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Frauke Petry, la patronne du parti AfD, qui a tenu Angela Merkel en échec

Frauke Petry est la figure du nationalisme allemand. Patronne du parti AfD «Alternative für Deutschland» (Alternative pour l’Allemagne), elle surfe avec succès sur les craintes xénophobes dans son pays. Son parti vient de devancer la CDU lors des élections régionales dans le Land Mecklembourg-Poméranie occidentale, celui où est élue Angela Merkel.
Article rédigé par Pierre Magnan
France Télévisions
Publié
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Frauke Petry, présidente de l'AfD, au lendemain des élections régionales du Mecklembourg-Poméranie occidentale. (ODD ANDERSEN / AFP)

En Allemagne, comme dans tous les pays d’Europe, les partis de gouvernement souffrent devant la poussée de forces contestatrices, que ce soit de gauche (Espagne, Grèce) ou de droite (Royaume-Uni, France, Allemagne). «La force des partis établis s'effrite, la CDU et le SPD régressent clairement», s'était déjà félicitée la présidente de l'AfD, Frauke Petry, après des élections locales en mars 2016, à cause notamment des questions migratoires, sur lesquelles elle joue avec succès.

Une Allemande de l'Est
Comme Angela Merkel, Frauke Petry vient d’Allemagne de l’Est. Comme Angela Merkel, la patronne d’Alternativ für Deutschland est scientifique. Comme la chancelière, elle a eu des liens avec l’église protestante. Mais politiquement, la ressemblance s’arrête là, même si Frauke Petry a un temps regardé vers la CDU lors de son entrée en politique.

Mais cette brune juvénile aux cheveux courts, avec son air de Jeanne d'Arc, a choisi le jeune parti AfD, né en 2013. Elle en a pris la présidence à l’été 2015.

Frauke Petry, née Marquardt, a vu le jour en 1975 en Allemagne de l’Est. Elle a grandi à Dresde dans une famille de cadres, mère chimiste et père ingénieur. A la chute du mur, la famille s’installe à l’Ouest, dans la Ruhr. 

Son air sérieux vient de loin. Excellente élève, elle épouse un de ses condisciples, devenu pasteur, avec qui elle a quatre enfants et dont elle est séparée depuis. «Après un parcours scolaire sans faute et des études de chimie, Frauke Petry crée avec sa mère une PME familiale fabriquant des pneus en Saxe et distinguée par de nombreux prix avant la faillite de 2007», raconte Libération.
Frauke Petry lors d'une réunion à Munich (Mai 2016). (Lukas Barth / ANADOLU AGENCY)

Idéologie fluctuante
Idéologiquement, Frauke Petry s'est montrée fluctuante. Elle a un temps envisagé de rejoindre la CDU, le parti conservateur d’Angela Merkel. Mais elle a choisi d'adhérer à l’AfD, dès sa création en 2013. C'est alors un petit parti anti-européen et anti-euro qui progresse dans l'opinion en surfant sur l'idée que l'Allemagne paye pour les autres pays, la Grèce notamment.  

Elle en a pris la tête en 2015 et a transformé rapidement ce parti un peu terne, à la thématique anti-euro peu mobilisatrice, en machine de guerre surfant sur les questions liées à l'immigration. «Son fondateur, Bernd Lucke, a même claqué la porte du parti cet été, mis en minorité par Frauke Petry, encore plus à droite, et qui fait de la lutte contre l’accueil des réfugiés son cheval de bataille», indiquait Le Monde en octobre 2015.  

En pleine crise des réfugiés et après les incidents de Cologne, son discours prend. Surtout qu’elle n’hésite pas à provoquer, à la façon d'un Le Pen en France, allant jusqu'à justifier de tirer sur les réfugiés. Elle entretient aussi un certain flou sur sa position vis-à-vis du mouvement Pegida («Patriotes européens contre l'islamisation de l'Occident»).

«Une débâcle pour la chancelière»
Cette victoire dans le Land de Mme Merkel fortifie du coup sa position à un an des législatives. Elle met en lumière les doutes suscités dans l'opinon publique par la politique des partis au pouvoir (CDU, SPD) sur la question de l'accueil des migrants. 

Frauke Petry peut savourer sa victoire. «C'était plus qu'une petite élection régionale, c'était une élection sur Merkel : une tempête protestataire dans le nord-est a emporté la CDU qui a glissé derrière l'AfD. Une débâcle pour la chancelière», analyse Der Spiegel

Trois ans après sa fondation, son parti est désormais représenté dans neuf des 16 parlements régionaux et aborde la ligne droite vers les législatives de l'automne 2017 en position de force, imposant son discours anti-migrants et de rejet du bipartisme et des élites politiques au cœur du jeu politique.

Désormais, l'Allemagne n'apparaît plus comme une exception européenne, après avoir semblé être épargnée par la progression des partis nationalistes. Ce à quoi Marine Le Pen a semblé sensible.
 

Pourtant, la patronne de l'AfD récuse tout parallèle avec la présidente du FN. «Marine Le Pen polarise trop. Elle est d’extrême droite, elle va trop loin.» Et puis, Frau Petry, à la différence de Marine Le Pen, préfère un discours libéral au «socialisme» affiché par le FN. «Son programme économique est socialiste, alors que nous sommes libéraux», insiste-t-elle. Il est vrai qu’en Allemagne, nationalisme et socialisme sont des mots lourds de sens… 

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