José Socrates rattrapé par une affaire de corruption: le Portugal accuse le coup
Comparé parfois à Tony Blair ou à Nicolas Sarkozy, José Socrates n’a jamais laissé indifférent quand il était au pouvoir, de 2005 à 2011. D’aucuns dirait que c’est une personnalité «clivante», qui plaît autant qu’elle irrite. Quoi qu’il en soit, son arrestation a créé une onde de choc dans le pays.
D’affaires en affaires, les têtes tombent
Sa mise en détention provisoire constitue une première, tant les poursuites sont souvent enterrées en raison des lenteurs du système judiciaire. Plusieurs fois visé par des scandales politico-judiciaires, il s’en est toujours sorti la tête haute (comme dans l’affaire Freeport, du nom d'un centre commercial installé dans une zone protégée, classée en juillet 2010).
En juillet, José Socrates se défendait encore : «Je n'ai pas de capitaux et pas de compte à l'étranger. J'ai toujours vécu de mon seul travail.» Aujourd’hui, la justice portugaise en doute. Et cherche à connaître la provenance des grosses sommes d’argent transférées sur son compte et l’origine du faste de son train de vie, incompatibles avec ses revenus.
Sa mise en examen survient dix jours à peine après le scandale de l’attribution de visas dorés à des investisseurs étrangers, comme l’explique le site de RFI. Cette fois, le ministre de l’Intérieur, Miguel Macedo, a dû démissionner et le chef de la police des frontières, Manuel Palos, a été placé sous les verrous.
Corruption et conflits d’intérêts
Interrogé par l’AFP, le représentant au Portugal de l'ONG Transparency International Joao Paulo Batalha a estimé que «la corruption est un problème grave au Portugal où le pouvoir politique est particulièrement exposé, en raison de nombreuses situations de conflits d'intérêts».
Au jeu de celui qui risque le plus dans cette affaire, le Parti socialiste portugais est le mieux placé. Il avait lancé sa campagne pour les législatives de 2015 et comptait bien se refaire après sa cuisante défaite lors du précédent scrutin en 2011.
Mais on peut aussi supposer que les conséquences de l’arrestation du charismatique José Socrates seront désastreuses pour l’image de tous les partis politiques traditionnels portugais. «Le Portugal est l'un des pays d'Europe où la confiance est la plus basse, tant entre les individus qu'envers les institutions et les acteurs politiques», selon le sociologue Miguel do Carmo, dont les propos sont rapportés par Courrier International.
Entre les affaires et la crise, les Portugais n’en peuvent plus
Cependant, les choses pourraient bien bouger dans ce pays qui connaît depuis 2008 une des pires crises économique de son histoire. Selon Joao Paulo Batalha, «il y a quelques années, un enquêteur dans une affaire de corruption se sentait seul au Portugal. Aujourd'hui, l'opinion publique soutient cette lutte et réclame une justice qui fonctionne».
A l’instar des Roumains, qui ont élu un président «anti-corruption», les Portugais feront-ils un jour parler les urnes pour sortir d’un système corrompu ? Pour l’heure, ils manifestent dans les rues de Lisbonne contre des mesures d’austérité qui plombent leur quotidien. Mesures qui, en 2011, avaient coûté son poste à José Socrates, désavoué après un 2e plan d'austérité en moins d'un an.
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