Reportage "Tout le monde se fiche de notre situation" : dans le sud du Liban, les déplacés se sentent abandonnés

Plus de 19 000 personnes ont fui le sud du Liban, selon l'ONU, pris en étau entre les frappes du Hezbollah et celles d’Israël. Elles se retrouvent, quelques kilomètres plus loin, complètement démunies.
Article rédigé par Noé Pignède
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Des familles qui ont quitté le sud du Liban ont trouvé refuge dans cette école de Tyr, le 19 octobre 2023. (MAHMOUD ZAYYAT / AFP)

Les combats entre le Hezbollah et l'armée israélienne s'intensifient dans le sud du Liban. L'ONU décompte lundi 19 000 déplacés. À Tyr, à une vingtaine de kilomètres au nord de la frontière avec Israël, un millier de déplacés s’entasse dans une école. Ces familles ont fui les bombardements de leurs villages. Sous le préau, quelques enfants comme Ali, 11 ans, jouent au football pour oublier la guerre. "On a tous eu très peur lorsqu’il y a eu la première bombe. Toute ma famille s’est mise à pleurer. Et puis on s’est enfui. Je veux rentrer, parce qu’on n’est pas bien ici. Il n’y a même pas de douche. Je veux retourner à la maison."

Depuis deux semaines, la famille d’Ali dort dans une salle de classe insalubre, sur des matelas à même le sol. Ici, les déplacés manquent de tout : la nourriture et l’eau sont rationnées. Prostrée sous une vieille couverture, la grand-mère d’Ali, 88 ans, est gravement malade. Sa fille est désemparée.

"Les bombes tombaient partout autour de nous. Il fallait absolument qu’on parte de notre village. On a dû déplacer ma mère en ambulance. Mais ici, je suis toute seule pour m’occuper d’elle, c’est très dur. Je n’arrive même pas à lui faire sa toilette."

Aucune aide de l'Etat libanais

Trop pauvres pour aller ailleurs, ces familles sont livrées à elles-mêmes et dépendent des organisations humanitaires pour survivre. L’État libanais en faillite n’a rien mis en place pour leur venir en aide. Abdallah Ghoraieb est le maire de Dayra, un village régulièrement visé par l’armée israélienne. Il a fui avec ses administrés et raconte que "la majorité des gens sont arrivés ici sans rien. Il y en a qui ont besoin de matelas, de savon, de couches pour les bébés.

"Heureusement qu’il y a quelques ONG parce que l’État est complètement absent. À la frontière, il n’y a même pas de soldats pour nous protéger." 

Abdallah Ghoraieb, maire de Dayra, dans le sud du Liban

à franceinfo

Un sentiment d’abandon partagé par Nadia. "Aucun responsable politique n’a eu ne serait-ce qu’un mot pour nous, dénonce la jeune femme de 23 ans. Tout le monde se fiche de notre situation. On a tout laissé derrière nous : notre terre, notre maison… Je me sens humiliée. Qu’est-ce qu’on va devenir ? Nous voulons que cette guerre s’arrête."

Ici, la crainte d’une escalade entre le Hezbollah et Israël est sur toutes les lèvres. Depuis le début de la guerre, la milice chiite menace d’ouvrir un nouveau front au sud du Liban.

Dans le sud du Liban, les déplacés se sentent abandonnés. Le reportage de Noé Pignède

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