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Cantonale dans le Var : "Le PS est coincé dans son positionnement face au FN"

Au lendemain de l'élimination de la gauche au premier tour de la cantonale à Brignoles (Var), Joël Gombin, spécialiste du Front national, analyse la stratégie électorale du Parti socialiste.

Article rédigé par Yann Thompson - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Le Premier secrétaire du PS, Harlem Désir, prononce un discours lors du forum "La république face aux extrémismes", le 5 octobre 2013, à Paris. (THOMAS SAMSON / AFP)

Les résultats du premier tour de l'élection cantonale partielle de Brignoles (Var), dimanche 6 octobre, ont été qualifiés de "très sévère avertissement pour la gauche", lundi, par le Premier secrétaire du Parti socialiste. Harlem Désir a affirmé que la gauche, éliminée d'entrée, n'avait "pas le droit à la division" face à un Front national "haut et fort". Il a de nouveau appelé "à faire barrage au FN au second tour". Le candidat du parti de Marine Le Pen est en effet arrivé largement en tête, avec 40,4 % des voix.

Pour analyser cette déroute de la gauche et la stratégie du PS face à l'extrême droite, francetv info a interrogé Joël Gombin, doctorant en sciences politiques et spécialiste du Front national. Pour lui, "plutôt que combattre le FN, le PS doit avant tout attirer des électeurs".

Francetv info : Le résultat à Brignoles illustre-t-il un échec de la stratégie d'unité de la gauche face au FN ?

Joël Gombin : Cette stratégie n'était pas claire dès le départ. Au plan national, le PS a annoncé son soutien au candidat communiste mais, localement, les socialistes ont plutôt fait campagne pour Europe Ecologie-Les Verts. Le Parti communiste a lui-même généré des cafouillages, en ne consultant ni le PS, ni EELV pour désigner son candidat. Le fond de l'affaire est que tout le monde pensait, au vu des résultats précédents, que le FN allait gagner et que cela ne valait pas le coup de se battre. Le maire communiste de Brignoles, qui était candidat lors des deux dernières élections, avait choisi de ne pas y retourner. Personne n'avait d'illusion, alors les partis en ont profité pour régler leurs comptes.

Le PS appelle désormais à voter pour l'UMP au second tour, au nom du front républicain. Est-ce un moyen efficace de contrer le FN, qui s'en prend souvent à "l'UMPS" ?

Sur le terrain, le PS n'est pas dupe. Les dernières élections partielles ont montré que cette consigne était assez peu suivie par les électeurs, qui choisissent souvent le candidat FN ou restent chez eux. Mais le PS présente le Front national comme l'ennemi prioritaire, il n'a donc d'autre choix que d'appeler au front républicain. Il est coincé dans ce positionnement. Le communiqué de Christophe Borgel [secrétaire national du PS en charge des élections], dimanche soir, le montre bien. Il est tenaillé entre cet appel au vote UMP et des accusations, malgré tout, contre l'UMP, qui banaliserait le FN.

Le PS a organisé, samedi, un forum de riposte intitulé "La république face aux extrémismes". Comment l'interprétez-vous ?

C'est une initiative compréhensible sur le plan moral, mais peu convaincante sur le plan de l'efficacité politique. Cela avait un arrière-goût d'années 1980, époque SOS Racisme, "le FN c'est mal". Ce type de positionnement moral ne fait changer personne d'avis et risque même de renforcer les électeurs proches du FN dans leur attitude. Cela illustre la situation difficile du PS, en tant que parti, qui ne peut pas s'en prendre au gouvernement et dispose d'une marge de manœuvre très réduite.

Que peuvent faire les candidats socialistes, au plan local, pour retenir les électeurs tentés par le FN ?

En faisant de la politique, tout simplement. Le PS ne retiendra des électeurs qu'en proposant une politique conforme à leurs attentes. Il ne s'agit pas tant de combattre le FN que d'attirer des électeurs. A Brignoles, ce n'est pas tant l'extrême droite qui progresse que la gauche qui s'effondre – et l'UMP ne fait guère mieux. L'essentiel du problème est là. 

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