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La Commission sur l'avenir de l'Hôtel de la Marine a recommandé mardi 12 juillet que l'on en confie la gestion au Louvre

Dans son pré-rapport, elle décrit le prestigieux musée comme "partenaire privilégié de l'Etat" pour s'occuper de ce bâtiment du XVIIIe siècle, situé place de la Concorde à Paris.La commission a été mise en place par Nicolas Sarkozy pour apaiser la polémique sur le sort de l'édifice, en passe d'être confié à l'homme d'affaires Alexandre Allard.
Article rédigé par France2.fr avec AFP
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L'Hôtel de la Marine et la place de la Concorde à Paris (AFP - Hemis.fr - Gardel Bertrand)

Dans son pré-rapport, elle décrit le prestigieux musée comme "partenaire privilégié de l'Etat" pour s'occuper de ce bâtiment du XVIIIe siècle, situé place de la Concorde à Paris.

La commission a été mise en place par Nicolas Sarkozy pour apaiser la polémique sur le sort de l'édifice, en passe d'être confié à l'homme d'affaires Alexandre Allard.

Le chef de l'Etat avait demandé que lui soit remis avant l'été un rapport "sur la meilleure utilisation possible" de l'édifice, que l'état-major de la Marine nationale doit quitter en 2014. Un rapport complet doit lui être remis en septembre. Il doit prendre la décision finale à une date non précisée.

Pour étayer sa réflexion, la commission, présidée par Valéry Giscard d'Estaing, a auditionné les candidats à la reprise de l'hôtel de la Marine. Jusque là, le financier Alexandre Allard, proche d'Hervé Morin, alors ministre de la Défense, semblait bien parti pour l'emporter. Son objectif: transformer de fond en comble le bâtiment avec des galeries, notamment pour les métiers d'art, des résidences d'artistes, des marchands d'art, des espaces d'exposition, des fondations et des suites de grand standing pour attirer mécènes et collectionneurs. Il est assisté de l'ancien ministre UMP de la Culture Renaud Donnedieu de Vabres (officiellement conseiller de l'homme d'affaires "pour le développement, la stratégie et la culture"), et de l'architecte Jean Nouvel.

Premier signe, qui augure peut-être la décision élyséenne: le ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, a "salué" les premières orientations de la commission. Il s'est dit "particulièrement heureux" qu'elle envisage de confier au Louvre "un rôle éminent dans la gestion" du bâtiment historique.

"L'hôtel de la Marine appartient au peuple français"
Principe général retenu par la commission: "les immeubles qui ont abrité les activités souveraines du peuple français et qui présentent un intérêt historique et architectural majeur ne peuvent être ni vendus ni concédés. Le principe s'applique à l'Hôtel de la Marine", indique-t-elle dans un communiqué.

"L'Hôtel de la Marine appartenant au peuple français, il convient de lui restituer ces lieux en lui permettant d'y avoir accès. Ceci implique une large ouverture au public notamment celle du balcon dominant la Place" de la Concorde, indique la commission. Conséquence: celle-ci préconise "le maintien de l'ensemble du bâtiment dans le champ de souveraineté de l'Etat, selon un statut public à préciser".

"La Commission a écarté du champ de ses réflexions ceux qui reposaient sur une vente déguisée du bâtiment à des acteurs privés à objectifs purement financiers ou spéculatifs", lit-on dans son rapport.

"Pour la mise en oeuvre de ces principes, il apparaît que l'Etablissement Public du Louvre devrait être retenu comme partenaire privilégié de l'Etat, selon un statut à préciser", déclare la commission. "Il lui appartiendrait d'assurer la présentation au public, directement ou sous forme d'expositions temporaires, des objets d'art et des collections faisant partie du patrimoine national. Les galeries affectées à cette présentation prendraient le nom de 'Galerie du Trésor français'", indique le communiqué.

Le "statut" futur de l'Hôtel reste donc "à préciser". De fait, le bâtiment historique comprend de prestigieux salons. Mais aussi de grandes superficies de bureaux, convoités par le célèbre musée, et par divers organismes publics comme la Cour des comptes... Certains espaces pourraient être loués selon un cahier des charges précis.

Réaction du côté d'Alexandre Allard
"Ce qui m'a interpellé, c'est qu'il n'y a pas une ligne sur la restauration nécessaire du lieu. Aujourd'hui, 350 m2 ont été restaurés, il faut donc trouver quelqu'un - l'Etat en l'occurence - pour restaurer 23.650 m2", a expliqué Renaud Donnedieu de Vabres, le conseiller d'Alexandre Allard, après la publication du pré-rapport de la Commission sur l'avenir de l'Hôtel de marine.

"Qui va financer les 200 millions d'euros - qui sont la moitié du budget annuel du patrimoine du ministère de la Culture - pour la restauration du lieu ?", s'est-il interrogé. L'ancien ministre a aussi mis en garde contre une "découpe"du lieu. "L'unité du bâtiment classé monument historique, sa cohérence, ne sont pas respectées", a-t-il déploré.

Le 28 juin, l'homme d'affaires avait vigoureusement défendu son projet, intitulé "La Royale", présenté comme "un grand écosystème de la création". Lequel ferait de Paris "un centre artistique effervescent" au lieu d'"une ville musée".

Protestations et pétitions
Situé place de la Concorde à Paris, l'édifice, classé monument historique depuis 1862, raconte deux siècles d'histoire. C'est là que fut signée la condamnation de Louis XVI, guillotiné sous ses fenêtres, comme Marie-Antoinette. L'hôtel particulier loge depuis 1789 l'état-major de la Marine.

Un appel à projets en vue de "l'occupation, la mise en valeur et l'exploitation" de l'édifice, occupé par l'état-major de la Marine jusqu'en 1994, avait été lancé fin novembre 2010.

Historiens et amoureux du patrimoine ont alors tiré la sonnette d'alarme. Une des pétitions avait d'ailleurs été signée par l'ex-président de la République Valéry Giscard d'Estaing.

Plusieurs historiens et intellectuels, dont Régis Debray et Pierre Nora, avaient également publié dans Le Monde une vibrante tribune pour défendre l'Hôtel de la Marine : "Quiconque éprouve encore un minimum de respect pour le passé national, pour les pierres chargées de symboles et d'une histoire qui touche tous les Français, ne peut qu'être révulsé à l'idée que l'hôtel de la Marine soit alloué (...) sans protestation aucune, affermé, disons le mot aliéné à un groupe financier international, Alexandre Allard, pour, derrière la façade inchangée, en faire un Barnum commercial assorti de suites de luxe".

A l'intérieur de l'Hôtel de la Marine... (AFP - Thomas Coex)

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