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Pour Lionel Zinsou, «ce que l'Afrique commence personne ne l'a jamais fait»
Le 18 juin 2015, Lionel Zinsou a été nommé Premier ministre du Bénin par le président Boni Yayi. Ce banquier franco-béninois, qui fut professeur d'économie à l'ENA et auteur des discours de Laurent Fabius, avait donné une interview à Géopolis le 6 février 2015, jour du lancement de la Fondation franco-africaine pour la croissance, voulue par François Hollande, dont il est l'architecte. Rencontre.
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L’Afrique change à grande vitesse, son décollage économique à commencé, portée par l’émergence d’une classe moyenne entreprenante. D’ici 2050, la population du continent aura doublé, ce qui en fera un marché de 2 milliards d'individus. La France entend s’inscrire dans cette dynamique en jetant les bases d’un partenariat renouvelé.
La France veut refonder ses relations avec l’Afrique. Pour quel nouveau partenariat ?
Les échanges entre la France et l’Afrique sont en croissance régulière, ainsi que les flux d’investissements directs dans les deux sens. Il n’y a donc pas de régression ni de table rase. En revanche, beaucoup d’autres partenaires, parmi les grandes économies émergentes (Chine, Brésil… NDLR), sont allés beaucoup plus vite. Il en est résulté une baisse tendancielle des parts de marché pour la France. Ce qu’il faut donc refonder, c’est l’analyse pertinente par les entreprises françaises de l’immense potentiel africain. Ce qu’il faut améliorer, c’est la visibilité en Afrique des offres françaises qui répondent bien aux besoins africains. La Fondation franco-africaine, c’est un réseau social de tous les acteurs qui veulent accélérer ensemble.
La France doit-elle sortir de son pré-carré francophone?
Le concept de «pré-carré francophone» est une représentation fausse : échanges et investissements de la France en Afrique sont dominés par le Maghreb, le Nigeria et l’Afrique du Sud. Par ailleurs, les réalités culturelles et linguistiques changent beaucoup plus vite que les mentalités : parmi ses 180 millions d’habitants, le Nigeria compte plus de locuteurs francophones que la majorité des pays dont la langue officielle est le français.
Qu’est-ce que la France et l’Afrique peuvent s’apporter ?
Des marchandises, des services, des technologies, des capitaux, de l’aide, des hommes enthousiastes et formés, de la sécurité, de l’amitié, du respect, de l’écoute et du partage. Désormais, les échanges entre la France et l’Afrique portent sur des objets de plus en plus similaires. L’échange café-coton-pétrole contre machines, verroteries, mobylettes… a vécu à l’ère du numérique.
L’Afrique peut-elle connaître un miracle économique «à la chinoise»? Quels sont les défis à l’émergence du continent africain?
Non, le miracle ne sera pas chinois ni indien. La révolution agricole ne sera pas plus européenne que mexicaine… La révolution démographique ne sera pas américaine…
Le miracle sera africain : la vitesse des changements économiques sera inégalée, comme on l’a vu dans les télécoms ou la finance. La crue humaine sera sans précédent. L’urbanisation, à l’échelle africaine, un milliard d’urbains supplémentaires en 25 ans, n’a jamais été testée sur aucun continent. Les risques environnementaux qui en résultent sont inconnus. Les tensions sur des sociétés en surchauffe n’ont pas d’analogue connu… Ce que l’Afrique commence, personne ne l’a jamais fait.
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