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Norvège : Breivik attaque l'Etat en justice, au nom des droits de l'Homme

Un procès pas comme les autres s’ouvre ce mardi en Norvège. Anders Behring Breivik, le terroriste d’extrême-droite qui avait tué 77 personnes dans l’explosion d’une bombe à Oslo et dans le massacre de l’île d’Utøya en juillet 2011, attaque l’Etat norvégien pour traitement inhumain et dégradant, et non-respect de son droit à la vie privée.
Article rédigé par Grégory Tervel
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
  (Anders Breivik pendant son procès en 2012 © Frank Augstein/AP/SIPA)

 La justice norvégienne va examiner pendant quatre jours si les conditions de détention du terroriste, qui a été condamné en 2012 à 21 ans de prison suivis d’une détention de sûreté, sont en violation de la Convention européenne des droits de l’Homme.

Norvège : Breivik attaque l'Etat en justice, au nom des droits de l'Homme - reportage Grégory Tervel

Un tueur de masse, fasciste qui invoque les droits de l’Homme, cela pourrait faire sourire, surtout quand on connaît les conditions de vie dans les prisons norvégiennes, bien plus confortables qu’ailleurs. C’est en fait la question de l’isolement d’Anders Behring Breivik qui va être au centre des débats cette semaine, et qui présente un réel intérêt juridique. "Cela fait maintenant 5 ans qu’il est détenu sans aucun autre contact humain qu’avec des professionnels : personnel pénitencier, avocats ou visiteur rémunéré"   explique son avocat, Øystein Storrvik. " Il semble qu’il le vive très difficilement. Le seul contact personnel qu’il a eu en 5 ans, c’est avec sa mère. Une seule fois avant qu’elle décède, ils ont pu parler à travers une vitre, et se dire au revoir physiquement, juste quelques minutes. Nous soutenons que le fait de ne pas pouvoir rencontrer d’autres personnes est une violation des droits humains les plus élémentaires. Il y a bien sûr des arguments de sécurité pour qu’il soit maintenu en isolement, mais nous pensons que la pression est trop forte. La Norvège se doit de respecter les standards minimums de traitement humanitaire."

 

Afin d’éviter des coûts logistiques et sécuritaires trop élevés, le procès a été délocalisé dans le gymnase de la prison de Skien, où Breivik purge sa peine. Une solution qui convient à son avocat : "Nous soutenons que Breivik souffre de séquelles psychologiques dues à son isolement prolongé, et pour nous il était très important que le juge puisse le voir et l’entendre directement pour s’en rendre compte".

Un procès en forme de tribune médiatique?

 L’extrémiste de droite, jugé sain d’esprit en 2012, devra néanmoins faire face à ses propres contradictions. Il a lui-même refusé ces dernières années des visites ou des mesures de sociabilisation. Il s’est aussi condamné à l’isolement en écrivant noir sur blanc, avant de commettre ses attentats, que la prison était l’endroit idéal pour recruter des combattants.

Il n’est pas interdit de penser qu’il cherche aussi et surtout à refaire parler de lui, au grand dam de ses très nombreuses victimes. Dag André Anderssen a survécu au massacre d’Utøya, il est vice-président de l’association de soutien aux victimes : "Même s’il a essayé de m’enlever la vie, ce procès ne m’intéresse absolument pas. Vu sa personnalité, on pouvait s’attendre à ce qu’il utilise la moindre opportunité pour attirer l’attention sur sa personne.

Nous à l’association, on souhaite surtout que ce procès ne se transforme pas en tribune médiatique pour lui. Cette semaine peut être pesante pour les victimes, beaucoup ressentent comme une obligation de suivre cette affaire au moins un petit peu, cela risque fort de raviver les plaies qu’on tente d’oublier depuis 5 ans…"

 

La justice norvégienne a interdit la retransmission télévisée du procès afin d’alléger le fardeau des victimes.

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