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Tunisie : il y a un an, Ben Ali quittait le pouvoir

Le 14 janvier 2011, Zine El Abidine Ben Ali fuyait la Tunisie après 23 ans de règne. Les premières élections libres se sont déroulées il y a quelques mois, mais la Tunisie est confrontée à l'urgence sociale et à des défis démocratiques majeurs.
Article rédigé par franceinfo
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  (Zohra Bensemra Reuters)

Il y a un an, Ben Ali qui règnait sans partage depuis plus de deux décennies, a fui en Arabie Saoudite. 
Il est le premier despote arabe chassé par son peuple. 
Le président déchu vit avec son épouse Leïla à Jeddah. Ils sont de "plus en plus religieux " et Ben Ali écrit ses mémoires, selon des sources proches du couple. Riyad a ignoré par deux fois une demande d'extradition, a précisé la justice militaire tunisienne le 3 janvier.
Mais ce qui intéresse les Tunisiens, c'est l'avenir.
Pour eux, "Ben Ali, ça a été un traumatisme, un dégoût politique ". Même s'il ne représente plus de danger, la page n'est pas totalement tournée pour autant. "Les vices qui caractérisaient et ont entraîné la chute de l'ancien régime sont toujours là: corruption, chômage, manque d'expérience démocratique " analyse Yadh Ben Achour, juriste qui a piloté les réformes entre la Révolution et les élections d'octobre dernier.
Les régions déshéritées du centre de la Tunisie sont ravagées par le chômage. Il a explosé au grand jour. La moyenne nationale est de 19%, mais le taux peut atteindre les 50% dans les zones de l'intérieur du pays.

Les actes de désespoir se multiplient

"La corruption se poursuit avec une ampleur extraordinaire ", accuse le Dr Sami Remadi, président d'une association créée après la révolution, dénonçant "l'inertie " des autorités tunisiennes depuis un an.
Selon le classement "Indice de perception de la corruption" établi par l'organisation spécialisée Transparency International, la Tunisie a régressé entre 2010 et 2011 de la 59e à la 73e place sur 183 pays.
Plusieurs tentatives d'immolation par le feu ont eu lieu  au cours de l'année écoulée.
Il y a quelques jours, une femme de 46 ans a trouvé la mort carbonisée à Sfax, principale ville du sud tunisien.
Dans la banlieue sud de Tunis, un quadragénaire, sans emploi, père d'un enfant de huit ans est mort la semaine dernière. Il s'était aspergé d'essence avant d'y mettre le feu devant le siège du gouvernorat (préfecture) de Gafsa.

Le soulèvement de décembre-janvier a fait quelque 300 morts et 700 blessés selon l'ONU.
L'Etat a déjà versé 20.000 dinars (10.000 euros) à chaque famille des morts de la révolution et 3.000 dinars (1.500 euros) à chaque blessé.
"Cette somme suffit à peine à se soigner ", lance Lamia Farhani, présidente de l'Association des familles des martyrs et blessés de la révolution tunisienne et soeur d'un "martyr" abattu le 13 janvier.

Les Tunisiens dénoncent aussi le manque d'expérience démocratique. "Ben Ali est parti, mais le reste de la meute est toujours là", selon la formule d'un jeune cadre commercial.
La plupart des RCDistes, caciques de l'ancien parti au pouvoir, "se sont recyclés dans les autres formations politiques, sauf dans les partis d'extrême gauche et nationalistes arabes ", constate Salem Labiadh, professeur de sociologie politique à Tunis.  "C'est inévitable, mais cela entretient le doute sur l'enracinement du régime démocratique, crucial pour le développement et l'avenir du pays ".

La plupart des Tunisiens estiment aussi qu'il sera difficile de revenir sur une liberté d'expression chèrement acquise. Plusieurs journalistes de l'ère Ben Ali ont été récemment promus par le nouveau pouvoir islamique en place depuis le 23 octobre.

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