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Formule 1 : après 20 ans et 350 courses, "l'Iceman" Kimi Räikkönen tire sa révérence

Le pilote finlandais a abandonné au 27e tour de son dernier Grand Prix de Formule 1, dimanche, à Abu Dhabi.

Article rédigé par franceinfo: sport - Maÿlice Lavorel
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
Kimi Räikkönen dans le paddock en marge du Grand Prix du Qatar, à Losail, le 19 novembre 2021. (XAVI BONILLA / DPPI via AFP)

Au moment où il a traversé la salle pleine, plongée dans l'ombre, entouré par sa femme et ses deux enfants, difficile de dire ce qui est passé par la tête de Kimi Räikkönen. De l'émotion, certainement, du soulagement, sans doute, une pointe de regret, peut-être. Ce 26 novembre, c'est toute une écurie qui a célébré son pilote. Depuis Hinwil, dans le canton de Zurich, où l'équipe est basée, Alfa Romeo a organisé une soirée hommage au Finlandais, avant les deux dernières courses de la saison. Et de sa carrière.

Le Finlandais a annoncé le 1er septembre 2021 que cette saison serait sa dernière. À l'issue du dernier weekend de course à Abu Dhabi (où il a abandonné au 27e tour en raison d'un ennui mécanique), il prendra sa retraite et s'éloignera du paddock, 20 ans après y avoir posé le pied pour la première fois. C'était en 2001, il y a une petite éternité, pour sa première saison avec Sauber.

Légende de la discipline

L'annonce en soi n'a pas surpris grand monde. À 42 ans, Kimi Räikkönen était plus près du crépuscule que de l'orée de sa carrière. "Je pense que c'était la bonne décision pour lui, parce qu'il se connaît. Faire ça pendant 22 ans, ça demande un engagement total", soulignait Frédéric Vasseur, son directeur d'écurie depuis 2019 chez Alfa Romeo. Le Finlandais ne se voyait sans doute pas remettre le couvert pour un an et 23 courses de plus. Mais il faut quand même apprendre à accepter la nouvelle. "Ça fait toujours quelque chose quand une légende du sport arrête", souffle Théo Pourchaire, pilote de développement de l'academy et engagé en Formule 2 chez ART Grand Prix.

Kimi Räikkönen est une légende de la Formule 1. De celles qui s'apprécient d'abord en chiffres. Dix-huit saisons et 350 courses disputées, 103 podiums, 21 victoires. Et un titre de champion du monde, surtout, en 2007, qui l'a fait basculer dans une autre dimension. "C'est un champion du monde, il n'y en a pas beaucoup", commente sobrement Frédéric Vasseur.

Kimi Räkkönen aux côtés de Michael Schumacher lors de la photo de fin de saison avant le Grand Prix du Japon 2003, à Suzuka, le 12 octobre 2003. (TORU YAMANAKA / AFP)

Son amour du sport automobile est né pendant son enfance, au côté de son frère aîné. Ils découvrent la course chez un ami de leur père et tombent sous le charme. Le jeune Kimi s'inscrit aux compétitions de karting, puis passe aux monoplaces.

Son ascension est fulgurante, et à 21 ans, après une saison seulement en Formule Renault britannique, il rejoint Sauber et le grand monde de la Formule 1. "C'est un gamin qui est arrivé en F1 hyper tôt, après une année de course automobile, et à cette époque-là, ce genre de trajectoires n'existait pas", se souvient Frédéric Vasseur. "Ça a été un extraterrestre quand il est arrivé, les gens d'habitude faisaient cinq, six ans de monoplace, lui, il n'en a fait qu'une."

Un caractère atypique dans le paddock

Kimi Räikkönen est surtout un personnage qui détone dans le paddock. Il a poussé à l'extrême l'image du Finlandais froid, distant et calme, jusqu'au surnom dont il a été affublé, "Iceman". "On va se souvenir de lui parce qu'il est très silencieux, c'est l'Iceman", raconte Théo Pourchaire. 

Interrogés sur la nouvelle en conférence de presse aux Pays-Bas, Sebastian Vettel et Daniel Ricciardo avaient assuré, mi-sérieux mi-moqueurs, que ce qui leur manquerait le plus chez Kimi Räikkönen, c'est son silence. "Il s'exprime très peu, il est très timide, contrairement à ce qu'on imagine, et souvent il cache sa timidité derrière l'image qu'il se donne de quelqu'un de fermé. Mais c'est plutôt qu'il n'aime pas parler", abonde Frédéric Vasseur.

"Il ne raconte jamais de conneries, il ne se raconte jamais de conneries à lui-même non plus. Il va très directement aux points qui vont ou qui ne vont pas dans les réunions techniques. Sur ça, c'est facile de travailler avec lui."

Frédéric Vasseur

à franceinfo: sport

Pour les autres pilotes, et la jeune génération en particulier, il incarne l'un des plus grands accomplissements de la discipline. "Il a réussi quelque chose que je rêve de faire, que tout le monde rêve de faire je pense, c'est d'être champion du monde de F1, et en plus d'être champion avec Ferrari", affirme Théo Pourchaire. "Ferrari, c'est la plus grande écurie de Formule 1, la plus emblématique, il n'y a pas de débat sur ça. Et lui, il a été champion du monde avec elle, il a accompli le rêve de tout le monde."

Ce titre, Räikkönen l'a acquis sur le plus petit des écarts, après une année 2007 intense. En remportant en octobre le Grand Prix du Brésil, ultime rendez-vous de la saison, il a devancé ses rivaux Lewis Hamilton et Fernando Alonso d'un point (110 contre 109). C'était son premier et seul sacre, avant des années plus difficiles.

Kimi Räikkönen sur le podium du Grand Prix du Brésil, à Interlagos, le 21 octobre 2007. (EVARISTO SA / AFP)

Des piges en rallye

Kimi Räikkönen s'était déjà, un temps, éloigné du paddock. À la fin de la saison 2009, Ferrari annonce que le Finlandais ne fera pas partie des plans de la Scuderia pour 2010. Räikkönen se tourne vers le rallye, son autre amour en sport automobile.

Il s'engage au sein du Citroën Junior Team pour le championnat du monde des rallyes 2010 et 2011, avec Kaj Lindström comme copilote. Il dispute une trentaine de courses, remporte une spéciale du Rallye National Vosgien, et surtout, prend du plaisir sur les routes, loin du cirque du paddock.

Il finit par revenir sur les circuits, chez Lotus, d'abord, avant de retrouver les couleurs de Ferrari en 2014. Mais il ne revient jamais à son niveau d'avant, et en cinq saisons, il ne décroche qu'une victoire, au Grand Prix des Etats-Unis 2018. Dès la fin de l'année, il est envoyé chez Alfa Romeo, tandis que le jeune prodige Charles Leclerc est promu dans son baquet Ferrari. Kimi Räikkönen tombe en fond de grille, condamné à de rares exploits pour glaner quelques maigres points.

Kimi Räikkönen sur le podium du Grand Prix du Brésil 2018 aux côtés de Max Verstappen et Lewis Hamilton, à Interlagos, le 11 novembre 2018. (THIAGO BERNARDES / FRAMEPHOTO)

Le temps d'avant

Les adieux sont souvent difficiles, et ceux du Finlandais n'ont pas fait exception. Testé positif au Covid-19 quelques jours seulement après l'annonce de sa retraite, il a dû déclarer forfait pour le Grand Prix des Pays-Bas, et celui d'Italie à Monza, terre de Ferrari, où les tifosis attendaient de pouvoir lui rendre un dernier vibrant hommage. La pandémie a aussi perturbé le calendrier, obligeant la FIA à sauter, pour une deuxième année de suite, les rendez-vous en Asie (Chine, Japon, Singapour), où Kimi Räikkönen est une véritable rock-star.

Avec son départ, c'est aussi une génération de pilotes "d'avant" qui raccroche le volant. Naturels, parfois un peu bruts, mais pas encore lissés par tous les enjeux d'image qui entourent les pilotes d'aujourd'hui. "C'est quelqu'un qui a une approche de la communication très particulière, je ne suis pas sûr que les jeunes aujourd'hui soient dans le même délire", avance Frédéric Vasseur. Un avis partagé par Théo Pourchaire : "Je pense qu'il n'y aura plus jamais de pilote comme lui."

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