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Syrie: Vladimir Poutine recadre son partenaire Erdogan sur son allié Assad
Les relations agitées entre Ankara et Damas ont contraint Vladimir Poutine à remettre un peu d’ordre dans son pré carré syrien. Dans ce qui ressemble à un recadrage, il a demandé au président turc des explications sur ses propos contre le président Assad. Récemment réconciliée avec la Russie, la Turquie a fait savoir qu’il ne fallait pas prendre les mots du Président Erdogan au pied de la lettre.
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Après l’épisode de la destruction d’un chasseur russe par l’aviation turque en novembre 2015, les relations entre Ankara et Moscou ont frôlé un nouveau dérapage. Rendu furieux par la mort de quatre de ses soldats prenant à part à l’offensive en territoire syrien, le président Recep Tayyip Erdogan a dévoilé le fond de sa pensée.
Seul objectif de l'armée turque, «mettre fin au règne du tyran Assad»
Lors d’une réunion à Istanbul, mardi 29 novembre 2016, il a affirmé que l’opération dans laquelle l’armée turque était engagée en Syrie n’avait pour seul objectif que «de mettre fin au règne du tyran Assad (…) et rien d’autre.»
Engagée depuis le mois d’août dans l’opération Bouclier de l’Euphrate sur le sol syrien, l’armée turque avait officiellement pour mission de chasser les djihadistes des régions proches de sa frontière et empêcher les combattants kurdes syriens d’établir une continuité territoriale le long de cette ligne.
L’annonce sur un coup de colère d’un troisième objectif non avoué, celui de faire tomber Bachar al-Assad, a aussitôt provoqué une réaction violente de la part du régime syrien.
Damas dénonce une agression turque
Ces déclarations «montrent clairement que la flagrante agression turque contre le territoire syrien n’est que le résultat des ambitions et des illusions du despote extrémiste (…) qui a transformé la Turquie en une base pour les groupes terroristes issus de la même idéologie et qui œuvrent pour déstabiliser la Syrie et l’Irak», a déclaré le ministère syrien des Affaires étrangères.
Dans son communiqué, le ministère syrien a même appelé la communauté internationale «à mettre fin aux agissements d’Erdogan et à ses ingérences dans les affaires de la région».
Craignant à son tour une escalade militaire entre la Turquie, avec laquelle il s’est récemment réconcilié, et la Syrie qu’il soutient à bout de bras, le Kremlin a demandé une explication de texte au président turc tout en lui rappelant une réalité de terrain.
«Cette déclaration est discordante par rapport à notre compréhension de la situation», a déclaré le porte-parole de Vladimir Poutine, Dimitri Peskov, précisant qu’il s’exprimait au nom d’un «Etat dont les forces armées sont les seules à se trouver légitimement sur le territoire de la République arabe syrienne à la demande des autorités légitimes. Il est très important d’avoir cela en vue», a-t-il encore souligné.
Le président Erdogan fait marche arrière sur ses propos
Deux jours plus tard, et à l’issue d’une troisième conversation téléphonique avec le président russe sur la situation en Syrie, le président turc est revenu sur ses propos. Selon l’agence Sputnik, Recep Tayyip Erdogan a simplement déclaré que la cible visée par l’armée turque dans le cadre de l’opération Bouclier de l’Euphrate n’était pas une personne ni un Etat, mais le terrorisme.
Le conseiller du président Poutine, Youri Ochalov, a pour sa part confirmé que le chef de l’Etat turc avait bien donné une explication concernant ses déclarations. «Je peux seulement dire qu’une conversation téléphonique entre notre président et Erdogan a eu lieu et que ce sujet a été abordé», a-t-il indiqué, refusant toutefois de préciser si cette explication convenait à Moscou.
L'incident est clos, du moins momentanément
Une source de l’administration turque rapportée par l’agence russe Ria Novosti en avait donné un avant-goût: «Cette déclaration faite par le président ne doit pas être interprétée littéralement. J’espère que l’incompréhension (avec la Russie) à laquelle elle a donné lieu sera surmontée rapidement», a fait savoir cette source.
Pour bien montrer que l’incident était clos, du moins pour le moment, l’administration turque a fait savoir que lors de leur entretien téléphonique les deux dirigeants avaient souligné l’importance de normaliser leurs relations bilatérales et convenu «d’accélérer les efforts pour mettre fin aux hostilités à Alep et d’y livrer une aide humanitaire».
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