: Vidéo Bruno Le Maire à la rencontre de migrants à Paris
L’ancien ministre et candidat à la primaire de la droite s’est rendu près de la station Stalingrad, à Paris, où vivent près d’un millier de migrants dans des campements de rue. Un reportage diffusé dans “L'Emission politique”, le 20 octobre 2016.
L’ambiance est particulière ce matin-là, dans le 19e arrondissement de Paris. Il est presque 8 heures, et les tentes disparaissent peu à peu du campement de rue de l’avenue de Flandre. Parmi les centaines de migrants qui y dorment, certains craignent une nouvelle intervention policière. La dernière a eu lieu quatre jours plus tôt. Ils s’empressent de ranger leurs “affaires” avant qu’elles soient de nouveau emportées.
Un "vide politique" ?
Les minutes passent, la police n’interviendra finalement pas. Pendant ce temps, une poignée d’habitants du quartier s’affairent à l’entrée d’un immeuble. Il est temps de se diriger quai de Seine, où plus de 500 migrants les attendent. Les habitants préparent les chariots de provisions et se mettent en route. Chaque matin, ils offrent le petit-déjeuner à ces exilés qui dorment en bas de chez eux, sur des matelas ou du carton.
Nous avons suivi Bruno Le Maire, candidat à la primaire de la droite, à la rencontre de ces migrants et des bénévoles qui les accompagnent au quotidien. En arrivant, le député de l’Eure tente d’engager la conversation avec Jérôme Musseau, l’un des organisateurs du petit-déjeuner. Il lui demande son ressenti face à la situation. “On comble un vide politique”, lui répond le bénévole, poussant l’un des chariots de provision en direction du quai de Seine.
Durcir la politique d’asile
Dans son “contrat présidentiel”, Bruno Le Maire détaille une ligne assez dure sur l’immigration et le droit d’asile. Il entend réduire les flux migratoires, et offrir le droit d’asile “uniquement pour ceux qui sont menacés”. S’il est élu, les déboutés du droit d’asile ne pourront plus faire appel de ce refus en France. Ils le feront, dit-il, depuis leur pays d’origine.
Jérôme Musseau, qui s’engage depuis plusieurs mois auprès des migrants, est très critique vis-à-vis de ces propositions : “Allez dire à quelqu’un qui a traversé la Méditerranée qu’il doit repartir. On ne se rend pas compte du voyage qu’ils ont fait, nous dit-il. Que faisons-nous pour les gens qui sont déjà là ? Bruno Le Maire souhaite les renvoyer dans leur pays ? Bon courage ! Il faut prendre la réalité en compte, et faire en sorte que ces gens soient un minimum sécurisés.”
Comment faire appel d'une décision dans un pays où l'on craint les persécutions ?
Près des stations Stalingrad et Jaurès, beaucoup de migrants vivant dans la rue viennent d’Afghanistan ou de la corne de l’Afrique. Bruno Le Maire échange avec plusieurs d’entre eux lors du petit-déjeuner. Parmi ces exilés, Husein, 23 ans. Le jeune homme est arrivé seul il y a une semaine, après avoir traversé le Soudan, la Libye et l’Italie. Il dort à même le sol sous le métro aérien à Stalingrad. Husein a lancé une procédure de demande d’asile, et espère travailler ici. Face à lui, Bruno Le Maire se montre ferme. Si l’Etat estime qu’il n’est pas menacé en Somalie, il devra repartir. “C’est impossible”, nous confie le jeune homme. Son pays est ravagé par la guerre civile depuis 1991.
Le candidat à la primaire de la droite rencontre ensuite un migrant venu de Côte d’Ivoire. Chaque matin, ce dernier vient en aide aux organisateurs du petit-déjeuner quai de Seine. Il raconte avoir fui les persécutions et la mort dans son pays. Le bénévole hésite à déposer une demande d’asile, de peur qu’elle soit refusée et qu’il doive quitter la France. “C’est pour ça qu’il y a une possibilité d’appel”, répond Bruno Le Maire, d’un ton plus compréhensif. Mais un appel est-il vraiment possible dans un pays où l’on craint la persécution ? Au petit-déjeuner quai de Seine, beaucoup de migrants et de bénévoles décrient cette idée.
Les associations critiques
Auprès des habitants, plusieurs associations apportent également leur aide dans les campements du quartier. C’est le cas de United Migrants, qui propose un accompagnement juridique et l’aide à l’inscription à l’université pour les réfugiés. L’association tient une permanence juridique les lundis et mardis quai de Loire, à deux pas des campements. Romain Prunier, cofondateur de l’association, dénonce le manque d’effort de la France : “Il y a des logements vides en Ile-de-France, cette situation n’est pas normale. Il faut assurer un hébergement d’urgence, un accueil de qualité.”
Nous retrouvons également sur place une membre du Collectif parisien de soutien aux exilé-e-s. Elle interpelle Bruno Le Maire sur sa vision de l’immigration et de l’asile. En septembre, le candidat avait affirmé que les migrants économiques n’avaient “absolument pas leur place en France”. La bénévole réagit : “Vous laissez imaginer que des millions de personnes voudraient venir en France. En fait, les exilés savent que la France n’est pas un lieu de développement économique majeur.”
Les migrants économiques sont-ils moins légitimes que les réfugiés politiques ?
La jeune femme est également très critique sur la distinction entre migrants économiques et réfugiés politiques, défendue par Bruno Le Maire. “En quoi quelqu’un qui craint pour sa vie car il n’a pas à manger est-il moins légitime que quelqu’un qui est menacé ? Ces gens ont des compétences linguistiques et professionnelles. Le fait de les voir comme un poids est une erreur.”
Pendant deux heures, l’homme politique écoutera les témoignages et ressentis. Il entendra les critiques, sans jamais manquer de défendre ses idées
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.