Cet article date de plus de huit ans.

Réforme du droit du travail : pourquoi ils ont signé la pétition

La pétition lancée sur internet contre l'avant-projet de loi réformant le Code du travail bat des records, et pourrait approcher le million de signatures dans les prochains jours. Nous avons recueilli les témoignages de plusieurs signataires.

Article rédigé par Benoît Zagdoun - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
La page de la pétition contre le projet de réforme du droit du travail sur le site Change.org, photographiée le 1er mars 2016. (JOEL SAGET / AFP)

Plus de 900 000 signataires. La pétition, lancée sur la plateforme Change.org, contre le projet de réforme du Code du travail porté par la ministre Myriam El Khomri, a engrangé un nombre de soutiens records en seulement deux semaines. Salarié, électeur de gauche déçu, fonctionnaire, retraité, syndicaliste, avocat... Vous avez confié à francetv info les raisons pour lesquelles vous dites, comme Caroline de Haas, qui a lancé la pétition :  "Loi Travail : non merci !"

"Mon ennemi : c'est la finance, qu'il disait"

@Sebnilsson : "J’ai voté pour François Hollande afin qu’il applique une politique de gauche. (...) Quand une pétition réunit plus de 800 000 signatures contre 10 000 pour la pétition opposée, c’est qu’il y a un gros problème entre les Français et les gens qui les représentent. On ne peut pas gouverner contre le peuple, même si celui-ci a tort. Etre légitime (et je ne conteste pas la légitimité de François Hollande), ça ne veut pas dire avoir raison. Il y a beaucoup d’arrogance et de mépris à vouloir imposer une philosophie du travail régressive contre une immense majorité de citoyens."

@JCHD : "590 milliards d'euros l'ensemble des avoirs français dissimulés dans les paradis fiscaux. Entre 60 et 80 milliards d'euros annuels, c’est le montant de la fraude fiscale. Et notre 'gouvernement de gauche' ne trouve que la baisse de l'indemnité légale prud'homale en cas de licenciement illégal pour sauver la patrie ! A vomir... 'Mon ennemi : c'est la finance', qu'il disait."

@DCJL : "J'ai voté pour un gouvernement de gauche, pas pour un gouvernement qui fait un copier-coller des revendications du Medef."

@Ley : "C'est une loi injuste C'est une loi de droite."

"On ne balaie pas un siècle d'acquis sociaux d'un revers de main"

@Kathouchka est "révoltée" : "J'ai signé car je suis de gauche. Mes arrière-grands-parents communistes ont lutté pour les congés payés, mes grands-parents pour les acquis sociaux, ma mère pour le féminisme... Et tout cela est réduit à néant par ce recul digne du XIXe siècle ! La flexibilité va créer plus de précarité ! Où est le million d'emplois promis par le Medef, après les jolis cadeaux du gouvernement Valls ? (...) C'est insupportable d'être socialiste et de voir ces réformes antisociales !"

@anonyme : "J'ai signé car je suis professeur de lycée professionnel et que mes élèves vont subir de plein fouet cette loi indigne de la gauche et des combats passés. Le contrat d'entreprise ne peut se substituer à la loi, aux combats menés depuis 1910. On ne balaie pas un siècle d'acquis sociaux d'un revers de main. On ne peut pas laisser les pleins pouvoirs au patronat. Voilà pourquoi j'ai signé et pourquoi je ferai grève !"

"Un désengagement de l'Etat", "contraire aux valeurs de la République"

@anonyme : "Je suis de gauche. Je ne l'ai pas toujours été. Jusqu'à mes 25 ans, ma conscience politique était quasi nulle. Et puis j'ai compris peu à peu que, même si la lutte des classes n'existe plus, il y a deux France : une France riche (...) et une France modeste (sans oublier les très pauvres). Le capitalisme et le libéralisme créent la richesse et c'est très bien. Mais l'Etat doit réguler tout ça et protéger les individus contre les dérives. Ce projet de loi est un désengagement de l'Etat dans ses missions de protection des salariés."

@Mounette la détente : "Les propositions de réforme du Code du travail constituent une remise en cause profonde des protections des salariés, faisant de la négociation d’entreprise le niveau prioritaire (...). Elles conduisent à une inversion de la norme au détriment des conditions de travail et de rémunération des salariés. Elles visent à dédouaner l’Etat de sa responsabilité et à transférer la responsabilité sociale de l’entreprise qui relève de l’employeur vers les salariés et leurs élus. La loi garantit l’intérêt général. A l’inverse, prétendre vouloir adapter le Code du travail à l’entreprise reviendrait à avoir un éclatement du droit du travail, à son émiettement, en autant d’entreprises en fonction de la taille ou de la situation du salarié. (...) Cela mettrait surtout en péril le principe d’égalité des salariés devant la loi. C’est contraire aux valeurs de la République."

"Le Code du travail doit rester un texte de protection des salariés"

@Louise Michel a signé la pétition contre cette réforme "parce que c'est la disparition complète du Code du travail qui serait actée, parce que ces textes ne sont pas faits pour défendre les salariés, mais pour permettre aux patrons de licencier plus facilement, de diminuer les primes de licenciement, de permettre de travailler jusqu'à 12 heures consécutives, dont 10 heures pour les apprentis, etc... Aménager les lois en fonction d'une entreprise alors que le Code du travail concerne tous les salariés, quels qu'ils soient, est, pour tout le monde, une régression totale du droit du travail."

@JPL : "C'est simple. Le Code du travail doit rester un texte de protection des salariés. Ceux qui pensent que le droit du travail se négocie entreprise par entreprise sont des naïfs qui ne connaissent rien au monde de la petite entreprise. (...) Quelle mouche a piqué ces Valls, Macron, Hollande ? En résumé, pour moi : 'Pas touche aux accords de branche'."

@anonyme : "Je suis presque à la retraite, mais je ne peux accepter que l'on puisse attenter aux droits des ouvriers, alors qu'on sait pertinemment que cela ne créera pas d'emplois. Comme toujours, le patronat prend les sous, mais ne rend rien !"

@Caroline a signé la pétition "parce que limiter les indemnisations prud'homales en cas de licenciement abusif à 15 mois de salaire maximum facilitera les plans sociaux pour les salariés les plus expérimentés et les plus fragiles, car [ce sont] les plus âgés. Or on sait que les chômeurs de plus de 50 ans ont énormément de mal à retrouver un emploi. Ces salariés ont passé leur vie dans la même entreprise et n’ont donc pas d’autre expérience du milieu du travail."

@Sham : "Elu CFDT, secrétaire de CE, délégué syndical, je pratique au quotidien le Code du travail, que ce soit pour la défense des cas individuels, comme dans les problématiques collectives. Il faut dire que le code actuel n’est pas la panacée et faire respecter les droits des salariés est déjà très difficile. Avec l’inversion de la hiérarchie des normes, la loi ne sera plus le socle minimal de protection, ce seront les accords d’entreprises. Autant dire que rapidement, le dumping social pourra s'organiser. L'entreprise concurrente a augmenté son temps de travail, baissé les salaires, on n'a plus qu'à faire pareil si on veut rester compétitif. A chaque variation de charges, on augmentera les horaires de travail. (...) Il faudra un accord, impossible à obtenir avec les syndicats majoritaires, on utilisera un référendum agrémenté d’un bon chantage à l’emploi... Je n’ai pris que quelques exemples."

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.