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Le directeur de La Scala Paris, Frédéric Biessy, ouvre son nouveau théâtre à Avignon : "C'est un superbe lieu chargé d'histoire"

Le 7 juillet, La Scala Provence ouvre ses portes pour la première fois. Ce nouveau lieu avignonnais participera au Off du festival d'Avignon. Nous avons posé quelques questions à son fondateur, Frédéric Biessy. 

Article rédigé par franceinfo Culture - Jérémie Laurent-Kaysen
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
Mélanie et Frédéric Biessy dans une des salles de la Scala Provence, à Avignon, en 2022.  (THOMAS O'BRIEN)

Le restaurant de La Scala Paris est plongé dans une étrange lumière bleue. L’ambiance est tamisée et les quelques personnes attablées déjeunent calmement, sur des airs de Daniel Balavoine. Dans une chemise assortie aux lieux, des lunettes rectangulaires sur le bout du nez, Frédéric Biessy, directeur et fondateur de cette salle de spectacle, nous retrouve autour d'un café. D’ici quelques jours, son théâtre parisien fêtera la naissance de sa petite soeur : La Scala Provence, à Avignon. Elle investit les lieux de l'ancien cinéma d'Avignon, Le Capitole, fermé depuis 2015.

Après six mois de travaux, ce nouveau théâtre va vivre son baptême du feu en participant au Off du festival de théâtre avignonnais. Au total, quatre salles de tailles différentes accueilleront le public : la plus grande fera 600 places et la plus petite soixante. Frédéric Biessy nous en dit plus. 


Comment est né le projet Scala Provence ? 
Frédéric Biessy : La Scala Provence est née d’un coup de coeur. Nous avons profité de la pandémie pour transformer notre salle de répétition à La Scala Paris en petite salle de spectacle pour accueillir les artistes émergents. Il nous fallait donc un nouveau lieu pour répéter. Des amis nous ont dits, à ma femme, Mélanie, et moi, qu’ils venaient de visiter le cinéma historique d’Avignon, Le Capitole. Ils étaient certains qu'il allait nous plaire. Quand on est entré dans le lieu, on en est tombé aussi rapidement amoureux que lorsque nous avons visité les locaux de la Scala Paris. Un mois plus tard, nous avons signé et commencé les travaux. Tout est allé très vite.

La Scala Paris est aussi un ancien cinéma… Vous avez un certain attrait pour les salles de projection !
Un peu, oui ! (rires). En vérité, notre théâtre parisien n’était pas un cinéma lors de sa construction. Il date de la fin du 19e siècle. Le Capitole d’Avignon a été construit en 1930 pour être un cinéma. Pourtant, il a été pensé comme un théâtre : il y a un orchestre, deux balcons… Plus tard, ces espaces ont été séparés pour faire plusieurs salles. Lorsque nous avons commencé nos propres travaux, nous nous sommes rendu compte que tout le bâtiment reposait sur une structure Eiffel ! On a retrouvé des ferronneries aussi, du granito d’origine… Cinéma ou pas, c’est avant tout un lieu magnifique, chargé d’histoire !

Avec sa salle de 600 places, ce théâtre devient le plus grand du centre-ville d’Avignon. Mais n’avez-vous pas peur que ce théâtre soit un théâtre de plus ?Non, ce ne sera pas un théâtre en plus. Premièrement, à cause de son histoire : les Avignonnais sont très attachés à cet ancien cinéma. Le chef d’une des entreprises que nous embauchons sur le chantier nous a dit qu’il était venu voir son premier film, Le Titanic, dans cette salle, il y a plus de cinquante ans. Nous avons plein d’anecdotes comme celle-ci. C'est un lieu de mémoire ! Deuxièmement, La Scala Provence à une programmation très variée : cirque, théâtre, concert, danse… Tout se mélange. Aujourd’hui, le festival Off d’Avignon s’est vraiment recentré sur le théâtre, il n’y a plus beaucoup d’autres disciplines artistiques. Dans notre théâtre, il y aura de toute, même des expositions.

Dans votre programmation, on retrouve Une Histoire d’amour, d’Alexis Michalik, La Machine de Turing de Benoit Solès (qui a démarré à Avignon)… Des classiques de La Scala Paris. Il y aura aussi des nouveautés ?
Si on regarde la programmation en détails, on se rend compte qu’il y a 31 spectacles par jour. Sur tous ces spectacles, seulement cinq ont déjà été joués à La Scala Paris. Alors, bien sûr, ils sont dans la grande salle donc ils attirent plus le regard. Mais derrière, il y a beaucoup de nouvelles créations, d’émergence. Alexis Michalik n’a jamais joué Une Histoire d’amour au festival, contrairement à ce qu’on pourrait croire. Quand il m’a dit qu’il voulait le faire cette année, je ne pouvais pas lui dire d’aller la jouer dans un autre théâtre. Si vous partez en vacances avec vos enfants, vous ne leur dites pas d’aller dormir chez le voisin…

Alexis Michalik est lié aussi au théâtre des Béliers d'Avignon. Votre implantation dans cette ville ne va-t-elle pas créer des tensions avec les autres théâtres alentours ?
Non, pas du tout. Il est vrai qu’Une Histoire d’amour devait au départ être jouée aux Béliers en 2020, mais ça a été annulé à cause du Covid. Alexis est quelqu’un de très clair, il a expliqué au théâtre des Béliers cette décision de finalement faire ses représentations dans notre salle de spectacle. De toute façon, Alexis choisit ses théâtres en fonction de ses créations. Edmond n’a rien à faire à La Scala, par exemple. Une Histoire d’amour, en revanche, peut difficilement être mieux représentée qu’ici.

Que deviendra La Scala Provence le reste de l’année ?
Ce sera un lieu de résidence, un studio d’enregistrement et une salle de spectacle. L’ouverture de ce théâtre marque aussi la création de la Scala Musique, notre label. Nous avons équipé les salles de spectacles d’un système de son immersif. Chaque salle aura sa propre ambiance sonore. Cet aménagement nous permettra d’accompagner des artistes émergents du début à la fin : ils pourront enregistrer leur disque dans les meilleures conditions, avec tout le temps qu’il leur faudra et en plus, ils auront au moins cinq concerts garantis dans nos salles de spectacle. Je veux que les artistes aient envie de venir dans ce lieu parce qu’ils s’y sentent bien, parce qu’il leur donne envie de créer. Mon plus grand plaisir serait que deux résidences se croisent et qu’un projet commun naisse de cette rencontre. Ce serait vraiment dingue.

Comment allez-vous sélectionner ces compagnies émergentes ? Les résidences seront-elles payantes ?
Les projets qui seront programmés à la Scala Provence seront d’une part des résidences d’artistes dans le cadre d’enregistrements de disques qui donneront lieu à des concerts de sortie de résidence dans le cadre de notre label Scala Music. Pour ces résidences il n’y aura pas de location de salle seulement une participation aux frais et éventuellement des avant-premières pour les Avignonnais.  Pour le reste de la programmation les projets sont choisis par nos conseillers éditoriaux dans le cadre de notre programmation Scala et aussi en dehors. La Scala est un projet philanthropique : je ne veux pas que ce soit une maison de production verticale. On veut que ce lieu nous soit dérobé par les artistes, qu'ils en fassent leur antre. Avec ma femme, nous choisissons des endroits de rêve, de charme pour leur permettre de créer dans de bonnes conditions. Dans La Scala Provence, il y a des logements, une grande cuisine avec une cuisinière toute l'année. Les compagnies pourront vivre quasiment en autarcie si elles le désirent.

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