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L’équipe Hollande dans les starting-blocks... et le brouillard

Les électeurs et les adversaires du candidat PS ne sont pas les seuls à attendre son projet présidentiel. Ses chefs de pôles, qui planchent sur les grandes thématiques de sa campagne, trépignent aussi. Enquête. 

Article rédigé par Salomé Legrand
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Pierre Moscovici, directeur de campagne de François Hollande, entouré des chefs de pôles thématiques lors de la présentation de l'équipe du candidat socialiste à la présidentielle, le 16 novembre 2011 à Paris. (FRED DUFOUR / AFP )

S’il est une chose que les chefs de pôles thématiques de la campagne de François Hollande maîtrisent tous sans exception, c’est la langue de bois. Ils sont 22, chacun chargé d’être force de proposition pour le programme du candidat PS à la présidentielle dans un domaine en particulier. Mais ils ont aussi pour mission de porter sa bonne parole et d’expliquer ses prises de position aux interlocuteurs du secteur.

Et au premier abord, "tout-va-bien". Côté propositions, les 22 sont à égalité : tous ont remis leur contribution avant le 31 décembre. En revanche, leur deuxième rôle se révèle plus rock 'n' roll. Sollicités de toutes parts, ils ne peuvent griller la priorité au candidat sur les annonces. Certains ne savent même pas quels sont les arbitrages retenus, ni même quand ils seront réalisés. D'autres s'accrochent à ce qu'ils peuvent. Avec en ligne de mire le discours de François Hollande dimanche 22 janvier au Bourget, qui devrait leur fournir quelques indices.

 

• Les chanceux qui ont des pistes

Commençons par Catherine Trautmann, mise à contribution sur la thématique Europe. Elle peut s’appuyer sur les discours et les "cinq propositions" dévoilées par François Hollande au cours de ses déplacements à Bruxelles et Berlin fin 2011. Comme elle, ils sont quelques-uns à pouvoir prendre la parole au nom du candidat.

Parmi les heureux élus, Aurélie Filipetti, chargée de la culture. Aux biennales internationales du spectacle à Nantes le 19 janvier, le candidat a été obligé de prendre position avant la présentation de son programme. Si bien que ses équipes se sentent enfin "autonomes". "Ça nous ouvre le champ", confirme l’un d’entre eux, soulagé.

Thierry Repentin, dossier habitat et politique de la ville, a de son côté bénéficié d’une "réunion de pré-arbitrage" avant Noël. "J’attends le feu vert mais je connais déjà ce que je pourrai annoncer", crâne presque celui qui en profite pour "faire du teasing" auprès des professionnels du secteur qu’il rencontre.

Autre bien loti qui devrait faire des envieux : François Rebsamen, secteur sécurité, qui estime sans plus de précision avoir "eu les réponses aux questions qu’il se posait"  et disposer d’une "carte blanche pour [s']’exprimer au nom du candidat" sur ces sujets.

Dernier serein, André Vallini, monsieur justice, qui confie : "Ce qui m’arrange, c’est que ma thématique n’est pas sujette à discussion au PS. Donc à part des ajustements très techniques, je sais ce que je dis." Et de reconnaître : "C’est sûr que c’est plus confortable pour moi que pour d’autres." Avec une pensée spéciale pour les titulaires des pôles "économie", "industrie" et "fiscalité", pour qui "ça doit être autre chose" !

• Les chahutés par l’actu

Et effectivement, Alain Rousset, qui planche entre autres sur l’industrie, l'admet : puisque "la crise apporte des interrogations nouvelles", le brainstorming ne s’arrête jamais et les arbitrages sont en suspens.

Un peu comme Alain Vidalies, bien obligé, en qualité de chargé de l'emploi, de bûcher sur le sommet de crise convoqué par Nicolas Sarkozy mercredi 18 janvier. S'il avait déjà donné à la presse les contours du fameux "contrat de génération" défendu par François Hollande au cours de la primaire citoyenne, pour le reste des annonces, il n’a pas de dates mais "des semaines précises".

Un peu sur les mêmes plates-bandes avec le social, Marisol Touraine, qui a dû gérer la patate chaude des retraites fin 2011, s'agace : "Ce qui me frappe, c’est cette exigence de précisions qu’on aimerait retrouver chez les autres." Cette volonté des adversaires et de la presse notamment de "rentrer dans un luxe de précisions surprenant" l’oblige à "résister" à certaines sollicitations.

Quant au pôle éducation, il a dû gérer l'affaire des 60 000 postes de profs ponctuée d'embrouilles internes avec Jérôme Cahuzac et Benoît Hamon. "Il y a effectivement de la friture sur la ligne", concède Bruno Julliard, responsable de l’éducation dans l’équipe plus large de Vincent Peillon. D'emblée, il souligne d’emblée que "le petit couac n’est pas venu du pôle". Mais il reconnaît que la période est "particulière" et nécessite "une discipline quasi militaire".

• Les disciplinés qui trépignent

"C’est à la fois organisé et souple", décrit pour sa part George Pau-Langevin, madame questions sociétales, qui "attend tranquillement".  Sans pour autant s’empêcher de continuer à dire "ce qui lui semble important". Sa théorie ? "Si on a été choisi, c’est qu’il sait qu’on a quelques idées sur le sujet !"

De son côté, Kader Arif, pour les questions touchant à la coopération, se concentre sur la préparation des éléments d’un discours précis pour "quand le candidat voudra s’exprimer sur la question". Avant de s’exclamer : "Donnez-nous quinze jours et on aura des chiffrages précis." Thierry Jeantet lui "attend impatiemment que François donne le la". Et espère que son thème, l’économie sociale et solidaire, sera bien "un point central de la campagne".

Au pôle territoire, piloté par Yves Krattinger, on ne dispose même pas de pré-arbitrage mais on s’accroche à un calendrier d’au moins "trois étapes solidement calées". Tandis que Marie-Hélène Aubert, à l'environnement, a choisi la transparence sur l’épineux dossier du nucléaire notamment. "Je dis qu’on est en cours d’affinage et ça ne m’empêche pas de dormir", balaye-t-elle. 

• Les délaissés qui pilotent à vue

Et puis, il y a les autres. Qui dorment peut-être la nuit mais commencent à ramer le jour. L’un va "au QG à la chasse aux infos" quand l’autre commence par reconnaître qu’il "faut faire preuve d’humilité dans ces périodes-là".  

Roland Ries, aux transports"attend un retour sur quatre grandes propositions, notamment en terme de sécurité routière et de tarification des transports" tout en peaufinant ses propositions de déplacements thématiques. Aux interlocuteurs du secteur ? "On leur donne notre analyse mais pas nos propositions."

"Motus et bouche cousue" aussi chez Mireille Le Corre sur les thèmes de l’immigration et de l’intégration. Tant qu’elle n’a pas le feu vert, elle se "concentre sur la riposte, pour ne pas laisser dire à monsieur Guéant n’importe quoi".

"Vous aurez des réponses précises à toutes les questions que vous posez", a promis mi-janvier Michel Sapin, chargé du projet présidentiel du candidat socialiste. Et de fait les chefs de pôle vont attentivement éplucher le discours de François Hollande de dimanche, bien qu'on leur ait bien répété qu’il ne pourra pas tout détailler. Certains s’attendent même à ce que ce soit "un peu frustrant". La libération en tout cas est prévue pour le jeudi suivant, lors de la vraie présentation du programme.  

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