Taxe carbone: principe salué, modalités contestées
Le socialiste Michel Rocard a remis mardi ses conclusions sur la Contribution-Climat-énergie (CCE)Le socialiste Michel Rocard a remis mardi ses conclusions sur la Contribution-Climat-énergie (CCE)
L'avenir de la taxe carbone, estimée entre 8 et 9 milliards d'euros, est désormais entre les mains de Nicolas Sarkozy. C'est lui qui décidera, sans doute cet autonome, des règles de sa mise en oeuvre.
De nombreuses questions restent en suspens notamment : qui va payer et combien ?
François Fillon l'a promis, la réflexion est désormais engagée. "Nous allons ouvrir un grand débat pour savoir quelles sont les modalités d'application de cette contribution énergie-climat, quel doit être son calendrier", a-t-il déclaré lundi à Leuglay (Côte-d'Or).
Le Premier ministre a annoncé que des consultations allaient à présent avoir lieu avec les ministères et les secteurs économiques concernés. "Il ne s'agit pas de se donner bonne conscience, il s'agit d'affronter une urgence collective et pressante en se donnant des moyens compatibles avec le développement économique et la croissance dans notre pays" a-t-il indiqué.
Interrogé mercredi sur France Inter, la ministre de l'Economie Christine Lagarde a estimé pour sa part qu'un "débat national n'a pas besoin de durer éternellement". "Dès lors qu'on en prend les moyens et qu'on rentabilise les énergies, on peut le faire (appliquer la taxe carbone, ndlr) dans des délais rapides".
La taxe carbone, dont le principe avait été arrêté par le Grenelle de l'environnement, devrait viser les énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon) sur la base de 32 euros la tonne de CO2 (puis jusqu'à 100 euros en 2030), pour anticiper la hausse à terme du prix du pétrole. Ce prix de 32 euros pourrait cependant être revu à la baisse, jugé "élevé" par rapport au prix du quota sur le marché européen (environ 12 euros), qui s'applique aux industries les plus énergivores.
Le PS favorable mais à certaines conditions
"Cette contribution doit être socialement juste et redistributive en direction des ménages géographiquement contraints à l'usage de la voiture" a indiqué dans un communiqué le parti socialiste. Elle "ne peut se substituer à la suppression de la taxe professionnelle ni être prétexte, comme le souhaitent les lobbies économiques déjà à l'oeuvre, à un transfert de charges des entreprises vers les ménages".Sur le premier point, Christine Lagarde a été claire. La mise en place de la taxe doit être "complètement déliée" de la réforme annoncée de la taxe professionnelle, a-t-elle déclaré mercredi lors d'une conférence de presse. "Il faut complètement délier les deux". "Vous avez d'une part un débat qui s'engage (...) sur la Contribution climat énergie, sur ses avantages et ses inconvénients, (...) et dont le cheminement, le volume, le pourcentage sont encore évidemment à discuter", a affirmé la ministre. "Et deuxièmement la réforme de la taxe professionnelle qui elle est engagée".
"Ce sont deux débats différents, deux projets qui n'ont rien à voir, sachant que tout cela doit se faire à prélèvements obligatoires constants : quand il y en a un qui monte il faut qu'il y ait autre chose qui baisse à côté", a encore expliqué Mme Lagarde.
La CGT aussi inquiète
"Nous sommes favorables au principe de la taxe carbone mais opposés à la façon dont elle devrait être mise en oeuvre par le gouvernement", a déclaré Jean Christophe Le Digou, secrétaire confédéral de la CGT, dans une interview accordée mercredi à Libération.
"Comme tout impôt indirect, elle peser plus lourd sur les ménages à faibles ou moyens revenus que ceux à revenus plus élevés". Prélever 32 euros par tonne de CO2 "c'est un impôt "injuste", a-t-il encore souligné.
Le MoDem préconise d'en faire un outil de sortie de crise
Pour la députée européenne Corinne Lepage, présidente du parti écologiste Cap 21 et vice-présidente du MoDem, si cette taxe est compensée "convenablement sur le plan social", "c'est une occasion absolument formidable de relancer de l'activité économique dans notre pays, de relancer de l'industrialisation sur les économies d'énergie et l'efficacité énergétique, ça peut être un accélérateur de sortie de crise".
"Je fais partie de ceux qui pensent qu'il faut (...) aider ceux qui sont les plus démunis d'abord à supporter le poids supplémentaire que cela représente, et surtout à pouvoir changer: changer de chauffage, changer de voiture, de manière à finalement abaisser sur la durée le coût supporté par le ménage", a indiqué l'ancienne ministre de l'Environnement.
L'énergie nucléaire doit être prise en compte
Pour l'association altermondialiste Attac, la consommation électrique doit être incluse dans l'assiette de prélèvement de la taxe carbone. "La production d'électricité d'origine nucléaire, outre les déchets nucléaires, est également émettrice de CO2", explique Attac. L'association critique en outre "l'exclusion de la contribution des entreprises les plus consommatrices d'énergie, déjà soumises à des objectifs de réduction dans le cadre du plan énergie-climat de l'Union européenne".
Par ailleurs Attac estime que "pour être efficace", une telle contribution "doit taxer les surconsommations des ménages les plus riches et les plus pollueurs et permettre aux ménages les plus démunis, ou à ceux qui subissent des contraintes de déplacement non substituables par des transports collectifs, de faire face au supplément de dépenses tout en s'engageant vers des comportements plus économes".
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