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"On est 50 internes, il en faudrait le triple" : en Grèce, l'hôpital est à bout de souffle

Alors que la Grèce retrouve son autonomie financière, l'hôpital public est en souffrance après des années d'austérité. Les médecins dénoncent le manque de moyens humains et matériels.     

Article rédigé par Isabelle Raymond
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Les médecins de l'hôpital Agios Savas d'Athènes dénoncent le manque de moyens  (ISABELLE RAYMOND / RADIO FRANCE)

A l'hôpital Agios Savvas dans le centre d’Athènes, le docteur Lisecatu fait la tournée de ses patients. Alors que ses camarades de promo sont partis exercer à l'étranger, elle a choisi de rester en Grèce. "Aujourd’hui, je suis d’alerte dans cinq unités différentes à cause du manque de médecins, raconte-t-elle. Beaucoup d’anciens sont partis à la retraite. Ceux qui restent n’ont pas le temps de nous apprendre à travailler car ils ne sont pas assez nombreux. Nous non plus d’ailleurs. On est 50 internes. Il en faudrait le triple." 

Depuis huit ans, les plans d'aide s'enchaînent en Grèce et lundi 20 août, Athènes tourne officiellement la page de cette mise sous tutelle. Le pays a obtenu 274 milliards d'euros en échange de centaines de réformes et de plusieurs plans d'austérité drastiques. Les réductions de dépenses publiques sont énormes dans le secteur de la santé. 

Un manque de médecins et de matériel

Un tract circule dans l’hôpital Agios Savvas pour dénoncer le manque de médecins dans le secteur public. Mais ce n’est pas le seul problème."On fait des économies sur tout. C’est vrai pour le matériel qui sert à faire les points de suture par exemple, c’est vrai aussi pour les médicaments ou la chimiothérapie, estime le docteur Lisecatu. Du coup, les hospitalisations se prolongent puisque les traitements et le matériel sont de mauvaise qualité et entraînent des complications. Ce n’est vraiment pas bon pour les patients."

Une machine très coûteuse, de plus d'un million d'euros vient d'arriver dans l'unité de radiothérapie. Elle a été financée par un donateur privé. Une plaque à son nom le rappelle chaque jour aux patients et au personnel.

Dans son bureau du troisième étage, le professeur Evangelos Filopoulos, se désole de devoir en arriver là. "Beaucoup d’hôpitaux publics sont criblés de dettes, explique le professeur. Ici au moins, on a de la chance car de riches patients grecs qui se font soigner dans cet hopital financent l’achat des machines les plus chères: celle de radiothérapie, de diagnotic et celles des blocs opératoires."  

L’hôpital rogne sur tout : le matériel, les salaires des médecins... Le mien a été divisé par deux.

Le professeur Evangelos Filopoulos

Pour être parfaitement honnête, le professeur Filopoulos pense aussi que la cure d’austérité imposée au système grec de santé a eu quelques effets positifs. "Il y a désormais un achat rationnel des médicaments et beaucoup moins de fraude. C’est du à davantage de contrôles et à un système de santé informatisé. Avant la crise, nous avions un système informatique primitif. Nous étions en partie responsables de ce qui nous arrivait."  

A 66 ans dont plus de la moitié au sein de ce service de cancérologie, le professeur Filopoulos a décidé d’enlever définitivement sa blouse bleue élimée. Non pas pour partir à la retraite mais pour ouvrir un cabinet privé.

En Grèce, l'hôpital est à bout de souffle : le reportage à Athènes d'Isabelle Raymond

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