des pays africains et très récemment par la Principauté monégasque, dorénavant, elle est présente dans 198 pays, 432 millions de foyers à travers le monde et s’empare de la lutte contre le réchauffement climatique dans une nouvelle journée spéciale mardi 12 décembre 2023 : la piste de la francophonie pour la planète. Soit 19 heures de programmes avec un dispositif déployé dans 17 villes du monde, sur cinq continents en faveur de la protection de l'environnement et qui aborde concrètement les problématiques auxquelles sont confrontés les citoyens et les réponses que localement ils y apportent.  

franceinfo : En ce moment, se déroule une grande émission pour alerter sur le réchauffement climatique et vous vous engagez dans ce combat pour la planète. C'est un dispositif XXL qui est inédit pour votre chaîne ? 

Yves Bigot : C'est la troisième fois que l'on fait ça. La première fois, c'était en 2017, on avait fait le tour du monde de la francophonie pour voir l'état de la langue française sur chaque fuseau horaire. Et puis, en 2019, on avait fait une première piste de la francophonie pour qu'on puisse exposer dans toutes les capitales francophones la diversité de nos cultures respectives. 

Le climat est un sujet qui préoccupe vraiment tous les pays, y compris les plus pauvres ? 

Oui, bien sûr, parce que tout le monde, même "À la vie, à la terre", l'émission que présente Chloé Nabédian était récemment chez les autochtones, dans le nord du Congo, dans la forêt primaire, et eux subissent et voient au quotidien changer leur écosystème, leur vie quotidienne. Les fruits qu'ils mangeaient ne poussent plus, il n'y a plus de poissons dans la rivière. 

Il y a des conséquences très concrètes pour eux. 

Oui, bien sûr et parfois, ils trouvent des solutions ancestrales que nous, nous avons oubliées ou que nous ne connaissons pas sous nos latitudes. 

Revenons aux origines de TV5 Monde. En 1984, quelles étaient les intentions et les ambitions des fondateurs ? 

C'était de promouvoir les programmes francophones dans le monde. C'étaient trois heures de programmes tous les soirs, de 19 h à 22 h, disponibles dans quatre villes des Pays-Bas, deux de Wallonie, Liège et Verviers, la zone militaire de Berlin-Ouest, l'hôtel Hayat de Casablanca. La ville de Biarritz et l'hôtel Méridien Porte Maillot à Paris. 

Le Canada et l'Afrique sont arrivés bien après.

Le Canada et le Québec nous ont rejoints deux ans plus tard. Et il y a deux ans seulement soit 36 ans plus tard, c'est la Principauté de Monaco qui nous a rejoint dans notre gouvernance et notre financement. 

Est-ce bien de s'allier avec une principauté comme celle de Monaco ? 

Bien sûr. Et puis surtout, ça montre l'attractivité de la chaîne. Aujourd'hui, ça nous donne un élan pour envisager d'associer d'autres États à TV5 Monde pour l'avenir. Par exemple, j'ai reçu mandat à Montréal pour notre conférence ministérielle annuelle vendredi dernier, de pouvoir commencer à discuter avec des États africains pour voir de quelle manière ils pourraient s'associer et rejoindre TV5 Monde.

"C'est nécessaire de partager la francophonie, avec les États du Sud. On ne peut plus, en 2023, 2024, être simplement les francophones du Nord qui parlons à ceux du monde entier."

Yves Bigot, PDG de la chaine TV5 Monde

à franceinfo

On connaît le contexte international, notamment en Afrique de l'Ouest, où la France est plutôt rejetée et de voir que TV5 Monde peut être accueilli là-bas, que vous pourriez vous allier avec des États africains, c'est tout un symbole.

 Nous sommes toujours diffusés au Mali, au Burkina Faso, en Guinée, au Niger. Notamment parce que nous ne sommes pas que Français. Nous sommes Français, mais nous sommes aussi belges, suisses, canadiens, québécois, monégasques et on est aussi l'opérateur audiovisuel de l'Organisation internationale de la Francophonie, qui compte 88 États dont la petite trentaine d' États africains francophones. 

TV5 Monde, ce sont des films, des documentaires, des émissions qui vous sont propres, mais vous donnez aussi une seconde vie à des programmes des chaînes partenaires. Ça, c'est encore utile à l'heure du Replay, parce qu'on peut voir tous ces programmes sur les plateformes de France Télévisions etc. Mais à quoi cela sert-il qu'ils soient sur TV5 Monde ? 

Nous avons les droits monde alors que les plateformes sont nationales. Nous sommes présents absolument partout. On est en Chine, en Corée du Nord. Il n'y a pas un seul pays au monde où nous ne sommes pas reçus, à l'exception de la Malaisie qui considère que nous sommes une chaîne érotique parce qu'on diffuse des films français, belges, canadiens dans lesquels on voit parfois de la nudité, des scènes de sexe. 

Dans quel pays TV5 Monde est le plus regardé ? 

La République démocratique du Congo avec 30 millions de téléspectateurs pour nous là-bas, c'est le plus peuplé des pays francophones au monde. Il y a donc une logique. 

Dans quel pays, sentez-vous qu'il y a un engouement particulier pour la langue française ? 

En Chine et en Inde, qui est un des dix pays au monde où on est le plus regardé, grâce au sous-titrage en anglais. Beaucoup de nos téléspectateurs sont, non pas des francophones, mais des francophiles qui s'intéressent à l'art de vivre, au cinéma, à une information différente parfois de celle qu'ils reçoivent. 

Et qui apprennent peut-être le français en regardant TV5 Monde. 

Absolument. 

TV5 Monde a une mission très importante d'apprentissage et d'enseignement du français.
Est-ce que la langue française est menacée ? 

Pas du tout. Elle progresse. Vous savez, elle a survécu à bien d'autres et puis, il y a un engouement formidable pour le français partout dans le monde, et le français sera notamment porté par la formidable démographie africaine. 

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