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L'Uruguay légalise le cannabis : un Etat dealer ?

La Chambre des députés de l'Uruguay a approuvé mercredi soir la légalisation de la marijuana. Si elle est ratifiée par le Sénat, cette loi pour être promulguée. Dans ce cas, l'Uruguay serait le premier pays au monde dans lequel la production et la vente du cannabis seraient contrôlées par l'Etat.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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  (Andres Stapff Reuters)

Après plusieurs mois de débats au Parlement, le cannabis a été légalisé par les députés uruguayens, mercredi. Le projet de loi,  déposé il y a un an, a notamment pour but de permettre à l'Etat de gérer le commerce du"cannabis et de ses dérivés ".

Vote serré des députés

Actuellement, la consommation de marijuana n'est pas pénalisée en Uruguay. En revanche, interdiction de la commercialiser. Pour le président José Mujica, "les politiques répressives"  appliquée depuis 100 ans "ne font que favoriser le trafic" . Après 14 heures
de débats au Parlement, le texte a été approuvé par 50 voix sur 96, notamment grâce aux voix
du Frente amplio (gauche), parti au pouvoir, également majoritaire au Sénat.

Le trafic de
drogue, fléau du pays

Selon le Conseil national des drogues (JND), environ 20.000 Urugayens consommeraient quotidiennement du cannabis. La quantité de drogue commercialisée chaque année dans le pays est estimée à 22 tonnes, ce qui rapporte sur les marchés parallèles de 30 à 40 millions de dollars.

Mercredi en
début de séance, le député Sebastian Sabini avait expliqué que le but n'était
surtout "pas de promouvoir la consommation, (qui) existe  déjà ". La
priorité de ce projet serait bien de couper les liens entre consommateurs et réseaux
mafieux, afin de lutter contre le trafic de drogue. Selon ce député, ce fléau "finance le crime organisé et des activités illicites comme la
vente d'armes ou le blanchiment d'argent
". La démarche est donc de lutter contre le trafic de drogue "dans
ses aspects substantiels",
et non contre les petits consommateurs.

Soutien du président

C'est la présidence qui a déposé le texte à l'été 2012. L'objectif de cette loi est clair : "minimiser les risques et réduire les dommages de l'usage du cannabis ". Assumée par le président José Mujica, dit Pépé, le but du texte est aussi lutter contre le trafic de drogue lui-même, et donc les trafiquants. 

L'Etat, futur dealer officiel

Le projet de loi vise à
permettre à l'Etat de gérer le commerce de cannabis. Un organisme serait créé : l'Institut de régulation et de
contrôle du cannabis. L'IRCCA gérerait alors la production et la distribution et
veillerait à l'application de la loi.

Très organisée,
la législation autour du cannabis serait précise. Les
personnes autorisées à consommer devraient impérativement être résidents uruguayens,
majeurs et inscrits dans un registre des usagers. Ils pourraient acheter
jusqu'à 40 grammes par mois, dans des pharmacies autorisées.

Une première
mondiale

En Espagne, la
loi tolère la production de cannabis dans un cadre privé, entre personnes
majeures et dans un cadre strictement non lucratif. Aux Pays-Bas, la vente et
la consommation de cinq grammes de cannabis par personne est tolérée dans les coffee shops. Si l'autorisation de la culture privée pour un usage
personnel est déjà autorisée dans le Colorado, ainsi que dans l'Etat de Wahinsgton, la vente de
cannabis par un Etat serait une grande première
mondiale.

Parmis les
novations qu'autoriseraient la loi, la culture à usage personnel serait rendue
possible, à hauteur de six plants. La création de clubs de consommateurs de 15
à 45 membres serait également permise, avec une limite fixée à 99 plans.

Un projet
critiqué

Pour sa part, le député du Parti National (opposition) Gerardo Amarilla a
considéré qu'une instauration de cette loi reviendrait à "jouer avec le
feu
". Il craint une erreur de la part du gouvernement, qui mènerait à "sacrifier
une génération"
 pour se rendre éventuellement compte que la loi ne
supprimait pas le marché noir et favorisait une hausse de la consommation.

D'autre part, un sondage récent de l'institut Cifra révèle que 62% des Uruguayens
sont opposés à cette loi, contre seulement 26% favorables.

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