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Il y a 40 ans, le "Bloody Sunday"

Le 30 janvier 1972, des militaires britanniques tiraient sur des catholiques manifestant pacifiquement à Londonderry. Bilan : 14 tués, une dizaine de blessés. Trente-huit plus tard, une commission d’enquête a qualifié les faits de «meurtres illégaux», après 12 années d’enquête. Sur place en Ulster, le processus de paix, engagé en 1998, se poursuit cahin-caha...
Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Un soldat britannique entraînant un manifestant à Londonderry, le jour du Bloody Sunday le 30 janvier 1972 (AFP - Thopson)

Le « Bloody Sunday » fut un peu le point d’orgue des violences entre séparatistes catholiques et loyalistes protestants, qui ont fait plus de 3500 morts en 30 ans. L’évènement « est à la fois injustifié et injustifiable », a estimé le 22 juin 2010 le premier ministre britannique, David Cameron. Cette prise de position intervenait à la suite de la publication un an plus tôt du rapport d’une commission officielle qui, en 12 ans, a entendu plus de 900 témoins.

"On veut des morts"
Lors de ce fameux dimanche, les militaires avaient été envoyés dans une cité HLM contrôlée par des militants de l’IRA où avait lieu une manifestation en faveur des droits civiques. Une première enquête éclair, quelques jours après la tuerie, avait blanchi l’armée : les parachutistes auraient riposté aux coups de feu des manifestants. Mais selon le nouveau rapport, les paras ont menti lors de leurs témoignages et ont visé des civils non armés, certains dans le dos. Avant la tuerie, un officier avait dit à ses soldats : « On veut des morts »...

La tuerie a provoqué un traumatisme au sein de la communauté catholique. Par la suite, « l’argent, les armes et les recrues ont commencé à affluer vers l’IRA », l’Armée républicaine irlandaise, a raconté Gerry Adams, le leader du Sinn Fein, aile politique de l’organisation.

Des décennies après les faits, la publication du rapport a tendu les rapports entre les deux communautés dans une province gouvernée par les anciens ennemis, les catholiques du Sinn Fein et les protestants du parti DUP, depuis l’accord de paix dit « du Vendredi saint » signé en 1998. Mais d'une manière générale, les violences n’ont jamais vraiment cessé dans la province britannique.

Les attentats continuent
Ces dernières années, plusieurs dizaines d’attentats ou tentatives d’attentats ont eu lieu, tuant au moins un policier en avril 2011. En juin et juillet derniers, plusieurs quartiers de Belfast se sont embrasés, lors de heurts entre les communautés, faisant des dizaines de blessés. Chaque année en juillet, l'ordre d'Orange, une organisation protestante, organise une marche dans une zone catholique pour commémorer la bataille de la Boyne (1690), victoire du prince William d’Orange contre les catholiques.

Le vice-premier ministre nord-irlandais Martin McGuinness, ex-numéro deux de l’IRA, parle de « drogués du conflit ». Concernant les attentats, la police incrimine des dissidents de l’IRA opposés au processus de paix.

La poursuite du processus de paix
Pourtant, cahin-caha, le processus de paix se poursuit. Ultime étape de l’application totale de l’accord entre les deux communautés, les pouvoirs de justice et de police ont été transférés de Londres à Belfast en avril 2010. Et en mai 2011, Elisabeth II s’est rendue en Irlande pour une visite de quatre jours, la première d’un souverain britannique depuis l’accession du pays à l’indépendance.

Elle a notamment visité à Dublin le Croke Park. Une visite très symbolique : c’est dans ce stade qu’en 1920 des militaires anglais avaient tiré dans une foule pacifique venue pour un match de foot gaélique. Quatorze personnes avaient été tuées, dont deux enfants. Un autre « Bloody Sunday », qui avait marqué un tournant dans la guerre d’indépendance irlandaise en finissant de dresser la population contre les Britanniques. 

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