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La mort de Giulio Regeni sous la torture mine les relations Egypte - Italie

Une délégation de magistrats et policiers égyptiens se trouve à Rome pour rendre compte de l’état d’avancement de l’enquête sur la mort violente du jeune étudiant italien Giulio Regeni. Une mission délicate alors que des soupçons pèsent sur les services du président Sissi et que l’Italie reste mobilisée jusqu’à l’obtention de «la vérité vraie», selon l’expression du premier ministre Matteo Renzi.
Article rédigé par Alain Chémali
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Les Italiens mobilisés pour obtenir la vérité sur la mort au Caire de l'étudiant Giulio Regeni, ici à Milan le 2 mars 2016. (Federico Ferramola/NurPhoto)

Les autorités égyptiennes ont été prévenues par le Premier ministre italien en personne. «Nous nous arrêterons seulement à la vérité, la vérité vraie», a déclaré Matteo Renzi à propos de l’enquête en cours sur la mort d’un jeune étudiant italien au Caire.

Mission difficile pour une délégation de magistrats et policiers égyptiens 
Une délégation de deux magistrats et trois responsables de la police égyptienne se trouve en effet à Rome pour rendre compte de l’état de l’enquête en cours. Ils doivent déterminer les circonstances de l’enlèvement, le 25 janvier 2016 au Caire, de Giulio Regeni et de la découverte, dix jours plus tard, de son corps atrocement torturé dans un fossé de la banlieue de la capitale.
 
Agé de 28 ans, qu’il venait de fêter avec ses amis cairotes, Giulio Regeni était doctorant en économie à l’université de Cambridge en Angleterre. Passionné par le monde et la langue arabes, il effectuait une recherche en Egypte sur les syndicats indépendants apparus après la chute de Moubarak.
 
Quelques jours avant de disparaître entre son domicile, dans le quartier Doqqi, et le lieu d'un rendez-vous avec un ami, au marché de Bab al louk, situé à quatre stations de métro, il avait publié un article sur «une vague de grève dans tout le pays», sous le pseudonyme d’Antonio Drius.

Une autopsie qui révèle une mort sous la torture 
Son corps a été retrouvé à moitié dénudé, la nuque brisée et portant la trace de sévères sévices. «Des brûlures de cigarettes autour des yeux et sous la plante des pieds» entre autres, selon le rapport d’autopsie.

Manifestation devant l'ambassade d'Egypte à Rome, le 25 février 2016, après la découverte du corps de Giulio Regeni mort sous la torture au Caire. (FILIPPO MONTEFORTE/AFP)
 
Des éléments qui semblent accréditer le récit d’un anonyme parvenu par mail à la presse italienne ou celui publié par Omar Afifi, un officier égyptien, sur son compte Facebook, relatant dans le détail l’enlèvement, la torture et la mort du jeune Italien aux mains des services de renseignement militaires et de la sécurité nationale égyptienne.
 
Identifiée par ses parents, sa dépouille a été rapatriée. «Je ne vous dis pas ce qu’il lui ont fait. J’ai vu sur son visage tout le mal de ce monde», a témoigné sa mère Paola, il y a une semaine, assurant n’avoir reconnu que la pointe du nez de son fils.
 
Elle menace même de rendre publique une photo qu’elle a prise de lui à la morgue si l’enquête continue de piétiner.

Les multiples et invraisemblables versions du Caire
Pourtant, depuis plus de deux mois les versions des autorités égyptiennes se sont multipliées : accident de la route, crime crapuleux, règlement de compte,… toutes rejetées par les autorités italiennes.
 
Y compris la dernière selon laquelle la police aurait tué quatre membres d’un gang criminel, spécialisé dans l’enlèvement d’étrangers, et retrouvé chez l’un d’eux les effets personnels de Giulio Regeni.
 
Dans l’attente d’informations crédibles et malgré des relations jusque là sans nuages avec le Caire, les autorités italiennes ont sérieusement haussé le ton. «Nous n’accepterons pas de vérité fabriquée et nous ne laisserons pas piétiner la dignité de notre pays», a déclaré le ministre des Affaires étrangères Paolo Gentiloni..

 Si ce meurtre abominable, qui pourrait connaître un retentissement européen, empoisonne l’administration du président Abdel Fattah al-Sissi, ses conséquences embarrassent malgré tout l’Italie. Son groupe énergétique ENI vient de découvrir un immense gisement de gaz en Egypte.
 

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