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En Espagne, un logiciel d’intelligence artificielle capable de dépister toutes les contre-vérités contenues dans les dépôts de plaintes

C'est notamment en analysant les mots utilisĂ©s par les plaignants que le logiciel est capable de dĂ©tecter les dĂ©clarations suspectes. 

Article rédigé par franceinfo, Mathieu de Taillac
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3 min
Des policiers et des véhicules de police espagnols à Madrid (Espagne). (OSCAR DEL POZO / AFP)

Depuis octobre dernier, la Police nationale espagnole a adopté  "VeriPol", un logiciel d’intelligence artificielle capable de dépister toutes les contre-vérités contenues dans les dépôts de plaintes. "VeriPol" est utilisé uniquement pour les vols à la tire et les vols avec violence. Pour ce type de plaintes il y a beaucoup de fausses déclarations. En Espagne autant qu’en France, ce sont bien souvent des tentatives d’escroqueries à l’assurance, notamment pour les vols de smartphones. C’est pour cela que cet outil est précieux.

Comment ça marche ?

Quand la personne venue porter plainte explique l’épisode du vol, le policier prend tout en note sur son ordinateur, puis le texte est transmis au programme. Ce dernier va analyser les mots utilisés, la longueur du texte, la précision du récit et établir un diagnostic : la déposition est probablement vraie à 72% ou sûrement fausse à 98%. En gros, plus c’est vague, plus c’est louche. Plus c’est court, plus c’est suspect. Et certains mots sont particulièrement auscultés par le programme. 

Les mots utilisés par des menteurs

Le mot "jour" par exemple. Quelqu’un qui invente un vol aura tendance à dire qu’il a eu lieu "l’autre jour", ou "il y a quelques jours", alors que quelqu’un de sincère va vous dire "hier", ou "vendredi dernier".

Les négations aussi sont suspectes, comme "je n’ai rien vu" ou "je ne me rappelle pas bien". Dans le même genre, les vols inventés se passent toujours "par derrière" ou "dans mon dos". Et les voleurs imaginaires portent souvent un casque, ce qui évite d’avoir à les décrire, et allez savoir pourquoi, sont souvent vêtus de noir. 

"VeriPol" est une création interne

Il s’agit d’un inspecteur de Police, Miguel Camacho, mathématicien et statisticien de formation, qui est parti faire un doctorat en police prédictive aux États-Unis. À son retour en Espagne, Camacho se dit que l’intelligence artificielle pourrait aider ses collègues à séparer le vrai du faux. Il a réuni deux informaticiens et un autre mathématicien, son frère. Et tous les quatre se sont mis à éplucher un peu plus de 1 000 plaintes, la moitié vraies et l’autre moitié fausses, et à partir de là ils ont élaboré leur programme.

Trois à sept fois plus de fausses déclarations détectées

"VeriPol" a raison dans 90% des cas, contre 75% pour un policier expérimenté. Dans les deux premiers commissariats où a été adopté le détecteur, Murcie et Malaga, les policiers ont détecté, puis vérifié, 25 et 39 fausses déclarations en une semaine, respectivement. C’est trois fois plus dans un cas, sept fois plus dans l’autre, qu’avant l’adoption du programme. Programme qui intéresse d’autres polices. Interpol, rien de moins, aurait demandé quelques informations sur le sujet. Rappelons au passage qu’en France comme en Espagne les fausses déclarations sont passibles d’amendes et de peines de prison.

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