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Convention citoyenne pour le climat : "Aucune innovation majeure, la montagne accouche d'une souris" dénonce un avocat en droit de l'environnement

"Il faudra s'interroger sur le lobbying de certains à l'occasion de cette Convention citoyenne" qui a produit "un rapport sans du tout parler du nucléaire", déplore Arnaud Gossement, avocat spécialiste en droit de l'environnement, invité dimanche 21 juin sur franceinfo.

Article rédigé par franceinfo
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150 citoyens tirés au sort font des propositions pour lutter contre le réchauffement climatique au Conseil économique, social et environnemental (CESE). (TANGI JAILLET / MAXPPP)

La Convention citoyenne pour le climat, composée de 150 citoyens, continue dimanche 21 juin de rendre ses propositions pour lutter contre le réchauffement climatique. Emmanuel Macron doit ensuite recevoir le 29 juin les 150 participants de cette Convention et leur apporter de "premières réponses".

"Qu'il s'agisse de l'énergie, des déchets ou de la fiscalité, il n'y a aucune innovation majeure, il y a de grands oublis", comme la taxe carbone, pointe du doigt dimanche sur franceinfo Arnaud Gossement, avocat spécialiste du droit de l'environnement. Pour lui, "la montagne malheureusement accouche d'une souris".

franceinfo : C'est le gouvernement qui va décider in fine, qu'en pensez-vous ?

Arnaud Gossement : C'est un paradoxe. Cette Convention citoyenne aboutit à porter deux propositions qui ne sont pas celles des citoyens. L'une, la révision de l'article 1er de la Constitution, est une proposition d'Emmanuel Macron, qui a déposé à deux reprises un projet de loi pour le faire adopter par le Parlement, qui n'y est pas arrivé. Là, la Convention citoyenne propose d'une certaine manière au chef de l'État de reprendre sa propre idée, une idée d'Emmanuel Macron qui avait été insufflée par Nicolas Hulot et cette fois-ci de la proposer au référendum. La deuxième idée n'est pas non plus une idée de la Convention citoyenne, elle est portée par certains écologistes, pas par tous : celle sur la notion d'écocide. Donc c'est un paradoxe : à l'arrivée, les citoyens portent des idées qui ne sont pas les leurs. Alors qu'ils sont censés être représentatifs du pays, il y a une crainte que le pays ne les suive pas à l'issue du référendum. Ça laisse un goût d'inachevé.

Il n'y a pas eu de virage écologique, comme on pouvait s'y attendre ?

Il n'y a pas de révolution proposée dans ce rapport. La plupart du temps ce sont soit de la reprise de mesures existantes, par exemple sur la formation des ouvriers du bâtiment ou l'information du consommateur : tout cela existe déjà dans des lois. Ou alors, ce sont des voeux ou des adaptations de mesures existantes. Mais qu'il s'agisse de l'énergie, des déchets ou de la fiscalité, il n'y a aucune innovation majeure, il y a même de grands oublis. 

Il est quand même paradoxal que ce rapport qui porte sur l'énergie et le climat ne parle pas de la taxe carbone. Rappelez-vous, c'était quand même le sujet de colère des "gilets jaunes".

Arnaud Gossement, avocat spécialiste du droit de l'environnement

sur franceinfo

Idem pour le nucléaire, c'est fabuleux de réussir à produire un rapport sans du tout parler du nucléaire. Il faudra s'interroger sur le lobbying de certains à l'occasion de cette Convention citoyenne. Donc oui, la montagne malheureusement accouche d'une souris.

Est-ce que ce référendum va se transformer en piège pour Emmanuel Macron ?

Je ne pense pas. C'est une proposition que lui-même avait acceptée, défendue rappelons-le à deux reprises devant le Parlement. Il y a un risque de manipulation politique puisque cette campagne pour le référendum va avoir lieu peu ou prou aux mêmes dates que la campagne pour l'élection présidentielle, à un moment où, post-municipales, Emmanuel Macron est critiqué pour ne pas être suffisamment "écolo". Il a le moyen grâce à la Convention citoyenne d'apparaître sur la scène publique grâce à une proposition qui est la sienne, de faire campagne pour une proposition écologique. Est-ce que le fait de modifier l'article 1er de la Constitution va permettre de donner des moyens à notre administration, à notre police, à notre justice pour faire appliquer les lois de l'environnement ? Evidemment pas ! C'est-à-dire qu'on va encore perdre un an en débat. On a eu le grand débat national, la Convention citoyenne, derrière on va avoir le référendum. Malheureusement pendant ce temps-là, la planète se réchauffe et la biodiversité souffre. Il serait temps de passer à l'action.

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