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L'Uruguay vote la légalisation du cannabis

L'Uruguay est le premier pays à adopter la légalisation du cannabis. Pour l'organisation Régulation : "C'est un jour historique". Le Sénat uruguayen a approuvé, mardi 10 décembre, la loi régulant les usages du cannabis y compris l'usage récréatif.

Article rédigé par Agence AFP
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Des partisans de la loi sur la légalisation du cannabis manifestent devant le Parlement uruguayen, le 31 juillet 2013 à Montevideo (Uruguay). (PABLO BIELLI / AFP)

Le Sénat uruguayen a approuvé mardi soir la loi régulant la production et la commercialisation du cannabis, expérience sans précédent dans le monde allant plus loin que les initiatives lancées notamment aux Pays-Bas ou en Espagne.

A l'issue de 12 heures de débats, la loi a été approuvée par 16 voix sur 29, grâce aux seuls suffrages des sénateurs membres du Frente amplio (gauche, au pouvoir), dans la foulée des députés ayant déjà voté le texte en juillet. Si la constitutionnalité de la loi est confirmée, et après signatures des décrets d'application, sa mise en oeuvre n'interviendra au plus tôt qu'en avril 2014.

Cette loi unique au monde portée par le président Jose Mujica confère à l'Etat la mainmise sur la culture et la vente du cannabis à des fins récréatives, repoussant les limites des expériences menées dans les Etats américains du Colorado et de Washington, aux Pays-Bas ou en Espagne, qui autorisent ou tolèrent la production de cannabis dans un cadre privé.

L'annonce du vote a été accueillie par une salve d'applaudissements provenant des rangs du public alors que plusieurs centaines de partisans du texte en liesse étaient rassemblés aux abords du Palais législatif pour célébrer "le grand jour", dans une forte odeur de cannabis et de feux d'artifices, ont constaté des journalistes de l'AFP.

"C'est un jour historique", s'est immédiatement réjoui dans un communiqué l'organisation Régulation responsable, qui avait lancé plusieurs campagnes en faveur de cette initiative.

Un avis partagé par le sénateur du Frente amplio Alberto Couriel, qui a jugé dans l'hémicycle que l'"Uruguay se plaçait à l'avant-garde mondiale sur ce sujet".

"L'Uruguay vote cette loi dans la cadre d'une série (de textes) en faveur de la défense des droits" individuels, a-t-il ajouté, évoquant l'approbation ces derniers mois de la légalisation de l'intervention volontaire de grossesse ou du mariage homosexuel.

Présenté comme un moyen de lutter contre le narcotrafic, la dépendance aux drogues dures et un impératif de santé publique, ce texte vise également à en terminer avec une "grotesque incongruité juridique", selon les termes d'un sénateur : en effet, en Uruguay, l'usage de cannabis n'est pas puni, à l'inverse de sa culture et de sa vente.

"Il existe beaucoup de doutes. Et le doute est légitime, mais le doute ne doit pas nous paralyser pour emprunter de nouvelles voies face à un problème qui nous affecte", avait déclaré plus tôt le président Mujica, à une télévision locale.

Plus de 60% de la population rejette ce projet, critiqué par l'opposition, certains professionnels de santé et des pharmaciens.

La loi prévoit trois modes d'accès au produit: l'auto-culture, la culture dans des clubs de consommateurs et la vente en pharmacie, sous contrôle public (40 grammes maximum par mois). Toute publicité sera interdite et les cultivateurs ou consommateurs - des résidents obligatoirement majeurs - devront s'inscrire sur un registre national.

"C'est bien que l'on puisse acheter plus facilement (du cannabis), mais il est hors de question que je m'inscrive, on ne sait jamais où peuvent finir" ces données, avait déclaré au cours de la journée à l'AFP Juan Lopéz, 19 ans, interrogé dans le quartier du Parlement, résumant le sentiment d'une grande partie des consommateurs.

Le gouvernement, qui a lancé la semaine dernière une campagne sur les dangers de "toutes" les drogues, présente la loi comme un moyen de réduire les risques liés à la consommation de stupéfiants.

"La marijuana est la drogue illégale la plus consommée, majoritairement par des jeunes, qui ont une faible perception des risques et un accès facile" au produit, a ainsi justifié au cours des débats le sénateur Roberto Conde.

Le cannabis représente 70% de la consommation de drogues en Uruguay, et son usage s'est largement répandu ces 10 dernières années. Les autorités évoquent le chiffre de 128.000 usagers, contre 200.000 selon les associations de consommateurs.

L'idée de cette première mondiale a été lancée il y a un an et demi par le président Mujica, 78 ans, ex-guérillero torturé sous la dictature (1973-1985) élu fin 2009 à la tête de ce pays de 3,3 millions d'habitants et connu pour son pragmatisme et son style de vie modeste.

"La loi présente des défauts de forme et de fond", assurait toutefois lundi le sénateur du parti Colorado (opposition) Alfredo Solari, craignant "une plus grande disponibilité" (du cannabis) pour les enfants et adolescents.

Assurant mener une "expérience pour le monde", le chef de l'Etat avait appelé ce week-end la communauté internationale à appuyer l'initiative, étant déjà soutenu par un groupe d'ex-présidents latino-américains.

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