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Le poids de l'extrême-droite en Ukraine

Alors que l’opposition paralyse Kiev, les drapeaux du «parti de la liberté» (svoboda en ukrainien) sont bien visibles dans la foule. Svoboda, c’est le parti nationaliste, d’extrême-droite, qui a remporté plus de 10% des suffrages aux dernières élections. Un parti qui s’inscrit dans l’histoire noire de l’Ukraine.
Article rédigé par Pierre Magnan
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Des partisans du parti Svoboda manifestent à Kiev, le 2 décembre 2013. (SERGEI SUPINSKY / AFP)

Svoboda a un chef qui annonce clairement la couleur : Oleh Tyahnybok veut «une révolution sociale et nationale» et appelle à mettre «fin au régime».

 
Le régime qu'il veut renverser est issu des dernières élections d’octobre 2012, remporté par le parti  du président Viktor Ianoukovitch. Un parti souvent présenté comme plutôt pro-russe. Lors de ces élections, la percée (10%) de Svoboda avait été une vraie surprise. Selon les sondages, Svoboda devait bien franchir le seuil de 5% pour entrer au Parlement, mais personne n'avait envisagé un score aussi élevé. Plus de deux millions d'Ukrainiens ont voté pour Svoboda, notamment dans l’ouest du pays. 
 
Jusqu'en 2004, Svoboda s'appelait Parti national-socialiste d'Ukraine... Il a trouvé depuis un nom plus respectable, mais ne s'en réclame pas moins toujours de l'Organisation des nationalistes ukrainiens (OUN). La branche armée (UPA) de ce mouvement collabora activement avec les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale et participa au génocide.

Cela n'empêche pas chaque année Svoboda de commémorer la création, en 1943, de la division Waffen SS «Galitchina» (Galicie).
 
D’ailleurs l’idéologie du passé n’est jamais loin…  Svoboda s'est «illustré en protestant contre l'organisation d'une gay pride à Kiev et s'est indigné qu'une artiste au teint mat représente l'Ukraine au concours de l'Eurovision. L'an passé, le parti avait organisé une manifestation contre le pèlerinage dans la petite ville d'Ouman de Juifs hassidiques sur la tombe de Nahman de Bratslav, charismatique rabbin décédé en 1810. A plusieurs reprises, Oleh Tyahnybok, le chef de Svoboda, a qualifié le régime du président Ianoukovitch de "mafia judéo-moscovite". Plus récemment, un militant de Svoboda s'est offusqué que l'on fasse état des origines ukrainiennes de l'actrice américaine Mila Kunis, soulignant qu'elle était en réalité "juive"», relatait Le Figaro.

Le parti n'a cessé de progresser. Il est né dans la ville de Lvov, en Galicie. «Il s’agit d’un nationalisme ouest-ukrainien, d’un nationalisme galicien», note Jean-Marie Chauvier, journaliste belge et spécialiste de l’ex-URSS. 
Le succès de ces mouvements de l'extrême-droite ukrainienne s'est toujours construit sur la revendication nationale, longtemps mise en veilleuse par le centralisme de l'URSS.

Stepan Bandera, une des figures de ce nationalisme, résume bien l'ambiguïté de ce mouvement. Célébré à Kiev, il est considéré par certains comme un ancien collaborateur des nazis. «L'influente organisation juive Centre Simon Wiesenthal a dénoncé l'attribution à titre posthume du titre d'Héros de l'Ukraine à Stepan Bandera, qualifiant ce dernier de collaborationniste nazi responsable du massacre de milliers de Juifs pendant la guerre de 1939-1945», relevait l'agence russe Novosti.

61 députés israéliens ont même écrit au président du parlement européen Martin Schultz. Les signataires présentent le parti Svoboda (Liberté) comme une organisation néonazie dont les membres «s'inspirent des Nazis et glorifient les meurtres de masse des divisions SS ukrainiennes».

Pas de quoi s'étonner que l'ambiance au parlement ukrainien puisse parfois être musclée, comme le montre cette vidéo. Tout avait commencé parce qu'un député avait parlé russe, ce que refuse les nationalistes de Svoboda. 

 


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