Reportage "On récupère nos enfants à l’école en courant, la peur au ventre" : depuis l'attaque du Hamas, l'inquiétude de la communauté juive de France

L'inquiétude grandit au sein de la communauté juive de France. Plus de 300 personnes ont été arrêtées pour "acte ou menaces antisémites" depuis l'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre. À Paris, malgré elle, une partie de la communauté fait "profil bas".
Article rédigé par Benjamin Illy
Radio France
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Temps de lecture : 2 min
Un père juif avec ses deux garçons dans une rue de Paris (photo d'illustration). (LOIC VENANCE / AFP)

Un homme croisé dans le 19ᵉ arrondissement de Paris porte la kippa. Il confie être "beaucoup plus inquiet qu'avant". "On fait attention, dit-il. On essaie de mettre une casquette ou de mettre la capuche. J'ai un ami qui s'est récemment fait agresser par un toxicomane aux cris de 'Sale juif ! Ça, c'est pour Gaza !'" Depuis l'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre, les actes antisémites se multiplient en France, le pays d'Europe qui compte les plus importantes communautés juive (500 000 personnes) et musulmane (6 millions).

588 faits antisémites ont été signalés, aboutissant à 336 interpellations, a annoncé lundi 23 octobre le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin sur X (ex-Twitter). Et c’est sans compter les 4 000 alertes reçues par la plateforme Pharos, qui traite les signalements de contenus haineux en ligne.

"J'ai peur de sortir de chez moi"

Une mézouzah accrochée à l'entrée d'une boucherie attire notre attention. "C'est ce qui protège la maison, explique le propriétaire des lieux à propos de cet objet rituel juif. C'est une boucherie cachère." Mais il raconte que dans les maisons, les gens les enlèvent "pour que ce soit anonyme". "Les gens sortent moins, il y a moins de monde à la boucherie, ils ont peur", abonde sa femme. Une cliente entre à son tour et admet qu'elle a modifié toutes ses habitudes. "J'ai peur de tout, nous dit-elle, l'angoisse audible dans la voix. Je fais les courses très rapidement, j'ai peur de sortir de chez moi." "Il y a un proverbe français qui dit : Vivons cachés, vivons heureux", récite laconiquement le boucher. "En ce moment, c'est mieux", opine sa femme.

Accostée un peu plus loin, Vanessa, 45 ans, nous confie elle aussi avoir tout changé. "On récupère nos enfants avec la peur au ventre. On les prend, on les dépose en courant à l'école et on a des groupes WhatsApp".

"On s'est organisé pour les sorties d'école avec des parents protecteurs qui essaient de regarder un petit peu à droite, à gauche, si tout se passe bien. C'est pour pouvoir fermer les portes de l'école rapidement en cas de danger."

Vanessa, une mère de famille juive

à franceinfo

"À la sortie de la synagogue la semaine dernière, une bande de jeunes m'a crié 'Free Palestine !' en m'encerclant. J'ai eu extrêmement peur, raconte-t-elle. Depuis le 7 octobre c'est flagrant, on ne se sent vraiment pas en sécurité. Israël s'est fait agresser de façon abominable et les juifs de France font profil bas". "J'adore ce quartier, j'adore la France, poursuit-elle avant que sa voix ne se brise. C'est mon pays. Je suis très émue parce que c'est là où je suis née. J'ai toujours été dans une école laïque. J'ai toujours adoré la culture française et aujourd'hui, vivre dans cette peur avec un sentiment d'être dans les années 1930, ça me fait beaucoup de peine. Vraiment !" 

Depuis l'attaque du Hamas, l'inquiétude de la communauté juive de France - le reportage de Benjamin Illy

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