Les ex-GM&S bouleversent Cannes avec "On va tout péter" de Lech Kowalski
Les ex-salariés de l'entreprise GM&S étaient sur la Croisette pour assister à la projection de "On va tout péter", le documentaire de Lech Kowalski consacré au combat de ces ouvriers de la Creuse pour sauver leur entreprise.
Sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs, le documentaire de Lech Kowalski, On va tout péter, raconte la lutte des 277 salariés de l'entreprise GM&S pour éviter en 2017 la liquidation judiciaire de leur société, basée à La Souterraine dans la Creuse et équipementier pour l’industrie automobile.
Face au risque de fermeture, les employés s'étaient mobilisés pendant plusieurs semaines jusqu'à l'annonce de la reprise du site par le groupe GMD en septembre 2017. L'entreprise s'appelle désormais LSI (La Souterraine Industry) et a repris dans ses rangs 120 des 277 salariés.
7 mois d'immersion
Dès le mois de mai 2017, Lech (prononcer Lek) Kowalski s'est immergé au milieu des ouvriers pour saisir leur révolte, leurs espoirs, leur impuissance aussi. Le tournage a duré sept mois, créant des liens serrés entre le cinéaste et les salariés.
Le 16 mai, une quarantaine d'entre eux est venue à Cannes pour assister à la projection du documentaire. A l'issue de la séance dédiée aux journalistes, ils sont montés sur scène devant une salle debout pour les applaudir. De quoi émouvoir Patrick Brun, un ex-GM&S.
"Ca me touche de faire voir notre lutte filmée par un artiste comme Lech Kowalski. C'est une façon de dire :" En faisant une lutte, regardez où ça nous mène".
Après la projection, un défilé était organisé dans les rues de Cannes pour rappeler que "sur les 157 licenciés, seuls 37 ont retrouvé un CDI. 70 sont sans solution pérenne et 26 sont dans des situations délicates", comme le détaille Vincent Labrousse, un ancien automaticien chez GM&S qui fait partie des rares ayant retrouvé un travail.
Pour eux, le fait que "On va tout péter" soit sélectionné pour la Quinzaine des Réalisateurs est une chance.
Ça nous permet de nous remettre à la une et de continuer la lutte pour les collègues licenciés
Yann Augras - Délégué CGT entreprise LSI
"Excitant et embarrassant"
Quant à Lech Kowalski, cette présence à Cannes, "c'est à la fois excitant et embarrassant. Certains salariés ont été repris. Mais la famille GM&S a été brisée par ce plan social. C'est donc une victoire avec un goût amer".
Des mots qui ne sont pas feints dans la bouche de ce cinéaste né à Londres, fils de Polonais émigrés aux États-Unis (sa mère était ouvrière du textile, son père barman) et qui vit désormais en France où il a monté avec Odile Allard, sa compagne, une société de production, Revolt Cinema. Un nom qui résume l'état d'esprit du réalisateur bientôt septuagénaire.
Les rejetés du système
Depuis ses débuts comme documentariste en 1977 avec un film sur les acteurs porno, Lech Kowalki a toujours montré et défendu à sa façon les rebelles, les êtres rejetés, marginalisés, en lutte contre un système oppressant.
D.O.A. : A Right of Passage,(1981) suivait les Sex Pistols pendant leur dernière tournée américaine ; Rock Soup des sans-abris New-yorkais ;The Boot factory des punks de Cracovie artisans-cordonniers spécialisés en Doc Martin et le plus récent Holy Field, Holy War (2014) des petits paysans polonais en lutte pour conserver leurs terres.
Le tournage sur le site de GM&S lui a valu en septembre 2017 une interpellation pour "rébellion" suivie d'une garde à vue de 24 heures pour avoir refusé d'arrêter de filmer et de quitter la préfecture de Guéret que les salariés en colère venaient d'envahir. Mais le Parquet avait finalement abandonné les poursuites.
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