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Missile tombé sur la Pologne : même s'il était russe, "on ferait tout en Occident aujourd'hui pour ne pas risquer l'escalade", pour un spécialiste en géopolitique

Le docteur en géopolitique Frédéric Encel estime qu'en attirbuant ce tir à la Russie, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, est resté "dans son rôle" de "chef de guerre". 

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Des experts de la police polonaise enquêtent sur le site touché par un missile, à six kilomètres de la frontière ukrainienne, le 15 novembre 2022. (POLISH POLICE / AFP)

Frédéric Encel, docteur en géopolitique, estime mercredi 16 novembre sur franceinfo que la piste d'un missile de défense ukrainien tombé par erreur sur la Pologne mardi 15 novembre est "un soulagement", car "même si ce n'était pas le cas [s'il était russe], on ferait tout en Occident aujourd'hui pour ne pas risquer l'escalade".

franceinfo : Est-ce le sang froid européen occidental qui vous a marqué ces dernières heures ?

Frédéric Encel : Non seulement le sang froid, mais aussi le pragmatisme consistant à éviter absolument la cobelligérance. Pour ne pas être cobelligérant, on ne doit pas considérer qu'un missile russe ait pu délibérément tomber sur le territoire souverain de l'OTAN. Il s'agit vraisemblablement d'un missile ukrainien, mais je suis absolument convaincu que même si ce n'était pas le cas, on ferait tout en Occident aujourd'hui pour ne pas risquer l'escalade.

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Le fait que la piste d'un missile russe envoyé volontairement sur la Pologne s'éloigne, c'est un soulagement ?

C'est un soulagement. Il faut bien comprendre que depuis le début de l'attaque russe en Ukraine, absolument personne en Occident, ni les Européens, ni les Américains n'ont voulu risquer la cobelligérance. On entrerait dans un principe d'escalade extrêmement dangereux. En réalité, on a les moyens de riposter, mais on n'a pas du tout envie d'entrer en cobelligérance, avec un État qui dispose de 5 500 têtes nucléaires. On ne veut en aucun cas donner la possibilité à Vladimir Poutine de légitimer son action militaire.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a-t-il réagi trop vite en attribuant ce tir à la Russie ?

Il a parlé comme un chef de guerre, il est dans son rôle. Comme le dit un adage : la première victime dans une guerre, c'est la vérité. S'il n'avait pas dit ça, je pense que beaucoup de nationalistes ukrainiens et de simples citoyens ukrainiens se serait demandés s'il n'était pas devenu un peu mou face à la Russie.

Est-ce que ça peut fissurer l'union sacrée entre l'Ukraine et les Occidentaux ?

Les Occidentaux, c'est déjà abusif. Vous avez d'un côté les pays baltes, la Pologne et plusieurs Etats d'Europe orientale qui sont vent debout contre la Russie. Et vous avez l'Europe occidentale qui est globalement plus prudente. Le clivage est là en réalité. Je pense surtout que les Ukrainiens n'ont pas envie que sur le plan strictement technique et militaire, leur sérieux soit remis en cause. Après tout, ce ne serait pas de leur faute si un missile s'était abattu sur la Pologne par erreur, mais jusqu'à présent, ils souhaitent démontrer au monde qu'ils ont un véritable sang froid, qu'ils sont très professionnels et sérieux.

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