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"Amitié passionnée", fausse moustache et scène de ménage... Elizabeth et Philip, un couple pas toujours à la noce depuis 70 ans

Le couple royal britannique célèbre ses noces de platine lundi. L'occasion pour franceinfo de vous raconter l'histoire parfois tumultueuse de ce duo.

Article rédigé par Benoît Zagdoun
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 9 min
La reine Elizabeth II et le prince Philip, le 14 juillet 2017, lors de la visite du roi d'Espagne Felipe VI et de la reine Letizia à Buckingham Palace, à Londres (Royaume-Uni). (CHRIS JACKSON / AFP)

Le 20 novembre 1947, un parterre de têtes couronnées et de représentants du monde entier assiste au mariage d'une jeune princesse de 21 ans avec un beau et grand prince, de cinq ans son aîné. Les deux aristocrates, cousins, sont tombés amoureux dès l'adolescence. Soixante-dix ans plus tard, le couple s'apprête à célébrer ses noces de platine en famille à Windsor (Royaume-Uni), lundi 20 novembre. A respectivement 91 et 96 ans, la reine Elizabeth II et le prince Philip ne tarissent pas d'éloges l'un sur l'autre et livrent volontiers les secrets de longévité de leur union. Comme en 1997, à l'occasion de leurs cinquante ans de mariage.

"Il est quelqu’un qui n’accepte pas aisément les compliments, mais il a été et reste très simplement ma force depuis toutes ces années", déclare la souveraine, reprise par Metro (en anglais). Et le prince consort de commenter : "Je pense que la leçon principale que nous avons apprise est que la tolérance est l'ingrédient essentiel de tout mariage heureux. (...) Vous pouvez comprendre en me voyant que la reine a comme qualité la tolérance en abondance."

Mon travail, en premier, en second et en dernier lieu, c'est de ne jamais décevoir la reine.

Le prince Philip

Mais en sept décennies, l'époux au caractère bien trempé, roi des blagues de mauvais goût, voire carrément sexistes et racistes compilées par le Mirror (en anglais), a plus d'une fois causé des sueurs froides à la très flegmatique monarque britannique.

Quand le prince passe la nuit avec une "showgirl"

Nous sommes en octobre 1948. Dans un mois, Elizabeth, qui n'est encore que princesse, et son époux, le prince Philip, vont célébrer leurs noces de coton. La future reine, enceinte de huit mois (le nouveau-né sera le prince Charles), doit faire face aux premières rumeurs d'infidélité de son mari. Car Philip vient de faire la connaissance de Pat Kirkwood, star des théâtres londoniens, dont un critique a qualifié les jambes de "huitième merveille du monde".

Un soir, Philip fait irruption dans sa loge, accompagné de Stirling Henry Nahum, plus connu sous le nom de Baron, photographe de la cour et petit ami de la comédienne. Philip embarque Pat dans sa voiture de sport. Le prince, éméché et amateur de conduite sportive, manque de provoquer un accident. Ensemble, ils dînent dans un restaurant du quartier chic de Mayfair et finissent en boîte de nuit, où ils dansent jusqu'au petit jour, relate le Daily Mail (article en anglais). Ils ont le même âge, 27 ans, et s'entendent à merveille. "Je soupçonne qu'il s'est senti piégé et qu'il a rarement eu la chance d'être lui-même. Je pense que je suis parti du bon pied parce que je l'ai fait rire", confia-t-elle un jour, citée par le Sun (article en anglais).

Pat Kirkwood, debout sur le piano de sa maison de Londres (Royaume-Uni), le 13 novembre 1953. (KEYSTONE PICTURES USA / MAXPPP)

La comédienne a toujours nié avoir eu une liaison avec le prince. Elle a même écrit à Philip pour demander un démenti en bonne et due forme du palais, relate The Daily Beast.com (article en anglais)"S'il y avait eu un soutien de votre part, l'affaire aurait pu être étouffée depuis des années, au lieu de quoi j'ai dû affronter seule une mer de requins", accuse-t-elle dans une de ces lettres, dévoilées après sa mort, en 2007. "Il n'y a absolument rien à faire, répond Philip. L'intrusion dans la vie privée, l'invention et les fausses citations sont le fléau de notre existence."

De cette correspondance, la chanteuse et auteure Jessica Walker a tiré une comédie musicale. Elle en est persuadée : ces soupçons sont la raison pour laquelle Pat Kirkwood n'a jamais reçu les honneurs royaux, malgré ses soixante ans de carrière, au contraire de toutes les gloires du théâtre britannique. 

Quand le couple royal se dispute devant une caméra

Le 6 mars 1954, le caméraman Loch Townsend et le preneur de son Frank Bagnall se présentent au bord du O'Shannassy Reservoir, un lac artificiel du sud-est de l'Australie, devant le chalet où Elizabeth II et le prince Philip passent leur week-end. La reine et son prince s'offrent une brève pause dans une longue tournée de six mois entreprise dans la foulée du couronnement.

Townsend et Bagnall sont venus filmer la reine en train d'admirer les koalas et les kangourous, mais la souveraine se fait attendre. La lumière du jour commence à faiblir et les deux hommes s'impatientent, raconte Robert Hardman, spécialiste de la royauté dans son livre Our Queen, dont le Daily Mail (article en anglais) a publié des extraits. La porte du chalet s'ouvre finalement. Townsend allume sa caméra. La scène qui se joue sous ses yeux le sidère. Le prince bondit sur le perron. Des chaussures de tennis et une raquette fendent l'air. La reine se rue sur les talons de son époux. Furieuse, elle lui ordonne de revenir, le ramène dans le chalet et claque la porte.

Townsend et Bagnall tiennent un scoop planétaire : une dispute conjugale royale. Mais cette vidéo, personne ne la verra jamais. Le Commander Richard Colville s'en est assuré. A peine l'incident terminé, le secrétaire royal chargé de la presse fond sur l'équipe de tournage. L'homme est notamment surnommé par les correspondants royaux l'"abominable No Man" – un jeu de mots entre l'"abominable Snowman", l'"abominable homme des neiges" et sa propension à être l'"abominable homme qui dit non".

Townsend lui remet la précieuse bobine. Quelques instants plus tard, la reine réapparaît, poursuit Robert Hardman. Et d'une voix douce, elle demande : "Je suis navrée pour ce petit interlude, mais, comme vous le savez, cela arrive dans chaque mariage. Maintenant, que puis-je faire pour vous ?"

La reine Elizabeth II et le prince Philip, le 11 février 1954, à Sydney (Australie), lors d'une visite officielle. (KEYSTONE PICTURES USA / MAXPPP)

Vous ne vous mettiez pas sur le passage du prince Philip quand il était de mauvaise humeur. Je les ai parfois entendus, lui et la reine, avoir des disputes terribles, pleines d'émotions, mais c'est ce que font les couples mariés

Un intendant de la reine Elizabeth II

au "Daily Mail"

Quand Elizabeth II met une fausse moustache pour ramener Philip à la maison

En épousant une future reine, il a accepté de n'être que prince consort et de s'effacer. Pour elle, il a renoncé à (presque) tout : sa carrière dans la Royal Navy britannique, ses titres de prince de Grèce et du Danemark, ses cigarettes... Pour ses noces, il s'est converti à l'anglicanisme. Et sur les conseils de Winston Churchill, sa famille ne porte pas son nom, Mountbatten, mais celui de la reine, Windsor. "Je ne suis donc qu'une foutue amibe, ici", aurait-il lâché. En public, il se tient en retrait, toujours quelques pas derrière son épouse. Et cela dure depuis soixante-dix ans.

Pour compenser, "la reine donne à Philip beaucoup de latitude. Son père lui a dit : 'Souviens-toi qu'il est marin. Ils rentrent avec la marée'", glisse, citée par le Sun (article en anglais), Sacha, la duchesse d'Abercorn, l'une des proches du prince. Pendant les premières années de son règne, Elizabeth autorise au prince consort de longues évasions à bord du yacht royal, le Britannia, avec ses amis. Il peut passer jusqu'à six mois par an loin d'elle. De longues sorties en mer qui intriguent.

En octobre 1956, le prince embarque avec son ami Mike Parker. Mais en février 1957, il n'est toujours pas rentré. La presse s'interroge : le couple royal battrait-il de l'aile, après bientôt dix ans de mariage ? Les journaux américains avancent que des femmes ont été amenées à bord du navire. La reine et le palais sont contraints de sortir de leur silence. "Il est tout à fait faux qu'il y ait une rupture entre la reine et le duc", assure le communiqué officiel.

Elizabeth II s'envole pour le Portugal rejoindre Philip. Le prince en goguette ayant été photographié avec une barbe des plus décontractées, la reine décide d'arborer une fausse moustache pour leurs retrouvailles. La blague, destinée à dédramatiser l'affaire, tourne court : le prince s'est rasé de près. L'anecdote est rapportée par le Daily Mail (en anglais). C'est ainsi que prennent fin 124 jours de vacances princières.

Le secret d'un mariage heureux, c'est d'avoir des centres d'intérêt différents.

Le prince Philip

lors du Royal Windsor Horse Show en 2006

Le prince Philip, barbu et en uniforme, le 7 février 1957, à la barre du "Lorna" après être descendu du "Britannia" au large de l'île britannique de Tristan da Cunha dans l'Atlantique Sud. (KEYSTONE PICTURES USA / MAXPPP)

Quand Philip vit "une amitié passionnée"

D'autres fréquentations féminines du prince Philip continuent de susciter bien des spéculations. Parmi celles-ci, la duchesse d'Abercorn, Sacha. L'aristocrate, vingt-cinq ans plus jeune que le prince, serait sa confidente, partagerait le même sens de l'humour que lui et, citée par le Sun, reconnaît volontiers une certaine"alchimie" entre eux. "C'était une amitié passionnée, mais la passion était dans les idées. Ce n'était certainement pas une relation. Je n'ai pas couché avec lui", explique-t-elle à son biographe, selon le Daily Mail.

Dans l'entourage princier, il y a aussi lady Penelope Brabourne. Cette aristocrate, grande, blonde et  mince, de plus de trente ans sa cadette, est depuis 1994 la partenaire du prince dans les compétitions équestres d'attelage qu'il affectionne. "Penny" est régulièrement conviée aux fêtes organisées le week-end à Wood Farm sur le domaine royal de Sandringham, dans le Norfolk. Détail piquant, relevé par le Sun : Lady Brabourne n'y est jamais présente en même temps que la reine...

Le prince Philip et lady Brabourne, lors du Royal Windsor Horse Show, le 17 mai 2009. (DAVID HARTLEY / REX / SIPA)

"La reine a été vraiment blessée en entendant et en lisant ce qui se dit sur Philip et les femmes, assure Margaret Rhodes, sa cousine, l'une de ses plus vieilles amies, dans le Daily Mail (en anglais). Je pense honnêtement que ça a dû la blesser terriblement, d'autant plus qu'elle est la femme d'un seul homme et qu'elle n'a jamais regardé ailleurs."

Je ne pense pas qu'il y ait jamais eu le moindre petit pépin dans leur mariage. Si quelque chose avait été découvert, il aurait été difficile pour Philip de continuer. Leur mariage est solide.

Margaret Rhodes, cousine et amie d'Elizabeth II

dans le "Daily Mail"

La fidélité du prince a été maintes fois sujette à caution, mais aucune relation extraconjugale n'a jamais été prouvée. Dickie Arbiter, ancien porte-parole de la reine, témoin privilégié de la vie la plus intime du palais royal et désormais commentateur royal, a trouvé une formule définitive, notée par le Daily Mail : "Le prince Philip a toujours aimé faire du lèche-vitrines, mais il n'achète pas."

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