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Allemagne: à Berlin, des statues et objets oubliés font revivre le passé

L'exposition «Berlin et ses monuments», à la citadelle de Spandau, dans la capitale allemande, témoigne de l'histoire tourmentée de l'Allemagne à travers de nombreuses statues et objets d'art. La commissaire de l'exposition a dû parfois se battre pour les récupérer, leur origine et leur emplacement étant parfois difficiles à retracer.
Article rédigé par Laura Martin
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
La tête, haute de 1m70, d'une statue en pierre de Lénine exposée à Berlin à la citadelle de Spandau. (John MACDOUGALL / AFP)

«On peut toujours mettre des monuments au rebut, mais pas l'Histoire elle-même.» Andrea Theissen, l'initiatrice de l'exposition Berlin et ses monuments, a décidé de faire revivre le passé allemand au cœur de la citadelle de Spandau grâce à des œuvres que l'on pensait perdues.
 
Statues déboulonnées, mises à l'écart, voire enterrées, qui ont auparavant façonné le paysage berlinois, font désormais partie d'une exposition permanente dans la capitale allemande, ouverte aux visiteurs depuis le 29 avril 2016.
 
Il y a une dizaine d'années, la commissaire de l'exposition Andrea Theissen s'est mise en quête de récupérer et de regrouper ces monuments éparpillés. Même la ministre de la Culture, Monika Grutters, a salué son travail. Ces monuments sont «le témoignage d'époques particulières, ils sont littéralement de l'Histoire gravée dans la pierre», a-t-elle souligné lors de l'inauguration.
 
Le retour de «L'Allée de la victoire»
L'exposition permet notamment de découvrir ce qui reste de L'Allée de la victoire. Cette artère du Tiergarten, un grand parc du centre de Berlin, bordée d'une centaine de statues, avait été conçue par l'empereur Guillaume Ier (1871-1888) pour affirmer la légitimité de son pouvoir.
 
Les figures de L'Allée de la victoire ont été abattues, après la Seconde guerre mondiale, par les Alliés qui souhaitaient supprimer tout symbole du militarisme allemand. Elles furent finalement enterrées près du château de Bellevue, actuelle résidence des présidents allemands.
 
De la période nazie, il y a peu de monuments dans l'exposition, car l'attention des dignitaires était surtout focalisée sur l'architecture. D'après le journal Irish Times, on retrouve toutefois une œuvre d'Arno Breker, le sculpteur préféré d'Hitler. La sculpture représente «un décathlonien bien proportionné», dans la droite ligne du culte du corps prôné par le régime nazi.
 
La conservatrice aimerait aussi récupérer des bas-reliefs d'Arno Breker, qui ornaient la chancellerie d'Adolf Hitler. Depuis 1989, on en avait perdu la trace… Jusqu'à ce que les sculptures refassent surface dans le hangar d'un particulier en mai 2015. Ces bas-reliefs étaient composés de deux majestueuses sculptures de chevaux comme on peut le voir sur ce tweet :
 
Selon le quotidien Bild, certains historiens d'art pensent que le bas-relief pourrait appartenir à la République fédérale d'Allemagne, en tant qu'Etat ayant succédé au IIIe Reich et à la RDA. Mais son ancien propriétaire n'est pas de cet avis et s'oppose à l'Etat allemand en justice.
 
Andrea Theissen a dû livrer d'autres batailles pour nourrir l'exposition, notamment concernant l'une de ses pièces les plus colossales: une tête de Lénine de 1,70 mètre et de 3,5 tonnes. Elle faisait partie d'une statue en pied de 19 mètres du leader de la révolution d'Octobre qui ornait une place de Berlin-Est.
 
Good Bye Lénine
A la réunification, la statue a été déboulonnée puis mystérieusement enfouie en plusieurs morceaux dans une forêt à l'extrême sud-est de la ville. L'article d'Irish Times relève qu'une équipe l'a découverte en septembre 2015.
 
«C'est évidemment une pièce particulière (...). Elle est bien sûr connue à travers Good Bye, Lenin!, même si la statue montrée dans le film est tout à fait différente de celle-ci», raconte Andrea Theissen.
 
Good Bye Lenin! raconte l'histoire d'un jeune Allemand qui tente de cacher la chute du mur à sa mère, après son réveil au bout de huit mois de coma. Le jour où elle finit par découvrir que la RDA n'existe plus donne lieu à une scène mémorable, que l'on peut voir sur la vidéo ci-dessous. Le buste d'une statue de Lénine, qui ressemble à celle exposée à la citadelle de Spandau, est transporté dans les airs :  

Lorsqu'elle met les pieds dehors pour la première fois depuis sa sortie de l'hôpital, elle assiste médusée à la fin de l'époque communiste, déboussolée, comme la statue après la chute du Mur.

Au milieu d'autres sculptures de la RDA, la tête de Lénine est aujourd'hui de nouveau visible à Berlin: couché sur le flanc, comme il l'était lorsqu'on est venu le déterrer. 

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