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Y-a-t-il un pilote dans le simulateur ?

REPORTAGE | Pour les passionnés d'aviation ou les néophytes, plusieurs entreprises proposent des simulateurs de vol en France. Très réalistes, ils permettent de se mettre dans la peau d'un pilote de ligne, même si les simulateurs des compagnies aériennes coûtent bien plus cher. A Strasbourg, pour la première fois en Europe, un simulateur propose de prendre les commandes d'un Boeing 777. France Info est monté à bord.
Article rédigé par Clara Beaudoux
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Franceinfo (Franceinfo)

Un vol Innsbruck – Salzbourg pour s'initier. Assis dans le cockpit
du Boeing 777, avec un écran à 220°, la tête dans les nuages, on en oublierait presque qu'on est au cœur
de l'aéroport d'Entzheim, à une dizaine de kilomètres de Strasbourg. François,
60 ans, néophyte mais passionné de sensation forte, passe la porte grise
derrière laquelle l'attend le simulateur, premier du genre en Europe à
reproduire un cockpit de Boeing 777. Il prend les commandes pour une vingtaine
de minutes, les stages peuvent durer de 30 minutes à trois heures.

Le mal de l'air à bord du simulateur

A ses côtés, un instructeur, pilote professionnel, lui
décrit d'abord l'ensemble des très nombreux boutons et écrans qui entourent le
pilote. "Si des lumières sont jaunes ou rouges c'est que ça ne va
pas
", explique Steve, l'instructeur. Jusqu'ici c'est assez facile. Mais viennent
ensuite une somme d'informations à retenir, comment mettre les gaz, sortir le
train d'atterissage, naviguer une fois en vol, etc. On découvre par exemple que le manche
ne sert à piloter l'avion qu'une fois dans les airs, au sol il se conduit avec
les pieds.

L'objectif est pédagogique : "On ne veut pas faire de
l'arcade de jeux vidéo
", indique le fondateur de Flight Adventures, Gilles
Grégoire, passionné d'aéronautique, qui a importé le concept du Canada pour l'installer à Entzheim depuis environ un an. "Lorsqu'on met en virage la machine, on a véritablement
l'impression que la cabine est en virage, au point que certains ont parfois le
mal de l'air dans la cabine
", raconte le fondateur. 

En théorie, 20.000 aéroports possibles

Alors que l'apprenti pilote a les yeux rivés sur les écrans du cockpit, les passagers (deux places à l'arrière) peuvent
eux admirer le décor qui défile. Et quel décor ? Les pilotes ont le choix de
leur destination. "Théoriquement on a tous les aéroports de la planète, le
777 peut lui atterrir sur environ 20.000 aéroports
", mais en pratique
l'entreprise propose des scénaris pré-établis, le temps de préparation sur les
logiciels risquant de trop raccourcir la durée du vol. "Mais si une personne
vient avec une destination en tête c'est possible
", indique Gilles
Grégoire.

Parmi les scénaris les plus demandés, celui de l'ancien aéroport de Hong
Kong,  Kai Tak : "C'est une procédure
assez particulière et dangereuse car toute la finale se faisait au-dessus et
entre les buidlings
", explique Thierry, ancien pilote de chasse de l'armée
et instructeur dans le simulateur.

Les simulateurs des compagnies aériennes bien plus chers

Dans le simulateur le ciel est calme, pas de perturbation à l'horizon. Peut-on
simuler un crash ? Peut-on choisir un des aéroports les plus dangereux de la
planète
?
"Ce n'est pas dans l'esprit de ce que l'on veut faire ", répond le
fondateur. Lorsqu'au moment du décollage on propose de dévier de la piste vers l'herbe,
l'instructeur répond que cela risquerait de casser le train d'atterrissage, et
que dans ce cas le simulateur ne fonctionnerait plus (il faudrait alors
relancer le programme). On est donc bien là dans un loisir pour grand public,
loin des compagnies aériennes qui elles profitent au contraire des simulateurs
pour tester les pires situations et pannes possibles.

Dans les compagnies, les simulateurs ne sont pas les mêmes,
ils sont fixés sur des verrins électriques, qui permettent de faire bouger
l'appareil. Ils servent à la fois en période de formation des pilotes mais
aussi tout au long de leur carrière. "Quatre fois par an, on passe dans le
simulateur, deux fois pour s'entraîner et deux fois pour être contrôlé, pour
vérifier en permanence qu'on est au niveau de sécurité demandé à la fois par la
compagnie et par l'autorité de l'aviation civile
", explique Antoine
Godier, pilote chez Air France et chargé de communication au SNPL (Syndicat
national des pilotes de ligne).

"La simulation de vol c'est quelque chose qui fait rêver quand on n'est pas confronté au jour le jour à cet outil" (un pilote du SNPL)

Certaines compagnies proposent d'ailleurs des stages dans
leurs simulateurs, lorsqu'ils ne sont pas utilisés par leurs pilotes. Une manière
de rentabiliser des appareils très coûteux, "plusieurs dizaines de
millions de dollars
", explique Antoine Godier, pilote chez Air France,
contre environ 400.000 euros pour celui de Flight Adevtnures. Du coup les stages n'ont pas le même prix : une heure ici coûte déjà 199 euros, contre
1.500 euros par heure dans un "Full Flight", véritable simulateur
d'une compagnie.

Le pilote du SNPL avoue également que le côté ludique s'estompe avec
les années : "La simulation de vol c'est quelque chose qui fait rêver
quand on n'est pas confronté au jour le jour à cet outil, le simulateur de vol
pour un pilote de ligne c'est éventuellement l'endroit où on va lui dire qu'il
n'est plus compétent ou en tous cas qu'il a besoin de se réentraîner, donc ça
devient assez rapidement quelque chose de pas spécialement festif
".

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