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Oradour-sur-Glane: la justice allemande relance l'enquête

La justice allemande a rouvert une enquête sur le massacre d’Oradour-sur-Glane (Haute-Vienne) en juin 1944 au cours duquel 642 civils avaient été tués par des SS. C’est la découverte de nouveaux éléments dans des dossiers de la Stasi, la police politique de l’ex-RDA, qui a permis de relancer le dossier. La procédure a peu de chances d’aboutir.
Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Les ruines du village d'Oradour, détruit par les nazis le 10 juin 1944 (AFP - DPA - ROLAND WITSCHEL)

Les autorités ont procédé «au cours des dernières semaines» à des perquisitions chez six octogénaires soupçonnés d’avoir pris part au massacre. Agés de 85 et 86 ans, ces suspects, qui habitent différentes villes d’Allemagne, étaient membres de la division blindée SS Das Reich à l’origine de la tuerie. Ces perquisitions n’ont pas apporté d’éléments nouveaux. Quatre des suspects «souffrent de démence sénile. Les deux autres nient toute implication ou disent ne se souvenir de rien», explique Robert Probst, journaliste à la Süddeutsche Zeitung, qui travaille sur le sujet.

La justice allemande a relancé le dossier après la découverte à Berlin d’un document tiré des archives de la Stasi, toujours en cours de dépouillement, 20 ans après la chute du Mur, par un organisme public spécialisé. La police secrète est-allemande avait entendu un ancien militaire présent sur les lieux au moment de la tuerie. Son témoignage laissait entendre qu’il savait ce qui allait se passer à Oradour. «Il y avait ainsi suffisamment d’éléments pour qu’une enquête soit ouverte», précise Arnaud Boutet, correspondant de France 2 à Berlin.

Pour autant, le dossier est particulièrement complexe
«Les faits se sont produits il y a 67 ans. Aucun témoin ne peut prouver que les hommes soupçonnés, aujourd’hui très vieux, aient participé directement au massacre. De plus, s’ils appartenaient à une unité présente sur place, il s’agissait apparemment de sous-fifres, âgés de 18-19 ans au moment des faits. Dans le même temps, les perquisitions n’ont rien donné. Autre difficulté : l’affaire concerne les systèmes judiciaires de deux pays différents», souligne Arnaud Boutet. 

Dans ce contexte, le procureur de Dortmund, Andreas Brendel, qui lancé la procédure, admet lui-même qu’«un classement de l’enquête est le scénario le plus probable». «Celle-ci va cependant se poursuivre sans que l’on sache de quels éléments la justice dispose pour continuer son travail», observe Robert Probst. Le procureur s’est félicité de la médiatisation apporté au dossier. Il espère ainsi que des témoins, forcément français, vont se manifester.

En Allemagne, l’affaire n’a pas suscité de réaction particulière. «La recherche des criminels nazis y est institutionnalisée : il existe un office fédéral chargé des crimes commis à l’époque national-socialiste qui fait son travail sans état d’âme», précise le correspondant de France 2.

«Jusque dans les années 80, la justice a fait relativement peu dans ce domaine, en raison de la présence d’anciens éléments nazis dans son sein et du fait que l’on refoulait la culpabilité des crimes. Depuis 1949 jusqu'à aujourd'hui, environ 6500 jugements ont été prononcés par la justice allemande contre des criminels nazis alors qu'entre 1945 et 1949, les puissances alliées occupantes ont condamné 5000 personnes pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité. Mais depuis cinq à sept ans, on a affaire à une nouvelle génération de procureurs qui sont décidés à agir», observe de son côté Robert Probst. Alors que la plupart des suspects ont disparu…

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