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En Hongrie, 80% des médias aux mains de proches du pouvoir

Dans la vidéo filmée à son insu et qui a provoqué sa chute, le vice-chancelier autrichien d'extrême droite Heinz-Christian Strache confie qu'il rêve de s'acheter le journal le plus puissant d'Autriche, comme Viktor Orban l'a fait en Hongrie.

Article rédigé par franceinfo, Florence La Bruyère
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
En Hongrie, des affiches disent que le milliardaire américain G.Soros et le président de la Commission Européenne J-C.Juncker complotent pour faire venir des migrants en Hongrie. (ERIC BIEGALA / RADIO FRANCE)

Samedi 18 mai, des journaux allemands ont révélé une vidéo, tournée en caméra cachée dans une villa à Ibiza en 2017. On y voit Heinz-Christian Strache, l'homme fort du parti d'extrême droite autrichien, expliquer à une femme (qui se présente comme étant la nièce d'un oligarque russe) comment financer de manière obscure son parti, le FPÖ, et comment racheter le média le plus puissant d'Autriche, le Kronen Zeitung.

Dis-lui que si elle rachète le Kronen Zeitung trois semaines avant les élections et nous propulse à la première place, nous sommes ouverts à toutes les discussions (...) Elle aura tous les contrats publics remportés aujourd'hui par Strabag.

Heinz-Christian Strache

extrait de la vidéo tournée en caméra cachée

Contrôler les médias. Ce rêve, le Premier ministre hongrois Viktor Orban l’a réalisé. Dès son retour au pouvoir en 2010, l’homme fort de Budapest a transformé la télévision publique en une machine de propagande. Le jour où le scandale a éclaté en Autriche, la 1ère chaîne publique hongroise a débuté son journal télévisé par des interventions du ministre hongrois des Affaires étrangères, et de Viktor Orban, qui ont tous les deux longuement parlé de la menace migratoire. Le journal a ensuite annoncé la chute de la coalition autrichienne, causée selon lui, par des forces souhaitant affaiblir les partis anti-immigration. Mais pas un mot sur le contenu de la fameuse vidéo.

Viktor Orban possède près de 500 médias

En Hongrie, existe-t-il encore une presse libre, notamment à travers les médias privés ? Oui, mais Orban les rachète un par un via des oligarques qui lui sont proches. Aujourd’hui, le clan du Premier ministre est à la tête d’un véritable empire : une grande chaîne commerciale, toute la presse quotidienne régionale, des sites Internet…. Au total, près de 500 médias. Ce conglomérat couvrirait près de 80% du paysage médiatique (selon l’observatoire indépendant des médias Mértek). 

Un quotidien proche du pouvoir a récemment accusé la Commission européenne de critiquer les mesures prises par le gouvernement Orban pour aider les Hongrois qui veulent fonder une famille. Malgré le démenti de Bruxelles, la fausse nouvelle a été reprise par de nombreuses publications.

On peut dire que c'est un empire. Lorsque l'une des publications publie une 'fake news', tous les médias répètent les mêmes mensonges.

Mercédès Gyükeri, journaliste hongroise

à franceinfo

Mercédès Gyükeri travaille pour le Heti Vilag Gazdasag (L'Actualité économique de la semaine, en français), un hebdomadaire économique tout à fait professionnel et indépendant tiré à 30 000 exemplaires. Il en reste encore une poignée en Hongrie. Mais ils ne font pas le poids face à ce qu’il faut bien appeler un empire de fake news, la télévision. Or, les Hongrois passent en moyenne plus de 4 heures par jour (4,7 heures) devant le petit écran. C’est le deuxième pays d’Europe centrale où l’on regarde le plus la télévision, selon l’observatoire des médias Mértek. 

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