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En direct du monde. Le gouvernement turc recule sur un projet de loi controversé sur les agressions sexuelles sur mineur

Le gouvernement turc a retiré mardi un projet de loi controversé qui prévoyait la suspension des condamnations de certains auteurs d'agressions sexuelles sur mineur qui épouseraient leur victime. Le texte avait suscité un tollé dans le pays.

Article rédigé par franceinfo, Alexis Morel, Alexandre Billette
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Manifestation à Ankara en Turquie contre le projet de loi prévoyant l'annulation d'une condamnation pour agression sexuelle sur mineur si l'agresseur épouse sa victime, le  19 novembre 2016. (ADEM ALTAN / AFP)

Le gouvernement turc a fait marche arrière sur le projet de loi contesté qui prévoyait dans certains cas la suspension des accusations d’agression sexuelle lorsque le coupable mariait sa victime. Devant le tollé suscité par la mesure, le Premier ministre a annoncé mardi 22 novembre que la proposition de loi serait non pas annulée, mais entièrement révisée.

Un projet de loi pour protéger les familles issues des mariages précoces, selon le pouvoir 

Ce projet de loi, qui avait été soumis par des parlementaires de l’AKP, le parti au pouvoir, prévoyait que dans certains cas, les coupables d’agressions sexuelles commises avant le vendredi 11 novembre pourraient voir leur condamnation suspendue. Le pouvoir turc justifiait la mesure en évoquant les mariages soi-disant consentis entre personnes majeures et mineures qui sont encore fréquents, notamment dans les régions rurales, mais qui sont interdits par la loi.

Selon les rapporteurs, il s’agissait avec cette loi de ne pas punir les époux de ces mariages précoces en emprisonnant les maris et en laissant les jeunes femmes seules avec des enfants à charge. Une mesure qui aurait concerné environ 3 000 personnes, dans les cas où il n’y aurait pas eu de violence ou de menaces exercées. Mais le pouvoir n’a pas convaincu tout le monde, opposition en tête, bien au contraire, surtout lorsque le ministre de la Justice a évoqué "des agressions sexuelles sans contrainte" pour justifier le projet de loi.

Vaste mouvement de colère dans le pays

D’abord sur les réseaux sociaux, ensuite dans les rues avec des manifestations dans les grandes villes vendredi soir, avec un slogan : "Le viol ne peut pas être justifié !". Une pétition a récolté plus d'un million de signatures pour dénoncer ce projet de loi et toute l’opposition a dénoncé la mesure, y compris les ultra-nationalistes en général plutôt souples avec le pouvoir. Les mouvements de défense des droits des femmes se sont également fermement opposés à ce projet qui selon eux  "encourage" les mariages précoces plutôt que de lutter contre cette pratique. Les associations rappellent que les violences sexuelles et les violences contre les femmes ont explosé ces dix dernières années. Depuis 2010, plus de 1 500 femmes ont été tuées souvent par leur conjoint ou leur ex conjoint.

Des dirigeants du parti au pouvoir eux-mêmes gênés par cette initiative

Les parlementaires vont donc devoir revoir leur copie après le tollé suscité et un malaise palpable même au sein de l’AKP. La fille du président Erdogan, qui dirige une association de femmes, a été elle-même critique vis-à-vis du texte et le vice-premier ministre a affirmé lundi 21 novembre que le gouvernement serait à l’écoute des propositions des partis d’opposition. Mais aux yeux de plusieurs Turcs le mal est en quelque sorte déjà fait.

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